Il est encore de tradition, dans de nombreux villages de Kabylie, que les parents offrent à leur enfant, à l'occasion de son premier jeûne, un œuf qu'il aura à déguster, le moment de la rupture du jeûne venu, sur la poutre maîtresse, assalass, de la maison familiale. Pour mériter cette récompense « précieuse » (l'œuf), le jeûneur précoce (n'ayant pas atteint l'âge de puberté) se doit de ne pas faillir à son engagement en honorant la promesse de jeûner qu'il a faite à ses parents. Généralement, le défi lancé finit toujours par être tenu tant il s'agit pour son jeune auteur de prouver aux adultes que l'endurance de la faim et de la soif n'est pas leur apanage exclusif et n'a rien à voir avec l'âge, tel qu'il est admis conventionnellement, à tort. En se soumettant précocement et volontairement à cette épreuve de privation, l'enfant entend exprimer ainsi un besoin d'affirmation et de considération. C'est aussi une façon de dire à ses parents que sa place est parmi eux, à la table du f'tour d'où il est tenu écarté pour n'être convié qu'une fois les adultes rassasiés, comme c'est toujours d'usage en certains endroits. Après avoir enduré son baptême de la faim, l'enfant jeûneur, à l'appel du muezzin, monte sur le toit ou sur la terrasse pour y accomplir le rite de l'œuf, sous l'œil bienveillant des parents, avant de rejoindre la meïda du f'tour, en ayant, cette fois, bien mérité son « ticket ». S'il s'agit d'une fille, la cérémonie de rupture du jeûne se déroule sur le linteau de la maison paternelle, où elle doit monter après s'être lavé les pieds. Une symbolique signifiant que la perdrix finira, dès que ses ailes le permettront, par s'envoler vers le nid conjugal.