L'image est émouvante : le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, agrippé au cercueil de sa mère porté par une foule compacte avant d'être inhumée au cimetière de Ben Aknoun. Une image qui résume si besoin est, le lien particulièrement fort qui unissait Bouteflika à sa mère, feue Mansouriah Ghezlaoui. Elle s'est éteinte dans la nuit de dimanche à lundi, en son domicile à Alger. Elle avait plus de 90 ans. L'enterrement de la défunte qui s'est déroulé hier, après la prière d'Al Asr, au cimetière de Ben Aknoun, a donné lieu à un important défilé de figures politiques et autres hauts commis de l'Etat, qu'ils soient en exercice ou à la retraite. Dès 15h, les premières personnalités arrivaient. Vers 16h, c'est le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, qui fait son apparition au milieu d'un dispositif sécuritaire impressionnant. A quelques ministres près, tous les membres de l'Exécutif ont fait le déplacement : Yazid Zerhouni, Mourad Medelci, Abdelmalek Sellal, Amar Ghoul, Hachemi Djiar, Karim Djoudi, etc. Le président du Sénat, Abdelkader Bensalah ainsi que le président de l'APN, Abdelaziz Ziari, étaient également de la cérémonie. De hauts gradés de l'institution militaire à la tête desquels figurait le général-major Ahmed Gaïd Salah, chef d'état-major de l'ANP, ont assisté aux funérailles, de même que nombre de généraux à la retraite : Mohamed Lamari, Khaled Nezzar ou encore le général-major Mohamed Touati. Il convient par ailleurs de souligner la présence de deux anciens présidents, en l'occurrence Ahmed Ben Bella et Ali Kafi, ainsi que l'ancien chef de gouvernement, Belaïd Abdeslam. Diverses anciennes figures du sérail étaient à l'enterrement ainsi que des représentants de différentes organisations et institutions : Abdelmadjid Sidi Saïd, patron de l'UGTA, l'ancien DG de l'ENTV Hamraoui Habib Chawki, Toufik Khelladi, DG de la Radio nationale, Ouahid Bouabdallah, PDG d'Air Algérie, Zouaoui Benhamadi, DG de l'Agence des grands projets culturels… Ajoutez à cela des députés et autres chefs de parti comme Bouguerra Soltani, des chefs de zaouïa à l'instar du cheikh Khaled Bentounès, chef de la tariqa alawiya, et des icônes du monde artistique comme El Hadj Mohamed El Ghafour. Le défilé des personnalités s'est poursuivi jusqu'à 16h30. Une ambulance ramenait alors la dépouille de la défunte. La rituelle prière du mort s'est déroulée au stade faisant face au cimetière de Ben Aknoun. Sitôt achevé l'office de la prière d'Al Asr, l'imam prononça une oraison funèbre. «Cette noble femme qui était une illustre moudjahida a donné à ce pays de vaillants moudjahidine, des hommes valeureux qui ont su l'édifier et le servir», dira-t-il. Yazid Zerhouni, le ministre de l'Intérieur, sort du stade et le cortège funèbre suit, devancé par le frère du président, Saïd Bouteflika, en costume de deuil et lunettes de soleil noires. Le cercueil, drapé d'une étoffe blanche, se veut aussi sobre que la cérémonie. La rue qui sépare le stade du cimetière est aussitôt noire de monde. Des bras s'arrachent le cercueil et tout le monde cherche des yeux la personne du président. Abdelaziz Bouteflika, suivi de près par l'un de ses frères, qui est au cœur du cortège funéraire, le visage ému et néanmoins digne, la main accrochée au «naâch» d'un geste plein d'affection. Le chef de l'Etat tenait ainsi à faire corps avec la procession qui s'étalera sur les quelques centaines de mètres séparant le stade du portail du cimetière. Le cercueil s'engouffra à grand-peine dans le cimetière intime. Les hommes de la sécurité présidentielle s'empressent de refermer la grille d'entrée, laissant une foule de VIP massée sur la chaussée. Des badauds suivent d'un regard compatissant la cérémonie, parqués derrière des haies de sécurité installées par la police. Des éléments des forces d'élite de la police sont sur le qui-vive. Ils quadrillent nerveusement le périmètre, corroborant par là même l'image d'un enterrement sous haute sécurité. Rappelons qu'à quelques encablures d'ici, avait eu lieu le double attentat du 11 décembre 2007 qui avait ciblé le siège du Conseil constitutionnel ainsi que les bureaux de l'ONU à Alger. Le président de la République est resté une quarantaine de minutes dans l'enceinte du cimetière, à l'abri de la presse. 17h25 : Bouteflika prend définitivement congé de sa mère au milieu d'une grande bousculade. Petite consolation : sa mère s'est éteinte un 5 juillet, date anniversaire de la fête d'indépendance, avec le sentiment d'avoir honoré son destin.