Le principal groupe armé du sud pétrolifère du Nigeria, le Mend, a annoncé hier avoir libéré 6 otages étrangers capturés début juillet ; un geste qui s'inscrit, selon lui, dans la trêve qu'il a décrétée récemment. « L'ensemble des 6 otages parmi lesquels 3 Russes, deux Philippins et un Indien ont été remis en même temps mardi soir à des agents de leurs employeurs », a indiqué le Mend dans un courriel. Le groupe armé avait kidnappé le 4 juillet 6 des 19 membres d'équipage du chimiquier Sichem Peace, dans le delta du Niger (sud du Nigeria). Il a précisé mardi soir qu' « aucune rançon n'a été versée ». De leur côté, Moscou et Manille ont chacun annoncé hier la libération de 2 ressortissants capturés sur le tanker. Les 2 ex-otages philippins se trouvent désormais à Lagos et ont été en contact avec leurs familles, a précisé le ministère philippin des Affaires étrangères. Un doute persistait hier sur la nationalité d'un des marins. Le Mend a, depuis leur enlèvement, fait état de 3 Russes tandis que Moscou parlait de 2 Russes et un Ukrainien. Ces libérations, a indiqué le Mend mardi soir, sont « le fruit de l'actuel cessez-le-feu et nous espérons que le gouvernement fédéral va commencer à nous rendre la réciproque en retirant la JTF (Joint Task Force, force mixte police-armée) de la commune de Gbaramatu (dans l'Etat du Delta) et en autorisant les personnes déplacées à retourner chez elles », poursuit le groupe armé. A la suite d'une offre d'amnistie du président nigérian, Umaru Yar'Adua, aux militants qui déposeront les armes, et après de longues semaines d'affrontements avec l'armée et d'attaques répétées contre des infrastructures pétrolières dans le delta, le Mend a décrété le 15 juillet une trêve de deux mois. Offre d'amnistie du gouvernement Il a exigé comme préalable à toute discussion le retrait des troupes fédérales d'une partie du delta du Niger. Mais le nouveau ministre de la Défense, Godwin Abbe, avait répliqué que le Mend n'avait pas à poser de conditions : « Le gouvernement prendra une décision concernant ses troupes quand la situation le permettra et que la loi et l'ordre seront durablement rétablis. » Le Mend affirme mener une « guerre du pétrole » contre les multinationales et les autorités fédérales. Depuis son apparition en 2006, il a multiplié sabotages et attaques d'infrastructures pétrolières appartenant à des majors comme Shell ou Chevron. Deux jours avant sa trêve, le Mend avait mené un raid spectaculaire contre un terminal pétrolier à Lagos, faisant plusieurs morts, sa première opération depuis trois ans hors du delta du Niger. Mardi soir, le groupe a par ailleurs menacé d'attaquer à nouveau des gazoducs et installations pétrolières endommagés lors de ses attaques s'ils étaient réparés pendant la trêve. Le Mend affirme agir au nom des populations locales misérables et attend des autorités qu'elles s'attaquent aux problèmes de fond de la région du delta : pauvreté, sous-développement, pollution. Le groupe insiste sur l'instauration d'un véritable « fédéralisme fiscal » et veut une augmentation de la part des revenus pétroliers et gaziers qui revient aux Etats du delta, grâce auxquels le Nigeria tire environ 90% de ses devises. Conséquence de la violence récurrente depuis trois ans dans le delta, la production de brut du pays se situe actuellement entre 1,2 et 1,5 million de barils par jour (mbj), selon plusieurs sources industrielles et officielle, contre 2,6 mbj en 2006.