Encouragée par l'expérience de la collecte de l'emballage carton jeté par les commerçants, jugée plutôt réussie, la commune de Béjaïa initie un projet plus global. Au titre bien ambitieux. «Quartier propre: tri sélectif». L'APC de Béjaïa veut ainsi se mettre au diapason avec l'esprit du Progdem, programme national pour la gestion intégrée des déchets municipaux, lancé par le ministère de l'aménagement du territoire, de l'environnement et du tourisme (MATET). Un programme qui, particulièrement pour le plan quinquennal 2010-2014, met l'accent sur le tri sélectif. D'aucuns feront la pertinente remarque que la problématique du ramassage des ordures le plus basique pose encore d'énormes difficultés à la commune et de là, à faire monter de plusieurs crans le mode de collecte, à savoir parvenir à séparer verre, plastique, fer, déchets organiques,… cela constitue à leurs yeux une gageure à la limite de l'insolite. M. Allaoua Mouhoubi, vice président à l'APC et responsable de la commission hygiène, refuse de verser dans un tel fatalisme. Il «reconnaît» les insuffisances qui caractérisent encore la collecte des ordures telle que conduite actuellement. Il explique cependant que ces déficiences ne sauraient justifier le renvoi à «plus tard», du mode de collecte sélective. Dans les pays du Nord, on réfléchit déjà à un tri plus poussé: usage de 15 bacs de déchets valorisables. L'autre raison est l'imminente entrée en service du centre d'enfouissement technique (CET) de Sidi Bouderhem, appelé à recevoir les déchets ménagers. D'où le préalable du tri est posé. Pour M. Mouhoubi, un tel impératif ne doit pas attendre l'amélioration de la collecte dans son mode actuel mais qu'il doit aller de pair avec celle-ci. Pour l'immédiat, il s'agit de mener une campagne de sensibilisation du citoyen incitant aux bons réflexes. Le dévolu de la Commune est jeté sur un quartier pilote, les 120 logements CNEP faisant face au lycée El Hammadia. Les critères avancés sont en premier la «sollicitation» par les riverains, ce qui est perçu comme une adhésion au projet. Le même traitement sélectif concernera aussi des quartiers de la haute ville. Le projet en question est complètement doté par le MATET. Sensibilisation L'instigation vient de l'association écologique Ardh qui a su motiver un tel projet auprès du comité de sélection composé des APC et de la direction de l'environnement de la wilaya et qui a pris option le mois passé. Le canevas proposé devrait recevoir sa validation par le ministère. Le secteur délimité comprend des rues situées sur un même itinéraire : Bab el Louz, rue Fatima, Aissat Idir, Place du 1er Novembre, Si el Houas. Les autres rues seront au fur et à mesure intégrées. L'opération de qualification ne saurait toutefois cacher les problèmes majeurs de la collecte des ordures. A commencer par l'absence d'une déchèterie censée recevoir tout ce qui est gravats, ferraille, mobilier usagé, bois et broussailles,… La commission «hygiène» de la commune a inscrit dans ses priorités une telle nécessité mais les problèmes de terrain et de financements constitueraient déjà un frein. On reparle également de l'impérieuse mise en place des centres de transfert qui auront comme impact de réduire la durée des déplacements pour le déchargement des camions pleins, et ainsi d'accroître le nombre de rotations effectuées. D'aucuns se demandent comment le CET, dont la réalisation est appelée à être d'ici peu achevée, serait-il fonctionnel, en l'absence d'une voie d'accès à partir de la RN 12. A moins d'une surexploitation de la sinueuse route de Boukhiama. La problématique de la gestion des ordures reste posée en dehors d'un grand plan incluant la revalorisation de la budgétisation et des organigrammes des services de nettoiement, l'adéquation des équipements, l'optimisation et la conjugaison des méthodes intégrant une responsabilisation de tous les acteurs gérant et produisant du déchet. Au niveau de la budgétisation, celle-ci pourrait puiser un tant soit peu de la récupération si on venait à réussir le tri projeté. Si l'on considère que l'Algérie perd chaque année 3.5 milliards de da dans les déchets valorisables « sacrifiés » dans les décharges. La ville de Béjaïa produit 140 tonnes d'ordures ménagères par jour dont en moyenne 30% sont valorisables : du plastique, du verre et de l'emballage. Ce qui est en soi un grand manque à gagner. Une convention a été signée avec un opérateur privé. Il ramassera les déchets en carton et les recyclera. D'autres pourront se manifester pour racheter les autres types de récupérations. «Mais, le citoyen triera-t-il ses déchets chez lui?» s'interroge Mouhoubi.