Son fils a donc réclamé, en son nom, un traitement à domicile. Seuls des médecins du secteur privé ont offert d'intervenir, moyennant 500 DA pour chaque intervention, somme qu'il ne peut débourser. Quant aux hôpitaux publics, aucune réglementation ne les autorise à pratiquer ce genre d'intervention. Pourtant, depuis des années, le ministère de la Santé promet la mise en place d'unités spécialisées en hospitalisation à domicile, puis, éventuellement, en assistance et aide médico-sociale de proximité. C'est au CHU de Birtraria, en novembre 1999, qu'ont été lancées les premières «opérations pilotes», sous l'intitulé «Hospitalisation à domicile» (HAD). Sous l'impulsion du Pr Brouri, chef de service médecine interne du secteur sanitaire, cette pratique médicale a été confrontée au terrain pour mieux déceler les contraintes et y remédier. Cette démarche concernait tout patient lourd résidant dans la circonscription d'El Biar, sans condition d'âge, le but étant de répondre à une «réelle demande des patients et de leur entourage» et de contribuer à la «modernisation nécessaire de notre système sanitaire». Dans un rapport, le Pr Brouri explique comment il a atteint les objectifs inhérents à l'activité mais n'a pu régler les problèmes de logistique. Il s'avère que l'APC lui avait fourni des moyens qui se sont vite révélés insignifiants : une ambulance plusieurs fois «détournée par les responsables de l'APC», donc indisponible alors qu'indispensable, un téléphone portable fonctionnant 4 mois sur les 4 ans prévus… Le CHU ne doit, en fait, sa réussite qu'à la persévérance du personnel mobilisé. Quant aux autres centres hospitaliers, rien ne leur permet de suivre la voie tracée par Birtraria. Situation déplorable si l'on considère qu'il était prévu qu'à terme, cette phase d'expérimentation ferait tache d'huile en encourageant la naissance de groupes de l'HAD dans chaque hôpital d'Alger et des autres daïras, réunis plus tard sous une seule direction coordonnant leurs activités. L'obstacle à la réalisation du projet : une traduction légale insuffisante. Seul l'arrêté du ministère de la Santé, daté du 19 avril 2003, porte «création et fonctionnement du dispositif de l'hospitalisation à domicile», c'est-à-dire d'une équipe mobile se consacrant à cette seule activité dans la majorité des services sanitaires. Suit l'énumération des moyens humains et matériels censés être mis à disposition, à savoir une douzaine de médecins et infirmiers, un ambulancier, une psychologue, et même un kinésithérapeute et une assistante sociale. Noble arrêté, certes, le problème étant qu'aucune réglementation n'est venue l'étayer pour préciser des points aussi importants que la formation et le recrutement du personnel, sa rémunération, ses astreintes du week-end, sa protection lors des déplacements. Il s'agit, tout bonnement, d'un acte mort-né. Le bilan s'impose en cette année 2007. Le CHU d'El Biar, qui poursuit tant bien que mal cette activité par un autofinancement courageux, reste le seul à proposer ces services. Toujours dans son rapport, M. Brouri voyait loin, trop loin peut-être, lorsqu'il évoquait la nécessité d'étendre prochainement l'activité de l'HAD à des soins plus larges à domicile. Vieillissement de la population, atomisation des individus, instabilité économique, héritage des années noires. Tous ces facteurs tendent à plonger des citoyens dans un «dénuement inacceptable, un seuil de pauvreté qui ne peut nous laisser indifférents». L'hospitalisation à domicile, concernant les maladies graves, doit s'accompagner d'un soutien médico-social multiforme. Des médecins, rencontrés à l'hôpital Mustapha, sont unanimes : «développer ces activités reviendrait à s'adapter, enfin, aux nouvelles exigences de la santé publique.»