Une fille sur sept est accro à la cigarette au lycée. Elles sont 14% sur les 12% de lycéens à fumer... et ont bien du mal à s'arrêter. C'est ce que révèle une enquête effectuée à Oran par une équipe de pneumo-phtisiologues au CHU, selon le docteur Snouber, lors de la journée d'étude sur la santé et la pollution organisée dimanche dernier par le CRASC. Si elles sont de plus en plus, au lycée, à avoir recours aux caches, ce n'est sans doute pas pour éviter du regard la mention « Fumer tue », mais plutôt pour ne pas attirer l'attention des parents. Wahiba, 16 ans, confie avoir fumé sa première cigarette à 14 ans et demi et avoir commencé à fumer régulièrement depuis qu'elle a fêté ses 16 ans. Les lycées semblent de plus en plus gagnés par le fléau dans un pays où la consommation de tabac a triplé en vingt ans et où un fumeur sur deux a moins de 27 ans. Avec un marché local fort, demandeur de 1,7 milliards de paquets par an, qui dépasse de loin l'offre de la SNTA qui ne produit, disent les professionnels, que 900 millions de paquets par an, il y a de quoi inspirer les auteurs de cette enquête à effectuer un tel travail sur les adolescents et le tabac. Les résultats de cette étude montrent que les projections de la mortalité due au tabac sont à craindre. « L'urgence est de lancer des campagnes de communication, d'éducation et de sensibilisation qui s'adressent au jeunes », souhaitent les médecins. « La cigarette a des conséquences néfastes sur la santé, mais également sur la beauté des ados. Le tabagisme provoque une perturbation des cycles hormonaux, une baisse de la fertilité et une ménopause avancée. Le tabagisme accroît les risques cardiovasculaires et, à terme, d'infarctus. Il ternit la peau, la jaunit, l'assèche et la vieillit ; les cheveux sont plus secs, cassants ; l'haleine désagréable, les dents jaunissent et se déchaussent plus facilement ; les gencives sont fragilisées », explique un médecin. Ce professionnel s'efforce d'éviter totalement l'écueil de la « leçon de morale » pour mieux toucher une tranche d'âge souvent rétive au discours préventif classique. Enquête révélatrice Cette enquête montre globalement une tendance à la hausse de la prévalence tabagique chez les jeunes depuis les années 1990. Une tendance qui tend à augmenter chez les 14-18 ans, hausse qui concerne davantage les filles. Et ce médecin de souligner « la nécessité de former les médecins au sevrage tabagique et de sensibiliser les fumeurs. » Trente mille cas de cancers, dont une grande part est due au tabac, y sont diagnostiqués chaque année, soit une augmentation de 50 % du nombre de cas entre 1986 et 2004. Sur un an, près de vingt mille personnes meurent du cancer. Ce qui amène les médecins à dire tout haut que des dizaines de milliers de cancers pourraient être évités chaque année grâce à des campagnes efficaces d'information et de prévention. L'enquête révèle encore que « près de la moitié des fumeurs souhaitent l'arrêt du tabac, que la majorité des médecins ne prescrivent pas de produits nicotiniques parce qu'ils ne sont pas au courant de la disponibilité de ces substituts sur le marché, et qu'ils n'ont pas de formation concernant l'accompagnement et le sevrage tabagique et la prescription des substituts nicotiniques. » Une remarque de taille : les produits de sevrage ne font pas encore l'objet d'une politique nationale en Algérie. L'accès aux produits de substitution « est difficile, car ils sont considérés comme trop chers », fait encore remarquer notre pneumo-phtisiologue qui plaide pour « une révision des prix pour rendre ces produits plus accessibles. » Et ce médecin de conclure : « Les campagnes pour obtenir les changements de comportement s'essoufflent vite si on ne répond pas aussi à la demande des patients. Avant de convaincre ceux qui résistent, il faut répondre à ceux qui demandent. »