La radiographie de l'Algérie de 2009 présente de graves lésions : des salaires en berne, des villes qui étouffent et une jeunesse désemparée. Le quotidien des Algériens devient des plus difficiles. Le président de la République a été confronté, lors de ses deux derniers mandats, à des mouvements de protestation sans précédent. Les protestataires étaient généralement demandeurs d'une meilleure qualité de vie. Le « bonheur national brut » fait cruellement défaut. L'« instabilité » touche le cœur même de la société algérienne : les médecins, les enseignants ainsi que d'autres salariés. Non reconnus comme partenaires sociaux, les syndicats autonomes sont souvent réprimés par les pouvoirs publics. Une tripartite devra se tenir prochainement entre la centrale syndicale, le patronat et le Premier ministre pour décider d'une augmentation des salaires. C'est du moins l'une des promesses faites par le président de la République dans sa précampagne. « Les salaires des travailleurs algériens ne favorisent pas l'intégration sociale. Les revenus pratiqués en Algérie sont si bas qu'ils ne permettent pas de couvrir les besoins les plus essentiels », estime Nacer Djhabi, sociologue. Le troisième mandat du président devra être consacré à l'amélioration du pouvoir d'achat des Algériens, condamnés parfois à la débrouille pour joindre les deux bouts. Au marché, beaucoup voient valser les tentations sans pouvoir se faire plaisir. « Aujourd'hui, on trouve de tout dans les marchés. Le seul problème c'est qu'on n'a pas assez d'argent », estime une mère de famille. Les produits de large consommation ont flambé. Les fruits et légumes ont atteint des cimes insoupçonnables : la pomme de terre à plus de 100 DA, les haricots verts à 300 DA. Les œufs atteignent parfois 13 DA. De nombreux autres problèmes participent à démoraliser les Algériens. Le simple fait de se déplacer relève parfois du parcours du combattant. Les grands projets (autoroutes - métro - tramway) semblent encore en stand-by. Les grandes villes étouffent par manque d'infrastructures et de routes adaptées au rush des voitures. L'Algérie n'est pas tout à fait un pays où il fait bon vivre. « La qualité de vie est une notion abstraite. Pour l'instant, il est tout fait clair que l'Algérie est à compter parmi les pays où la vie est rythmée par le terrorisme et non pas par le tourisme », estime Ali, employé dans une entreprise privée. Les jeunes se disent également dans le désarroi. Le manque de loisirs aiguise leurs frustrations. Les rêves sont souvent contrariés. Faute de divertissements, la télévision occupe la première place des loisirs pour 73% des jeunes interrogés par le département de la jeunesse et des sports. « Moi, je rêve de l'étranger, d'une voiture, d'une femme et d'endroits où sortir, me défouler », dit Mourad, chômeur. Il ajoute : « Deux jeunes sur trois pensent à partir, ‘‘vwin djat'' (n'importe où). Depuis toujours, il y a les mêmes maux sociaux : chômage, logement, précarité. Je ne pense pas avoir entendu un seul ministre articuler la politique du gouvernement pour alléger le désespoir et la mal vie des jeunes. » Pour certains, la politique économique et sociale de l'Algérie a parfois des logiques que la logique a du mal à suivre. L'Algérie d'« en bas » se bat pour survivre. L'un des plus grands défis du président sera de faire renaître l'espoir. La tâche n'est pas aisée…