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“Oui pour la paix mais avec qui ?”
Des citoyens de Bentalha et de raïs expriment leur scepticisme
Publié dans Liberté le 28 - 08 - 2005

Dans ce village, à 10 kilomètres/metricconverter / d'Alger, théâtre d'un horrible massacre en 1997, la situation des familles de victimes du terrorisme demeure difficile.
De l'avis d'une psychologue, la situation est difficile, voire délicate pour “les gens touchés dans leur chair”. Reportage.
Qui ne connaît pas à Bentalha, cette petite ville de la Mitidja, le centre psychologique ? L'établissement en question, ouvert en 1997 au lendemain des grands massacres qui ont ciblé cette localité, est accueillant avec sa grande cour, qui est utilisée comme salle d'attente. La présence des journalistes sur les lieux n'est pas appréciée par certains patients. Un couple approché a refusé catégoriquement de s'exprimer sur la démarche de la paix et de la réconciliation nationale. “Ma femme et moi n'avons rien à vous déclarer ici, vous n'avez qu'à aller voir les gens chez eux pour vous répondre”, déclare le mari, en entraînant vivement son épouse vers la sortie. La réponse nous viendra d'une femme, la quarantaine passée, mère de 9 enfants et dont le mari a été tué en 1996 par une bombe à Zouaoui, près de Sidi Moussa.
“J'ai été moi-même blessée ce jour-là par les éclats de la bombe, je garde d'ailleurs des cicatrices ; regardez-les”, nous invite-t-elle, en arrangeant son foulard noir pour nous montrer les marques sur son cou. “Je vis avec une pension de 15 000 DA qu'on m'a octroyée après la mort de mon mari. Je n'ai pas bénéficié d'indemnisation en tant que blessée. Pour le reste, el hamdoullah (Dieu merci), sauf que je suis à la recherche d'un logement”, confie la bonne femme. Selon elle, à Bentalha, distante d'à peine une dizaine de kilomètres d'Alger et dans les régions environnantes, la situation s'est beaucoup améliorée. “On vivait dans la terreur tous les jours, ce qui n'est plus le cas maintenant. On sort à présent dans la rue, on rend visite à la famille, on fête les mariages et les circoncisions, mais on n'est pas heureux. Les gens sont confrontés à des tas de problèmes, à la cherté de la vie, aux maladies”, dit-elle. Que pense-t-elle du projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale ? “Moi, je ne pardonne pas. Mais je m'en remets à Dieu. Nous, les gens modestes, on n'a rien compris à tout ce qui s'est passé, certains disent même que les harkis n'ont pas eu leurs droits… Ce qui nous intéresse, c'est de manger notre pain”, déclare la mère de famille, en tirant nerveusement sur sa longue robe et en promettant d'aller voter “pour qu'il n'y ait plus d'anarchie, pour qu'on nous donne nos droits”. Assise sur le même banc, une autre femme, un peu plus âgée et jusque-là silencieuse, soupire longuement avant de nous annoncer d'une voix lasse et sceptique : “Il n'y a pas de justice, nos droits sont chez Dieu. Lui seul sait ce qu'on a enduré toutes ces années. On veut bien croire en la paix, mais avec qui, avec l'ennemi ?” Cette intervention aura comme un effet de douche froide sur les personnes venues en consultation : celles-ci, pour la plupart des femmes, vont s'enfermer dans le silence et ce, malgré notre insistance. Plus aucune remarque ne sera formulée, plus aucun regard ne sera dirigé dans notre direction !
Interrogée sur les conséquences des tueries de 1997 à Bentalha et Raïs sur ses patients, une des psychologues du centre reconnaît qu'au début, ces derniers ressortaient sans cesse “l'idée de victime du terrorisme”, lors de leurs déclarations. Une idée qu'elle juge de toutes les façons “pas bonne à long terme, car elle les fragiliserait”. “Le centre de psychologie est ouvert aussi aux familles de terroristes. Au début, les victimes du terrorisme refusaient de rencontrer les familles de terroristes, qui étaient souvent des veuves. Il y a eu ensuite une phase d'accusations. Grâce aux explications données et à la thérapie familiale, la question ne se pose plus à présent de savoir si la personne qui se présente chez nous est victime du terrorisme ou de la famille d'un
terroriste. Nos patients ont accepté la cohabitation avec les familles de terroristes, puisqu'elles reviennent aux consultations”, expose-t-elle, non sans indiquer plus loin que “beaucoup de patients (touchés par le terrorisme, ndlr) demandent encore la reconnaissance du statut de victimes du terrorisme”. À propos des enfants, la psychologue rappelle l'ouverture, en 2001, d'un bureau des orphelins. “Nous sommes un centre de santé mentale, nous ne faisons pas de différence entre un enfant victime du terrorisme et un enfant de terroriste. Pour nous, il s'agit d'orphelins qui ont perdu leur père”, dit-elle. La professionnelle de la santé admet d'ailleurs que les enfants suivis dans son centre manifestent “moins de violence” dans leurs jeux et connaissent “moins d'échecs scolaires”. Elle est cependant moins sûre d'elle au sujet de la cohabitation entre les victimes des sanguinaires et les terroristes, qui seraient éventuellement amnistiés après le référendum, car le centre de Bentalha n'a jamais connu un tel cas de figure, pas même avec les repentis. “La question reste posée. Il faudrait prévoir une thérapie et une communication adéquate, en faisant préalablement des sondages, en donnant toute l'importance à la vie des gens. Il faut connaître le projet, donner les explications nécessaires… Il faut faire les premiers pas et affronter la peur. Ce n'est pas facile et c'est tellement délicat pour les gens touchés dans leur chair”, souligne-t-elle, tout en ajoutant : “La vie a, petit à petit, repris ses droits. Il y a plus de sécurité, les écoles ont rouvert leurs portes, les femmes et les jeunes filles sortent, prennent le bus, certaines fréquentent même nos ateliers de coiffure, de dessin sur soie et de tissage.”
Dans la cour, un homme d'environ 50 ans, habillé en bleu de travail, nous attend. Il insiste pour “parler à la presse”. “Je suis venu dénoncer le projet. Je le rejette, parce qu'il met le tueur et le tué dans le même sac. C'est un projet qui pardonne à celui qui a égorgé ma femme et mes 9 enfants, dans le massacre du 23 septembre 1997”, lâche-t-il d'une voix forte et saccadée, en prenant à témoin l'assistance. La psychologue qui nous a reçus dans son bureau accourt alors vers lui et l'invite à quitter les lieux. “Si vous voulez vous exprimer, allez le faire en dehors du centre”, lui intime-t-elle, en lui désignant le portail. “La femme et les enfants du terroriste n'ont rien fait, on le sait, mais celui qui a tué, égorgé, éventré des femmes enceintes, pendu des gamins et joué avec les têtes coupées des jeunes filles, doit payer, il doit rendre des comptes, sinon cette hodna (trêve) va durer combien de temps ? Je suis pour la paix, mais je ne pardonne pas aux criminels, je suis prêt à le dire à Bouteflika en face. S'il veut que je lui rende les 42 millions d'indemnisation, je le ferais”, lui rapplique l'intrus, avant de quitter les lieux. Dans les rangs des patients, des gémissements se font entendre.
H. A.


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