On ne veut plus de vous, partez ! ». « La France est ingrate. Bois, pétrole, manganèse, on vous a tout donné. La France, si elle est ce qu'elle est, c'est grâce au Gabon, on ne veut plus de tout ça ! » Le président Sarkozy aurait sans doute aimé ne pas entendre ces huées rageusement éructées hier par les Gabonais à l'intérieur même du palais présidentiel, où le cercueil de Omar Bongo est exposé. N'étaient les circonstances de deuil, le président français aurait peut-être lâché une sèche réplique du genre « casse-toi pauvre con ! ». Mais, il a dû encaisser sans broncher, de peur de perdre le précieux héritage de Omar Bongo. Pour l'histoire néanmoins, ce reproche cru et « sonore » fait au président Sarkozy par les Gabonais sonne comme une fin d'une histoire, celle de la « Françafrique ». Il cristallise une prise de conscience de jeunes Gabonais, à savoir que plus rien ne serait comme avant. C'est un peu une façon de signifier à Sarkozy et à tout son cabinet, qui l'accompagnait hier, que la France devrait désormais enterrer son « droit de regard » avec la dépouille de son fidèle serviteur Omar Bongo. Habile, Nicolas Sarkozy ne s'avoue pas pour autant vaincu. Tout de suite après, il explique aux journalistes français que les huées s'adresseraient à eux, prétextant l'annonce prématurée de la mort de Bongo ! C'est le grand écart, mais Sarkozy s'en sort par cette pirouette qui ne trompe personne au demeurant. Le souci d'adouber, voire imposer un « bon » successeur à Bongo, qui aura le fardeau de maintenir même sous perfusion la « Françafrique », est très perceptible. Même si le président français fait mine de respecter le libre choix du peuple gabonais. « La France n'a aucun candidat. (...) Elle ne soutient personne. (…) Les Gabonais choisissent qui ils veulent et la France travaillera avec le président ou la présidente choisi(e) par les Gabonais », a-t-il lancé hier à la fin de la cérémonie religieuse. Mais le fils de son père, Ali Ben Bongo, ajuste déjà sa cravate et s'essaye au discours. Hier, il s'est engagé à suivre la voie de son défunt père dans ce qui s'apparente à un passage de témoin sous l'œil bienveillant de Paris. Sarkozy se frotte déjà les mains. Il a conseillé aux autorités gabonaises de « respecter les institutions et les délais autant que possible » pour la succession. Autrement dit, il faut faire vite avant que la rue et les forces progressistes ne mettent les bâtons dans les roues de Ali Bongo, qui se voit déjà dans le fauteuil de son père. Paris gagnés ? Pas si sûr…