« S'il n'y a pas un changement rapide de la position américaine, le prochain clash transatlantique sera l'Iran », estime François Heisbourg, directeur de la Fondation pour la recherche stratégique. Alors que les Européens sont engagés dans des négociations difficiles avec l'Iran, les Américains posent comme préalable, un changement de régime à Téhéran. « Le régime des mollahs est impopulaire en Iran, la souveraineté nucléaire, elle, est populaire. L'Iran est une véritable nation, les Iraniens n'aiment pas les mollahs, mais ce sont leurs mollahs », a souligné François Heisbourg, lors d'une rencontre avec la presse, intervenant au lendemain de la visite de Condoleezza Rice, secrétaire d'Etat américain à Paris et à Bruxelles. Il ajoute : « Je ne crois pas au recours à la force, aujourd'hui, des Américains contre l'Iran. Tant que les Américains sont en Irak, leur marge de manœuvre est étroite. » François Heisbourg développe la thèse, selon laquelle l'Occident a cédé la place à des Occidents, une évolution devenue évidente avec la fin de la guerre des Balkans et le 11 septembre. « Aujourd'hui, il y a un partenariat circonstanciel et non une alliance naturelle. » La nouvelle réalité, c'est que l'on assiste à des « coalitions à géométrie variable selon tel ou tel problème ». Sur certains grands sujets tels que le nucléaire iranien, l'énergie, l'environnement, la Chine, Américains et Européens sont en désaccord. Dans La fin de l'Occident ? L'Amérique, l'Europe et le Moyen-Orient (éditions Odile Jacob), François Heisbourg ouvre un champ d'analyse : « Le militantisme démocratique des néoconservateurs américains ne favorise-t-il pas les pires ennemis de la démocratie ? La toute puissance des armes américaines dans les guerres d'Afghanistan et d'Irak ne souligne-t-elle pas surtout les limites tant de la puissance militaire que des Etats-Unis ? Les terroristes d'Al Qaîda n'ont-ils pas créé les conditions d'une crise qui amènera le Moyen-Orient à aborder de front une modernisation politique, économique et sociale qui n'a que trop tardé ? Alors que l'Occident se prépare divisé face aux turbulences croissantes du système international, comment sortir enfin des schémas hérités de la guerre froide ? Fin de l'Occident ou âge des paradoxes ? L'époque des Occidents multiples est ouverte. » François Heisbourg plaide, selon une note de l'éditeur, pour une « politique européenne vigoureuse », face aux « défis et menaces du monde contemporain, si possible dans le cadre d'une relation euro-américaine renouvelée ».