Barack Obama avait dit au mois de janvier dernier, alors qu'il franchissait le seuil de la Maison-Blanche, qu'il allait prendre sérieusement en charge la question du Proche-Orient, et les tractations actuelles en sont pour le moment une première preuve. Le nouveau président américain a pour cela fait appel au sénateur George Mitchell, qui avait dû jeter l'éponge face au refus israélien alors qu'il effectuait une mission identique pour l'Administration de Bill Clinton. Il avait, pour cela, demandé l'établissement de mesures de confiance, et Israël avait refusé d'assumer sa part qui consistait dans le gel de la colonisation. Cette fois, George Mitchell a un immense avantage et un préjugé du même ordre pour son président, celui de commencer sa nouvelle mission au tout début du mandat de Barack Obama. Une preuve de sérieux, diront de nombreux spécialistes. En attendant mieux, ou plus. Et cela ne semble pas aisé, les Israéliens ayant saisi l'importance de cette démarche entreprise par Washington, et c'est pourquoi est fini le temps des humeurs et des atermoiements. Il a suffi, en effet, de quelques mots pour qu'Israël se détermine et de manière claire avec un échange avec l'émissaire américain, celui-ci se prononçant pour la création d'un Etat palestinien, ce à quoi s'oppose ouvertement Israël. Ce qui a conduit à un désaccord croissant entre Washington et Israël autour de la question d'un Etat palestinien, avant que M. Mitchell s'entretienne, hier à Ramallah, avec les dirigeants palestiniens, dont Mahmoud Abbas. Il devait réaffirmer l'engagement des Etats-Unis en faveur d'une solution à deux Etats, alors que les responsables israéliens ont insisté, jeudi, sur la nécessité pour les Palestiniens de reconnaître le caractère juif de l'Etat d'Israël. L'Autorité palestinienne, qui rejette cette exigence, fait, quant à elle, dépendre une reprise des négociations avec Israël d'un engagement israélien en faveur de la création d'un Etat palestinien. Le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a affirmé à l'issue de sa rencontre avec M. Mitchell, jeudi, qu'« Israël attend des Palestiniens qu'ils reconnaissent l'Etat d'Israël comme l'Etat du peuple juif ». Pour l'Autorité palestinienne, cette condition constitue une manœuvre dilatoire créant un « obstacle sur la voie de la paix et de la création de deux Etats », selon Nabil Abou Roudeïna, le porte-parole du président palestinien, Mahmoud Abbas. Elle « se heurte aux efforts internationaux, et notamment américains en vue d'un règlement de paix », a-t-il souligné. Les Palestiniens craignent que cette reconnaissance d'Israël comme l'Etat des juifs ne revienne pour eux à renoncer au « droit au retour » sur leurs terres de réfugiés palestiniens. Quelque 760 000 Palestiniens ont été poussés à l'exode après la création de l'Etat d'Israël en 1948. Cette question, au centre des revendications palestiniennes, avait été l'une des raisons de l'échec des négociations de Camp David entre Israéliens et Palestiniens, en 2000, sous la houlette de Washington. Mais l'approche israélienne se heurte également à celle des Etats-Unis qui n'imposent pas aux Palestiniens une telle reconnaissance, mais insistent sur « une solution à deux Etats, un Etat palestinien et l'Etat juif d'Israël, coexistant en paix », selon les déclarations de M. Mitchell, jeudi, à l'issue d'une rencontre avec le ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman. M. Netanyahu écarte de fait l'option de deux Etats, mais se dit prêt à parler de paix avec les Palestiniens sur la base d'un plan privilégiant leur développement économique. Selon les médias israéliens, Washington serait prêt à accorder quelques semaines à M. Netanyahu pour élaborer sa politique vis-à-vis des Palestiniens. Le Premier ministre israélien a été invité jeudi par M. Mitchell à rencontrer le mois prochain, aux Etats-Unis, le président Barack Obama, mais aucune date n'a pu être fixée. La tournée de George Mitchell est la troisième depuis qu'il a été chargé en janvier par M. Obama de relancer le processus de paix, mais sa première depuis la formation du gouvernement Netanyahu issu des élections anticipées du 10 février. Pour certains analystes, l'étau diplomatique américain se resserre autour de Benyamin Netanyahu, au regard de la conjonction d'éléments lui conférant un préjugé favorable. Autre élément à prendre en compte, un proche de Netanyahu, Israël Katz, le ministre des Transports, a demandé jeudi à Washington de faire preuve de patience : « Le gouvernement a besoin de temps pour présenter une nouvelle approche diplomatique qui tienne compte avant tout de la sécurité d'Israël. » Et cette fois, les Palestiniens sont parfaitement à l'aise pour rejeter les manœuvres israéliennes. Le jeu parait serré pour Israël, mais plus ouvert pour d'autres parties et ce, d'autant plus qu'interviennent d'autres éléments régionaux, comme le probable dialogue entre les Etats-Unis et l'Iran, susceptible de refaire la carte des rapports dans la région.