C'est un événement ou presque ! Le directeur de l'éducation, Ahmed Guellil, vient d'être muté à Oran. Ce qui peut, a priori, paraître un fait anodin dans la mesure où ce changement à la tête de l'académie de Constantine entre dans le cadre du jeu estival des chaises musicales propre à l'administration, il n'en demeure pas moins qu'en procédant de la sorte, le département de l'éducation nationale vient de provoquer une lézarde dans le carré de ceux qui sont communément appelés les « indéboulonnables » ou encore les « Benbouzid » de la base. Le désormais ex-directeur de l'éducation de Constantine en faisait justement partie. Il était en poste dans cette ville depuis… neuf ans, ce qui constitue un record dans le secteur. Neuf années au cours desquelles il a eu largement le temps de constituer un noyau de fidèles collaborateurs et, inévitablement, de liguer contre lui ceux qui s'inscrivent en porte-à-faux de sa politique. C'est le cas du Cnapest local, qui a entretenu un long bras de fer avec le numéro un de la direction de l'éducation de Constantine ; bras de fer ayant conduit la justice à intervenir notamment suite à un sit-in observé sur le parvis de cette institution. Neuf ans qui ont été également marqués par l'obtention de bons résultats scolaires mais qui viennent d'être ponctués par une décevante 17e place au palmarès des candidats éligibles au palier supérieur. En fait, si la méthode Guellil a séduit certains, elle a incontestablement déçu d'autres et il est patent de souligner que la prorogation de sa mission de Guellil à la tête de la direction de l'éducation de Constantine ne l'a pas vraiment servi, car en dépit de toute sa volonté de bien faire, il ne pouvait ramer contre l'usure du temps. On pourrait, d'ailleurs, en dire autant de Abdelhamid Djakoune, recteur de l'université Mentouri, qui trône à la tête du campus central et ses annexes depuis…12 ans ! Toute une vie pour ce professeur en biologie qui avait accédé, fin 1997, au bureau du 18e étage de la tour administrative en remplacement de son prédécesseur, un autre biologiste élu, à l'époque, député sur une liste RND. Depuis, Djakoune a « survécu » aux gouvernements Ouyahia II, Benflis, Belkhadem et Ouyahia III. Un record de longévité que partage un autre « indéboulonnable », le recteur de l'université des sciences islamiques, le professeur Boukhelkhal. Egalement président de la fondation Ben Badis, le Pr Boukhelkhal, en poste depuis 1997, est, quant à lui, une figure familière pour le président de la République, qui a pris l'habitude de le rencontrer à l'occasion des festivités annuelles du 16 avril, commémorant la disparition du cheikh Abdelhamid Ben Badis. Même les pompiers de Constantine ont leur « indéboulonnable » en la personne de M. Debbeche, qui gère la direction de la Protection civile depuis dix ans déjà. Et bien que décrié par une partie des pompiers, qui a recouru à des mouvements de protestation exigeant son départ, le directeur est toujours en poste. A ce titre, s'il est généralement établi que le mandat d'un commis de l'Etat dans une wilaya ne saurait excéder cinq ans, l'on s'autorise, dès lors, à s'interroger sur les motivations exactes ayant conduit à cette longévité dont bénéficient certains responsables. Quels critères ont été retenus pour expliquer l'élasticité du mandat de ces « indéboulonnables » ? S'agit-il de compétence ? D'une nécessité de service ? Ou plutôt d'une omission ? Cela étant, la rotation calculée des cadres de l'Etat est une vertu qui a ce double avantage de leur permettre de disposer de suffisamment de temps pour appliquer leur programme et en même temps de leur éviter d'être gagnés par la lassitude et de subir la pression de leur entourage. Quelle marge de manœuvre aurait, en effet, un responsable qui côtoie les mêmes bureaux et le même personnel pendant dix ans ? Pourrait-il vraiment prendre des mesures disciplinaires à l'encontre d'un subordonné fautif qui, au fil de longues années, est devenu un ami ?