Sur instruction de la ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi, le directeur de la Bibliothèque nationale vient de refuser l'octroi de numéros ISBN et de dépôt légal pour le dernier roman de Mohamed Benchicou, Le mensonge de Dieu, qui devait paraître chez un éditeur algérois. Ce dernier avait introduit sa demande le 19 janvier dernier. A l'heure où la parole se libère partout dans le Maghreb et dans le monde arabe, le régime algérien vient de légaliser la censure en transformant une formalité administrative en «autorisation de paraître». L'Algérie devient le seul pays dans le monde à utiliser la délivrance du numéro d'ISBN, simple enregistrement dévolu à la Bibliothèque nationale, pour immatriculer les ouvrages afin d'en faciliter la gestion par les professionnels, en «permission d'éditer». Pire : Mme la ministre de la Culture se substitue à la justice de son pays dont elle bafoue les propres lois. La censure d'une œuvre de création intellectuelle relève des prérogatives exclusives de l'autorité judiciaire et non d'un ministre. La Constitution algérienne proclame, dans son article 38 : «La liberté de création intellectuelle (…) est garantie au citoyen. (…) La mise sous séquestre de toute publication, enregistrement ou tout autre moyen de communication et d'information ne pourra se faire qu'en vertu d'un mandat judiciaire». L'auteur a saisi toutes les instances nationales (Syndicat des éditeurs du livre, SNJ) et internationales (Unesco, Organisation mondiale des écrivains, presse internationale) à propos de cette nouvelle censure d'un autre temps décidée à la veille de la célébration de la Journée internationale de la liberté d'expression, par un régime qui se pique de vouloir des «réformes profondes». Le mensonge de Dieu, roman historique, va sur les traces du peuple algérien de 1870 à nos jours à travers les destins croisés d'une famille de combattants indigènes, insoumis et séducteurs. Il sort en librairie jeudi 5 mai, en France et au Canada (Editions Michalon).