Elisabeth, reine d'Angleterre, le groupe de luxe LVMH, des géants de l'agroalimentaire : la levée, hier, du secret le mieux gardé de l'Union européenne révèle que les principaux bénéficiaires des aides agricoles ne sont pas fermiers et sont loin d'être dans le besoin. Ce n'est pas vraiment une surprise pour Mariann Fischer Boel, la commissaire européenne à l'agriculture, qui bataille contre les gouvernements pour rendre la politique agricole commune « plus équitable ». En fait, l'obligation faite aux pays de publier la liste des bénéficiaires des aides agricoles pour le 30 avril minuit, vise à relancer le débat sur l'avenir de cette politique, deuxième poste des dépenses communautaires avec 55 milliards d'euros, soit 40% du budget. « Les contribuables européens ont le droit de savoir comment leur argent est dépensé », s'est-elle justifiée. « Seule la transparence permet d'améliorer la gestion de ces fonds et c'est seulement de cette manière que nous pourrons avoir un meilleur débat sur l'avenir de la politique agricole commune. », a-t-elle souligné. Seule l'Allemagne ne s'est pas encore exécutée, car des recours ont été introduits devant plusieurs tribunaux du pays pour dénoncer une atteinte à la protection des données personnelles. La Commission lui a accordé un court délai de grâce, mais les bénéficiaires des subventions seront rapidement connus. Surprise en France : aucun agriculteur ne figure parmi les 24 bénéficiaires des plus grosses subventions, supérieures à 5 millions d'euros. On retrouve en revanche le groupe de luxe LVMH pour son cognac et des industriels de l'agrolimentaire. Les agriculteurs, eux, se sont partagés 9,5 des 10,3 milliards d'aides attribués à la France, soit en moyenne 20 000 euros par tête et par an : moins de 2000 euros par mois. Au Royaume-Uni, les principaux bénéficiaires ne sont pas non plus dans le besoin. Le chèque obtenu par Margaret Thatcher en 1984 en réponse à son « I want my money back », améliore substantiellement les revenus des riches propriétaires terriens que sont la reine Elisabeth, première fortune du Royaume et son fils aîné le prince Charles. Parmi les autres gros bénéficiaires, on trouve également la multinationale Nestlé. La France et la Grande-Bretagne sont les deux principaux protagonistes de la guerre pour la réforme de la PAC. Les Britanniques veulent supprimer les subventions, les Français bataillent pour les maintenir.