L'Algérie a bel et bien commencé à subir les conséquences de la crise financière internationale et si la chute de plus de 70% des prix des hydrocarbures en l'espace de quelques mois en est la plus spectaculaire, celle des investissements directs étrangers en régression de près de 3 milliards de dollars en 2008 n'en est pas moins dramatique. Le problème n'a jamais été officiellement évoqué par les autorités algériennes, mais tel qu'évalué par l'Observatoire international des investissements étrangers (Anima), le volume des IDE captés par l'Algérie a chuté d'environ 40% en 2008. L'Agence nationale pour le développement de l'investissement (ANDI) en attendait un peu plus de 7 milliards de dollars à la fin de l'année 2008, mais elle n'a, dans les faits, pu comptabiliser qu'environ 4 milliards. De nombreux projets, notamment ceux que devaient financer certains pays du Golfe, ont subitement été mis en veilleuse parmi lesquels 5 grands projets ont été carrément abandonnés. Il est bon de signaler que les projets réalisés à la faveur des IDE ont créé, au cours de ces 5 dernières années, pas moins de 250 000 emplois en Algérie, ce qui n'est pas du tout négligeable au regard de l'acuité du problème de chômage que nous vivons. Si la crise venait, comme on le craint, à s'installer dans la durée, il est évident que les promoteurs d'IDE introduiront de profonds changements dans leur politique d'investissement international, en misant davantage sur la prudence et en optant, notamment, pour les pays offrant les meilleurs avantages compétitifs et une réglementation des affaires motivante et stable. Ce que l'Algérie ne pourrait, à l'évidence, offrir tant sa législation sur l'investissement peut être remaniée au gré de l'humeur des princes (cas des dernières circulaires sur les IDE et les sociétés d'import-export avec obligation pour le partenaire local d'y détenir la majorité du capital, la taxe sur les dividendes exportés, etc.), l'accès au foncier industriel toujours problématique et le climat des affaires constamment perturbé par une bureaucratie tatillonne et prédatrice. Face à l'ampleur de la crise financière internationale, le problème qui se pose aujourd'hui au pays n'est pas tant de capter de nouveaux IDE, mais de préserver ceux déjà acquis mais qui menacent de disparaître si les conditions de promotion des affaires en Algérie restent aussi compliquées et périlleuses. Et, compte tenu de la situation déplorable dans laquelle se trouve la gouvernance économique du pays, il y a, du moins sur le court terme, peu de chances que les conditions générales d'investissement s'améliorent significativement. Face à l'ampleur du chômage et aux menaces du front social, la tentation pour un gouvernement, qui dispose encore d'une importante rente financière, est de s'ériger, comme au temps du régime socialiste, en entrepreneur exclusif du développement. La couleur est déjà annoncée avec l'investissement massif (150 milliards de dollars en 5 ans) dans la réalisation d'infrastructures, l'assainissement financier de plus de 230 EPE en faillite et le financement de grands projets industriels (pétrochimie, hydraulique...) par le biais du Fonds national de l'investissement, dont les capitaux appartiennent en totalité à l'Etat. C'est, évidemment, une démarche qui ne vaut que dans la mesure où l'Etat est, comme c'est actuellement le cas, en situation de surliquidité financière. Tous les pronostics sérieux tablant sur une fonte massive de nos réserves de change à l'horizon 2012, la question du financement des investissements productifs doit plus que jamais se poser en termes de diversification du nombre et de la qualité des promoteurs. Si l'Etat doit effectivement jouer pleinement son rôle de régulateur et de promoteur d'infrastructures de base, il doit absolument laisser le champ de l'investissement industriel aux seuls professionnels, qu'ils soient algériens ou étrangers. Ce n'est qu'ainsi que l'Algérie aura quelques chances de construire une économie de marché dont le commerce et l'industrie seraient entre les mains d'acteurs régis par le code du commerce et non par des injonctions politico-administratives. C'est pour cela que d'aucuns pensent que pour booster l'investissement, aussi bien national qu'étranger, dans notre pays, l'Etat ferait beaucoup plus œuvre utile en mettant tout son poids dans l'amélioration du climat des affaires et l'approfondissement des réformes, qu'en agissant, comme il a de plus en plus tendance à le faire, en tant qu'entrepreneur exclusif du développement.