L'Institution nationale des droits de l'homme (INDH), présidée par Me Farouk Ksentini, a perdu son accréditation auprès du Comité international de coordination des institutions nationales (CCI), selon un communiqué rendu public hier par l'organisation genevoise El Karama. Cette accréditation est la clé de voûte permettant aux organisations internationales d'agir à divers niveaux au sein de l'ONU et notamment de participer aux travaux du Conseil de sécurité, d'entrer en relation avec ses divers mécanismes ainsi que d'intervenir auprès des organes conventionnels et les procédures spéciales de l'ONU. Dans les milieux des organisations non gouvernementales, les couloirs faisaient écho, depuis plusieurs mois, de la rumeur selon laquelle la commission algérienne serait en passe de perdre son accréditation. Il est reproché à l'organisation algérienne sa « dépendance » à l'égard du pouvoir algérien, « l'absence de transparence dans la nomination de ses membres » ainsi que « le manque de coopération avec les organes de l'ONU et avec les ONG indépendantes de défense des droits de l'homme ». L'organisation de Farouk Ksentini aurait reçu plusieurs mises en garde, l'enjoignant de se mettre en conformité avec les normes internationales et de répondre aux « principes de Paris ». Le sous-comité d'accréditation du CCI, lui, a fait part au mois d'avril dernier de son intention de la déclasser et de la rétrograder au statut « B » pour non-conformité avec les « principes de Paris ». Dans les règles établies à Paris, figure notamment le fait que l'institution doit être fondée sur un texte constitutionnel ou légal et non par un acte du pouvoir exécutif comme c'est le cas en Algérie. La Commission algérienne devrait également, selon le règlement du CCI, rendre publics, par le biais des médias, les avis et les recommandations de l'organisation ainsi que de développer des rapports avec d'autres organisations non gouvernementales. La commission, dirigée par Farouk Ksentini, n'aurait, selon l'ONG El Karama, jamais participé à l'élaboration d'observations sur les droits de l'homme avec les comités en charge de la question au niveau international. Parmi les autres griefs retenus contre la commission algérienne des droits de l'homme, figure également le fait que les résultats de l'instrument « ad hoc » sur les disparitions n'aient toujours pas été rendus publics. « Toujours sous le régime de l'état d'urgence depuis 17 ans, la diplomatie algérienne subit aujourd'hui les contrecoups de son attitude (…) La rétrogradation de la CNCPPDH par le CCI constitue, à n'en pas douter, un revers particulièrement grave qui entache une fois de plus la crédibilité de l'Algérie en matière des droits de l'homme », a commenté l'organisation El Karama, spécialisée dans les questions des droits de l'homme au Maghreb et au Moyen-Orient. Cette organisation enfonce la Commission algérienne des droits de l'homme en déclarant : « Maître Ksentini refuse catégoriquement les visites de rapporteurs spéciaux sur la torture ou les exécutions extrajudiciaires sommaires et arbitraires. » Et de souligner : le Comité international de coordination des institutions nationales (CCI) prend « le risque de maintenir le statut de la CNCPPDH perçue par l'opinion publique algérienne en général et par la société civile en particulier comme une institution purement étatique plus préoccupée à faire accréditer les thèses officielles qu'à représenter les intérêts des Algériens en matière des droits humains ». Nos tentatives de joindre le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'homme (Cncppdh), Me Farouk Ksentini, sont restées vaines. Il est à rappeler, cependant, qu'une nouvelle loi devrait être bientôt mise en œuvre pour changer le mode de fonctionnement de la Commission des droits de l'homme. Le nouveau texte de loi prévoit une plus large autonomie de la Commission. Son président serait ainsi élu et non pas désigné par décret présidentiel. Une fois que le projet de loi adopté par l'APN, la commission des droits de l'homme devrait être dissoute pour laisser place à la nouvelle organisation. Mais cela reste encore « opaque » aux yeux des organisations internationales.