Alors que se tenait à Paris du 17 au 19 janvier le 3e Forum mondial sur le développement humain organisé par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et le ministère des Affaires étrangères français pour faire un bilan d'étape des objectifs du millénaire pour le développement, l'économiste Jeffrey Sachs, professeur à l'université de Columbia, remettait lundi à Kofi Annan, secrétaire général des Nations unies, un rapport intitulé « Investir dans le développement : plan pratique pour réaliser les objectifs du millénaire. » Plus d'un demi-milliard de personnes pourraient sortir de la pauvreté, 250 millions pourraient échapper à la faim, et 30 millions d'enfants pourraient être sauvés si les pays riches doublaient leur aide au développement au cours des dix prochaines années, relève ce rapport qui estime que l'aide au développement doit atteindre 195 milliards de dollars en 2015, si la communauté internationale souhaite atteindre les objectifs du millénaire pour le développement qu'elle s'est fixé il y a cinq ans. Jeffrey Sachs estime que les pays pauvres doivent eux aussi prendre leurs responsabilités, notamment en termes de bonne gouvernance, de transparence et de corruption. Ce rapport auquel, ont contribué 250 experts, devrait être présenté en juillet aux pays du G8, puis en septembre à l'Assemblée générale des Nations unies. L'année 2005 est considérée comme l'« année de la dernière chance » pour la réalisation, d'ici 2015, des objectifs du millénaire pour le développement (OMD) visant notamment à réduire de moitié la pauvreté dans le monde. Pour ce faire, la communauté internationale s'est fixé huit objectifs : réduire de moitié la proportion de la population, dont le revenu est inférieur à 1 dollar par jour (sur quelque 6 milliards d'habitants, la terre compte aujourd'hui environ 1,2 milliard de personnes vivant dans un dénuement extrême, avec moins de 1 dollar par jour, tandis que 1% des habitants les plus riches gagnent autant que les 57% les plus pauvres de la planète) ; favoriser l'accès à l'éducation primaire pour tous les enfants ; promouvoir l'égalité et l'autonomisation des sexes ; réduire la mortalité infantile et améliorer la santé maternelle ; combattre le sida et le paludisme ; favoriser l'accès à l'eau potable ; assurer un environnement durable ; développer un partenariat mondial entre le privé et le public. Au rythme actuel, ces objectifs fixés en 2000 ne seront jamais atteints. Le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement qui se tiendra du 14 au 16 septembre prochain « doit être l'occasion de dresser un bilan cinq ans après ses engagements », a indiqué Michel Barnier, ministre français des Affaires étrangères, qui a ouvert lundi le 3e Forum sur le développement humain aux côtés de Mark Malloch Brown, l'administrateur du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Et d'ajouter : « A un tiers du parcours, soyons lucides : les perspectives ne sont pas satisfaisantes. Au rythme actuel, la plupart des objectifs du millénaire pour le développement (OMD) ne seront pas atteints, en particulier en Afrique subsaharienne. Face à ce constat, 2005 doit donc être l'occasion de réaffirmer nos engagements, au Nord comme au Sud, et de prendre les mesures indispensables pour réaliser nos objectifs, ambitieux mais indispensables pour tous. » « Un nouveau consensus doit se forger pour faire face aux nouvelles menaces qui ne connaissent pas de frontières et exigent une réponse multilatérale. Il revient maintenant aux Etats de s'approprier ces mesures et de les rendre opérationnelles. » Les gouvernements du monde entier se sont engagés à consacrer 0,7% de leur PIB pour réaliser les objectifs du millénaire et d'autres projets. Parmi les pays industrialisés, seuls le Danemark, la Norvège, la Suède, les Pays-Bas et le Luxembourg ont dépassé cet objectif. La France, la Grande-Bretagne, la Belgique, la Finlande et l'Irlande se sont engagées à atteindre ce seuil avant 2015. La part des Etats-Unis est de 0,1%. Michel Barnier a rappelé que la France s'est engagée à porter son aide publique au développement à 0,5% du PIB en 2005 et à 0,7% en 2012. March Malloch Brown, l'administrateur du PNUD et Xavier Darcos, ministre français délégué à la Coopération, au Développement et à la Francophonie sont revenus lundi soir, à la faveur d'une conférence de presse, sur les objectifs du millénaire pour le développement. « La malnutrition ou les maladies liées à l'eau font autant de morts chaque semaine qu'un seul tsunami : 25 000 Africains meurent chaque jour de malnutrition ou tout simplement de la faim. Et cela sans parler des ravage du sida, des 14 millions d'enfants qui sont aujourd'hui orphelins à cause de cette épidémie », a souligné Xavier Darcos. Rappelant que sur les 7,2 milliards d'euros accordés chaque année par l'Agence française de développement, près de 70% sont à destination de l'Afrique, le ministre a ajouté qu'« il faut maintenant passer de l'humanitaire au développement. On ne pourra jamais complètement prévenir une catastrophe naturelle, alors qu'on peut palier le sous-développement. Il suffit de le vouloir et de le faire. »