Des passagers qui devaient embarquer sur le vol 6027 à 6 h hier à destination d'Alger sont dans un état d'excitation extrême. Un cadre de German qui devait assister à une réunion importante à Alger nous dira : «Je me suis levé à 4h pour être présent à l'aéroport à 5h30, tout cela afin de faire face au mépris des agents d'Air Algérie pour ses clients. De bouche à oreille, il paraît que le vol a été annulé ou reporté à 13h. On n'en sait rien. Le chef d'escale et ses collaborateurs sont invisibles et n'osent pas affronter l'ire de leurs clients.» Même réaction de dépit chez un haut cadre de Sonatrach qui, lui aussi, devait être à Alger impérativement tôt le matin. «Notre pays a raté des opportunités énormes d'investissement à cause de ce laisser-aller. Un homme d'affaires étranger n'acceptera pas de passer des heures dans un aéroport. Il prendra le premier avion pour un autre pays où l'on respecte les gens et les horaires. C'est là qu'il fera des affaires. Pas chez nous. Je suis là depuis 5 h. Il est 11h et aucune annonce n'est venue nous dire si l'on doit patienter ou si l'on doit retourner chez nous.» Le chef d'escale d'Air Algérie, pour sa part, réfute le fait que les passagers n'aient pas été avertis et que «l'annonce du retard du vol pour 13 h a été annoncé» par l'opératrice, ce qu'aucun des passagers n'a pu confirmer. «Le retard était prévisible, nous dira encore le chef d'escale. Le vol Constantine – Paris du 4 septembre est parti avec 9 heures de retard. L'avion ne s'est posé sur le tarmac de Mohamed Boudiaf que mardi 5 septembre à 3h. Je pense que le pilote a voulu prendre le temps nécessaire pour se reposer et que, de ce fait, il ne pouvait assurer le vol trois heures plus tard.» Il nous assurera aussi que le personnel d'Air Algérie a été disponible pour les passagers mécontents, ce que réfuteront tous ceux que nous avons croisés aux alentours des guichets de la compagnie algérienne. Sur place, nous apprendrons aussi que le vol international de la veille qui devait relier Constantine à Marseille avait plusieurs heures de retard. Tous ces retards de plusieurs heures pendant plusieurs jours ne pouvaient être le fait d'un simple hasard, ce que nous confirmera un pilote d'Air Algérie. «Tous ces retards sont voulus. Plusieurs personnes du personnel d'Air Algérie ont eu pour consigne de nous mettre des bâtons dans les roues. Des fois, ce sont les plateaux repas qui nous sont livrés en retard quand ce n'est pas le responsable de l'équipage à qui on a ‘'oublié'' de faire appel. A plusieurs reprises, à Constantine, ce sont les chambres d'hôtel, réservées en principe, qui ne le sont pas avec comme conséquence un équipage qui se retrouve à chercher un gîte au lieu de se reposer pour reprendre un autre vol quelques heures plus tard.» Un cadre administratif, quant à lui, parlera de «chantage du personnel navigant, essentiellement les pilotes, qui, après le dernier crash d'un appareil de la compagnie à Milan, veulent avoir la peau du PDG, Benouis». Et d'ajouter qu'«ils veulent le pourrissement en créant des retards de plusieurs heures espérant que ce manquement de la compagnie aboutira à une vague qui emportera le directeur». Quoi qu'il en soit, des jours sombres s'annoncent, surtout que l'on saura aussi que ces retards ne sont pas uniquement l'apanage de l'aéroport de Constantine et que les victimes seront encore une fois les passagers pris en otages entre les revendications des uns et le mépris des autres. Finalement, pour le happy end, le vol 6027, un Airbus A320, quittera Constantine vers 13 h, avec plusieurs passagers en moins, des passagers qui en avaient ras-le-bol d'attendre.