Une « opération de charme » du gouvernement, « beaucoup de bruit pour rien » ou une « heureuse idée ». Telles sont les réactions de la communauté algérienne établie à l'étranger, à l'issue de l'ouverture officielle de la première université d'été qui leur est entièrement dédiée. Parmi les 450 « expatriés » conviés à ce symposium, d'éminents scientifiques, chercheurs, professeurs, ainsi que des élus locaux de différentes villes (françaises ou autres), d'illustres anonymes, des étudiants ou membres d'associations activant entre l'Algérie et leur pays d'accueil. Sceptiques ou dubitatifs, ils sont tout de même venus nombreux « afin d'assister à cette première édition, pour voir de quoi il retourne exactement ». La cérémonie d'ouverture, qui a vu la présence de pas moins de sept ministres venus vanter les mérites de la mère patrie, a vite fait de se transformer en « opération de séduction ». Qui a pu plaire à certains participants. « C'est une initiative des plus louables », affirme le très médiatique Ghaleb Bencheikh, physicien, président de la Conférence mondiale des religions pour la paix et présentateur d'une émission religieuse sur une chaîne publique française. Cependant, d'autres doutent qu'une telle université d'été aboutisse à de quelconques résultats ou mesures concrètes. « J'appréhende qu'au final, les participants palabreront beaucoup plus de préoccupations primaires et prosaïques, et ce, sans qu'aucune suite ne soit donnée ou que les réels problèmes ne soient abordés », prédit, pour sa part, le fils de feu le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Cheikh Abbès. Certains « immigrés » vont jusqu'à remettre en doute les motivations d'une telle initiative. « Durant les allocutions, nous avons eu l'impression que c'était une sorte de marchandage, voire de chantage implicite. Voilà ce que nous avons fait pour vous, maintenant, voilà ce que, vous, vous devez de faire pour nous », ironise un professeur installé en France. Le retour, et après ? Car fiers de la réussite et de l'intégration de ces « dignes ambassadeurs de l'Algérie », les dirigeants algériens tiennent toutefois à rappeler que ces ressortissants ont des devoirs envers leur mère patrie qui doit, elle aussi, profiter de cette prospérité acquise sous d'autres cieux. Les ministres qui se sont succédé à la tribune ont, tour à tour, établi un bilan « promotionnel » des plus positifs de leurs secteurs respectifs, invitant la diaspora à investir dans tel ou tel domaine, à une transmission de savoir-faire et, pourquoi pas, à rentrer au pays pour le faire bénéficier de leurs compétences. Pourtant, aussi adulée et courtisée qu'elle soit lorsqu'elle est de l'autre côté de la Méditerranée, le traitement auquel a droit cette diaspora, une fois réinstallée en Algérie, change du tout au tout. Un éminent professeur qui a requis l'anonymat, aujourd'hui directeur d'un centre national de pharmacovigilance, en a fait les frais. Ce docteur, auparavant installé en Suisse et aux Etats-Unis, était considéré par ses compatriotes comme une sommité et une référence durant son « exil ». Invité à se réinstaller en Algérie, il affirme avoir perdu toute considération de la part des autorités depuis. « Aucun accompagnement n'est offert à ceux que l'on persuade de rentrer. Nous étions compétents là-bas, l'on nous consultait et l'on prenait en compte nos avis. Mais sitôt rentrés, nous perdons tout notre prestige et notre savoir », dit tristement le scientifique, membre du comité d'experts de l'Organisation mondiale de la santé. Et des cas similaires sont courants, selon Ghaleb Bencheikh, qui explique : « Il serait d'ailleurs plus judicieux d'exposer, durant les workshops, cette désaffection rendue encore plus pénible par les conditions et modes de vie difficiles auxquels se heurtent fréquemment ces personnes. »