Plus que cinq jours avant les élections générales en Irak où la guerre fait rage, malgré le fait que sa fin avait été officiellement décrétée par le président américain George W. Bush le 1er mai 2003. Qu'on est loin et même très loin de cet optimisme débordant qui a amené les Etats-Unis à une telle situation avec des analyses chaque jour battues en brèche par une opposition armée sur laquelle en fin de compte ils ne connaissent rien, malgré la présence à coups de communiqués que seuls les Américains croient pouvoir authentifier, d'Abou Mossab Zarkaoui dont l'existence même est contestée par des dignitaires religieux irakiens. Toujours est-il qu'alibi ou pas, le scrutin de dimanche prochain présenté comme la solution aux problèmes actuels de l'Irak, ne suscite pas le moindre enthousiasme que même les candidats n'arrivent pas à effacer. Il est vrai que pour beaucoup d'Irakiens, sans aller jusqu'à regretter l'ancien régime, sont persuadés qu'aller au vote c'est quelque part entériner un fait accompli. Ils en sont également dissuadés par la résistance qui s'en prend cette fois directement aux électeurs en avertissant que ses tireurs embusqués abattraient les Irakiens qui se rendraient dans les bureaux de vote au nord de la capitale. « Les snipers entraînés seront prêts à abattre les apostats qui se rendront dans les repaires électoraux », a indiqué un communiqué signé de l'Organisation d'Al Qaîda au pays du Rafidaïn (Mésopotamie) et distribué à Al Dour, au nord de Baghdad. « Les prochains jours seront les pires pour ceux qui s'impliquent dans l'opération consistant à établir les principes des apostats sur la terre de l'Islam », ajoute le texte. Zarqaoui, chef d'Al Qaîda en Irak, avait déjà déclaré dimanche, dans un message audio qui lui est attribué, « une guerre farouche » aux élections et critiqué en particulier les chiites, majoritaires en Irak. Lundi, son groupe a revendiqué un attentat à la voiture piégée près du siège du parti du Premier ministre Iyad Allaoui à Baghdad qui a fait deux morts et plusieurs blessés, ainsi que deux attaques contre la police au nord de Baghdad. Dans leurs efforts pour assurer la sécurité du scrutin, les autorités irakiennes ont annoncé lundi la capture de deux lieutenants de Zarqaoui. « Les forces irakiennes ont arrêté, le 15 janvier, Sami Mohammad Saïd Al Jaf, alias Abou Omar Al Kurdi, un adjoint de Zarqaoui. Il est responsable de 32 attaques à la voiture piégée », dont l'attentat meurtrier contre le siège de l'ONU à Baghdad en août 2003, précise le communiqué. Le resultat ne s'est pas fait attendre, puisque cette violence a dissuadé plus d'un pour venir dans ce pays à quelque titre que ce soit. Mais Washington a minimisé la portée de l'absence d'observateurs internationaux au scrutin, en estimant que les Irakiens eux-mêmes devront juger de la crédibilité des élections. Bien que la présence d'observateurs étrangers « fournirait une dimension supplémentaire (...), ils ne garantiraient pas pour autant l'exclusivité de la crédibilité ou de la légitimité de ces élections », a déclaré le porte-parole adjoint du département d'Etat Adam Ereli. Pourtant, le ministre irakien des Finances, Adel Abdel Mahdi, un chiite candidat sur la Liste unifiée irakienne (LUI) qui part favorite pour le scrutin, a dit craindre des fraudes lors du vote. « Nous ne pouvons nous rendre dans toutes les régions pour observer (le scrutin). Nous craignons vraiment des opérations de fraude », a-t-il dit. Sur ce chapitre, des tensions politiques sont apparues dans le Nord, le Front unifié arabe, regroupant des formations arabes sunnites et chiites à Kirkouk, ayant décidé de se retirer du scrutin provincial après la décision d'autoriser les Kurdes déplacés à voter dans la région. Bien sûr, la tentation de présenter la situation sous la forme de cas isolés est toujours forte, sauf que la réalité pousse parfois à de terribles aveux. La violence persistante, et même quand elle s'aggrave comme c'est le cas actuellement, et probablement même pour une période qu'il est impossible d'évaluer, est banalisée, alors que les Irakiens refusent de la considérer comme une fatalité. Ils ne sont pas seuls dans ce cas, puisque d'autres avaient parlé de boîte de Pandore. Des rapprochements ont été établis avec le Vietnam, que la victoire militaire américaine rapide sur l'armée régulière irakienne, avait éclipsé, mais les faits sont têtus, comme l'attestent les pertes américaines de plus en plus grandes et de moins en moins médiatisées.