Les fortes chutes de neige qui se sont abattues sur la capitale ces derniers jours ont été presque fatales pour les 420 familles de Bentalha. Cette bourgade sortie de l'anonymat pour avoir été le théâtre d'un sanglant massacre perpétré par les terroriste en 1997, vit une situation sociale difficile. Dans la nuit du vendredi, les citoyens ont bloqué les principaux axes routiers afin de manifester leur colère face aux coupures incessantes d'électricité. Routes barricadées, pneus brûlés et même des affrontements ont eu lieu contre les forces d'intervention rapide dépêchées sur les lieux. « Cela fait plus de 10 jours que nous faisons face à des coupures fréquentes d'électricité. A partir de 18h et ce jusqu'à 23h, le courant électrique est inexistant à Bentalha », avoue un citoyen rencontré au centre-ville. Et d'ajouter : « En cette période de froid glacial, des centaines de familles souffrent de l'inexistence du réseau de gaz de ville et du manque de gaz butane. » Pour Layachi Deghtel, directeur de la distribution de Sonelgaz de la circonscription administrative d'El Harrach, le changement de mode de consommation des ménages dû à la vague de froid en est la principale raison. « Notre réseau électrique n'a pas supporté cette surcharge », affirme-t-il. Selon lui, le système de protection n'a pas résisté et s'est déclenché automatiquement. Afin de pallier cette situation, le même responsable annonce qu'un plan de restructuration et de renforcement du réseau est déjà en place. Il s'agit de l'installation de nouvelles lignes électriques devant alimenter la localité de Bentalha pour soulager l'ancien réseau. « Nous avons rencontré des problèmes avec un des exploitants de l'exploitation agricole collective Domaine Amrane qui a refusé qu'on plante les poteaux électriques malgré l'accord de la direction de l'agriculture. L'affaire est entre les mains de la justice qui devra trancher », nous dit-il. Pour ce responsable, l'installation de ce réseau mettra fin aux coupures incessantes d'électricité. Interrogé sur le montant des dettes dues aux redevances impayées, il précise que les trois communes de la circonscription administrative de Baraki (Sidi Moussa, Baraki et les Eucalyptus) sont endettées d'un montant qui dépasse les huit milliards de centimes. Contacté, le président de l'APC de Baraki refuse de se prononcer sur ce problème. Bentalha : « Nous voulons vivre ! » Les citoyens de Bentalha font face à l'oubli et à « l'ingratitude » des élus locaux, comme l'a exprimé cheikh Boudjemaâ, un patriote connu de la ville. « Nous avons fait face aux terroristes durant plus de dix années et voilà dans quelle situation nous nous retrouvons. Nos enfants font face au chômage, à la malvie et à divers problèmes. Et c'est à cause de ces problèmes sociaux que la criminalité connaît une hausse dangereuse », dit-il. Vêtu d'un manteau vert à l'effigie de l'ANP, sûr de lui, il ajoute que Bentalha est dépourvue de tout. « Cela fait des années que nous attendons la concrétisation des promesses des élus locaux. Mais ils ont apparemment d'autres chats à fouetter », avoue-t-il, montrant du doigt les routes impraticables, les amas d'ordures et les nids de poule. Les ruelles de Bentalha, en cette journée de samedi, sont inondées d'eau de pluie. Ici, le bitume est inexistant, les trottoirs aussi. Les conduites d'eau potable et celles du réseau d'évacuation des eaux usées ont été installées de manière anarchique. « Nous n'avons pas de pression d'eau dans les robinets et le réseau d'évacuation des eaux usées est constamment obstrué. Les regards d'évacuation des eaux usées que vous voyez là sont tous bouchés », ajoute-t-il. Selon des jeunes, le centre culturel, fraîchement inauguré par Mme Khalida Toumi, a fermé ses portes. « Nous ne savons même pas quelles sont les raisons de cette fermeture », affirment-ils. « Les autorités locales ont posé une couche de bitume jusqu'à la limite du centre culturel, juste ce qu'il faut pour permettre à la ministre d'inaugurer ce centre », précisent-ils. « Pourquoi l'APC n'a pas terminé cette opération en goudronnant la totalité des rues de Bentalha ? Sommes- nous des Algériens à part entière ou y a-t-il une différence entre un citoyen de Bentalha et un ministre ? », s'interrogent-ils. Selon eux, les raisons de la dégradation des routes sont dues en grande partie aux camions de gros tonnage de Cosider. Cette entreprise algérienne de construction a installé à l'extrémité de la ville une unité de production de béton armé pour alimenter son projet de construction de 700 logements. « Les camions, les semi-remorque, les bétonnières traversent les rues à longueur de journée et même la nuit, causant de multiples désagréments aux habitants. La plaque signalétique interdisant l'accès à la ville des camions de plus de 5 tonnes a été arrachée. Les enfants des trois écoles primaires et du CEM font face à un réel danger de mort », attestent les habitants, précisant qu'une route secondaire existe, située près de Oued Djemaâ, mais que les chauffeurs de Cosider refusent d'emprunter. Plus loin, les amas d'ordures agressent les yeux du visiteur. Les citoyens rencontrés non loin du bureau de poste de Bentalha sont unanimes : « Les coupures d'électricité n'étaient, en fait, qu'une étincelle. Nous avons marre de ce cadre de vie. Nous ne pouvons plus supporter des promesses sans lendemain. » L'alimentation en gaz de ville fait aussi défaut. La bonbonne de gaz butane est cédée entre 240 et 250 DA, alors que le prix est fixé par Naftal à 200 DA. « Nous n'avons qu'un seul fournisseur pour plus de 420 foyers. Est-ce logique ? », s'interroge un habitant. Et d'ajouter : « Le principale canalisation de gaz traverse la ville de Baraki et va jusqu'à la zone industrielle de Baba Ali, à une distance de 200 m de Bentalha, alors que nous n'avons pas droit au gaz de ville. Nous avons alerté les pouvoirs publics, écrit des lettres ouvertes à toutes les autorités, mais personne n'a voulu nous répondre. » Au niveau de Oued Djemaâ, une véritable décharge publique s'est installée. Les dépôts sauvages sont devenus fréquents. « Cet oued a été pollué par ces individus qui déversent des amas d'ordures n'importe comment. Nous avons sollicité l'APC pour intervenir et interdire tout dépôt, mais personne ne voulait nous écouter », raconte un riverain.