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3 siècles de donatisme en berbérie
Publié dans El Watan le 30 - 07 - 2009


« J'écris pour me parcourir » Henri Michaux
Jadis, à l'école coloniale, le maître ne cessait de réitérer que nos ancêtres étaient les Gaulois. Malgré notre répétition en chœur, les murs de la classe restaient muets, car rien n'était gaulois dans notre physique et nos haillons.
La Gaule n'était pas la Berbérie numide africaine, couloir des civilisations Aussi, et dans la contradiction, les vitraux de l'église coloniale de mon village natal alarboraient la silhouette de St Augustin. Cet antique Algérien de Thagaste, père de l'église Romaine, a démystifié l'école coloniale de Jules Ferry et « l'ancêtre gaulois ». J'ai pris la décision de regarder derrière moi à travers la lecture juste de l'histoire de ma nation. Une fierté incommensurable a envahi la profondeur de mon âme. Là, j'ai décidé d'écrire pour me parcourir, découvrir encore plus le lointain de la région qui m'a enfanté et dont l'amour coule quotidiennement dans mes veines qui sécheront un jour dans sa terre que j'ai tant sentie et mordue. Charles André Julien me tend l'histoire de l'Afrique du Nord, des origines à la conquête arabe. Tout doucement, j'arrive au chapitre intitulé : « La conquête et l'occupation vandales » et je lis « ... Les fouilles opérées à Ala Miliaria (Benian) .... permettent d'évoquer les rencontres sanglantes entre hérétiques et orthodoxes dans la Maurétanie occidentale où le donatisme restait puissant. Elles mirent au jour les caveaux de plusieurs dignitaires de la secte, notamment celui de la religieuse Robba qui, pour avoir succombé, en 434, sous les coups des ‘‘traditeurs'', mérita la palme du martyre et l'érection d'une basilique. » L'invasion des Vandales m'a permis de percevoir un nom que de nombreux historiens, souvent par sentiment à l'égard de l'église de Rome, qualifient d'« hérétique » ou quelquefois dans « l'obédience colonialiste », n'osent pas citer. Un petit nom, frêle peut-être comme le corps pur et dur de cette dame qui a marqué de son empreinte le Sud-Est de la Maurétanie césarienne. Ni arme, ni armée, à pied ou sur un équidé, elle a sillonné certainement les plaines d'El M'cid et de Ghriss pour affirmer le donatisme au niveau de la masse prolétaire agricole et isoler les colons berbéro romains.
En un laps de temps (429-434), elle a ressuscité le mouvement donatiste farouchement persécuté par St Augustin. Une révolte sociale qui lui coûta la vie. Elle, Robba, adepte de l'évêque Donat de Baghaï des Nemmemchas, père du donatisme, mouvement nationaliste qui a déstabilisé l'église de Rome jusqu'à l'arrivée des Byzantins. A ce sujet, François Decret m'authentifie : « de tous les mouvements qui ont marqué l'aventure du christianisme en Berbérie, le Donatisme aura été le plus ‘‘africain'', le seul qui soit né sur cette terre où il s'épanouit plus de trois siècles durant. » Impulsion à caractère politique qui a permis l'émergence de l'expression anticolonialiste par les historiens engagés tels que Courtois et Mesnage. Ce dernier m'ouvre la parenthèse et affirme : « Les chefs donatistes n'étaient en fait que des révoltés à l'égard de l'autorité romaine. Quant aux indigènes, c'est toujours des vaincus frémissant sous le joug. Or, on proteste comme on peut contre le joug qui opprime : ne point parler la langue du maître, c'est déjà se séparer de lui par quelque chose d'essentiel, mais prier autrement que lui est beaucoup plus encore, car cela constitue une révolte morale qui satisfait bien mieux les sentiments de nationalité ». Une telle assertion me réconforte et témoigne que Robba, la religieuse donatiste, était une résistante berbère ayant gagné de la sympathie chez les circoncellions, synonymes du prolétariat indigène des plaines d'el M'cid et de Ghriss. Cette frange de berbères attachée à ses traditions, à ses coutumes et à sa langue restait fidèle à elle-même et jalouse de son indépendance.
Serge Lancel et Paul Matteï, professeurs, chercheurs et spécialistes de l'histoire du Christianisme en Afrique, m'étalent leur ouvrage intitulé Pax et Concordia, chrétiens des premiers siècles en Algérie, mettant en exergue la « sagesse » de notre compatriote et ancêtre st Augustin, persécuteur du mouvement donatiste. Une véritable réplique de la « Pax Romana » que notre humble historien Mahfoud Kaddache qualifie « d'euphémisme cachant mal la réalité, celle des insurrections permanentes du pays profond resté indépendant ; celle des révoltes et des jacqueries dans le territoire occupé. En pays berbère, l'histoire de la domination romaine est celle « de cinq siècles de guerres acharnées pour la liberté et l'indépendance ». Dans le même ordre d'analyse, je consulte Dominique Arnaud à travers sa publication « Histoire du christianisme en Afrique dans la collection Mémoire d'Eglise, qui me garantit : « au niveau social et politique, l'église donatiste ou l'église des saints devient très vite le lieu de ralliement de tous les champions de l'indépendance, les adversaires du pouvoir établi, les insaisissables Berbères, les farouches Numides, les campagnards mécontents ... les privilèges accordés par l'empereur à l'église d'Afrique du Nord et les persécutions des donatistes ne font que confirmer ‘‘Ies saints'' de la justesse de leur cause. »
Plus j'avance dans ma lecture, plus je me rassure de l'esprit anti-colonialiste qui animait la Maurétanie césarienne, tant au niveau du Berbère culturellement romanisé non catholicisé, entre autres les chefs donatistes, qu'au niveau des Berbères prolétaires, indigènes, spirituellement et culturellement indépendants et qu'on appelle communément les circoncellions . Ces derniers prirent eux-mêmes la décision de se rapprocher des donatistes. Les circoncellions virent dans la dissidence religieuse donatiste la religion des pauvres et, de ce fait, offrirent aux donatistes persécutés un appui inespéré et traitèrent les évêques catholiques, comme ils avaient traités les grands propriétaires fonciers berbéro-romains. Le donatisme a été pour eux l'expression du désir d'une indépendance politique. On peut dire que la coalition (donatistes et circoncellions) constituait au IVe siècle une masse prolétaire à vocation agricole, et non des bandits sans foi ni loi tels que décrit par st Augustin. M. Kaddache conforte notre point de vue par « Ce fut une véritable tentative de révolution sociale tendant à la libération des opprimés, esclaves ou main-d'œuvre de condition libre au chômage ; il s'agissait bien d'un phénomène économique, d'une réaction d'un prolétariat agricole réduit à la misère. »
Le donatisme est un effet qui va bien au-delà d'une simple crise religieuse. Il est lié à l'instabilité économique des classes rurales et pauvres et au refus ancestral de la population berbère d'être dominée par la culture romaine, étrangère. Le donatisme rejette à la fois le joug de l'unité impériale et celui de l'unité catholique. Le donatisme, qui résista fortement à la présence romaine en Maurétanie césarienne, a su galvaniser le prolétariat agricole et récupérer les circoncellions pour élargir son mouvement. L'église de Rome, très affaiblie et divisée, se redressa spontanément sous l'ère de Bélizaire, c'est-à-dire la période Byzantine, et s'estompa vers la fin du VIlle siècle avec l'avènement de l'Islam. Le donatisme a su galvaniser les masses prolétaires en Maurétanie césarienne et à ce sujet W.H.C. Frend écrit justement : « Donat défend une série de valeurs que Cyprien et Tertullien avaient défendues. Il représente le courant principal de développement de l'église nord-africaine. De plus, il attire à son église un mouvement social révolutionnaire ...
Honorus le donatiste, évêque d'Aqua Sirense (Bouhanifia) et frère de Robba, me remonte sur la présence de cette religieuse dans notre périmètre, immortalise le djebel Robba et, un peu plus loin dans la plaine limitrophe de Ghriss, la basilique de Robba à Benian (Ala Miliaria). Notre modeste recherche nous a permis, en plus du djebel Robba et la basilique de Robba, de mettre en valeur un site archéologique au douar Souabria (fisef), sur le flan sud-ouest de la forêt d'El Guetarnia. Ce qui implique aisément que ma région natale est antique et fortement donatiste. Les historiens de l'église de Rome ont qualifié dans leurs écrits les donatistes « d'hérétiques » et de « schismatiques ». Non ! Les Berbères numides avaient leur propre église africaine, à connotation orientale. Encore plus, la Bible a été traduite en latin en Numidie par deux autochtones, à savoir Tertullien et st Cyprien. De la toile tissée en Numidie, Rome a confectionné une soutane que les donatistes ont refusé de porter.
A la fin du VIIe siècle, l'église donatiste s'est estompée au fil des ans, permettant à la descendance de Robba et sans contrainte aucune d'embrasser l'Islam. La majorité des Berbères indigènes adeptes du donatisme, trop longtemps persécutés par les catholiques, leur lieu de culte a été épargné et respecté par les conquérants musulmans. Demeurant primitive, la pratique religieuse donatiste se lénifia pour disparaître devant la commodité de la religion musulmane. Cette dernière intégra les noms berbères d'origine chrétienne dans le lexique arabo-musulman. Le prénom Robba demeure éternel dans la région de sfisef.


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