Lancé hier en soirée, au Centre des Conventions, le cinquième Festival d'Oran du film arabe (FOFA) commence ce matin avec la projection du documentaire de Abdelhafid Bensalah, Boustan Tlemcen (Le jardin de Tlemcen) à la salle Maghreb. Les organisateurs du FOFA ont décidé de consacrer une partie de la manifestation à la projection de documentaires produits à la faveur de «Tlemcen, capitale de la culture islamique», une manière de célébrer autrement le plus grand événement culturel de l'année. Au programme figurent donc Hadja Lalla Maghnia de Mostefa Husseini, Sidi Ahmed Benzekri Tlemçani de Brahim Zakaria Kaddour, Cheikh Abdelkrim El Maghili de Larbi Lekhal, Dar El Hadith de Saïd Oulmi, Sidi Boumediène Chouaïb El Ghouth de Yahia Mouzahem, Holm ennoussour (le rêve des aigles) de Mohamed Hazourli. «Nous avons voulu donner l'occasion au public de voir les documentaires produits pour cette manifestation. L'année prochaine, il y aura une section consacrée aux documentaires arabes avec compétition pour primer les meilleurs», a expliqué Nabila Rezaïg, responsable de la programmation du festival, lors d'un point de presse, animé hier au théâtre régional Abdelkader Alloula, conjointement avec Rabéa Moussaoui, commissaire du festival, Mohamed Bensalah, président d'honneur du festival, et Bouziane Benachour, responsable de la communication. Dans la section «Un ticket pour le cinéma arabe», plusieurs films seront projetés hors compétition. Il s'agit, entre autres, de Chroniques des années de braise de Mohamed Lakhdar Hamina, Mascarades de Lyes Salem, El mour oua roumane de la palestinienne Najwa Al Najar, El Berak du marocain Mohammed Mouftakir et Ain Chems de l'égyptien Ibrahim Al Battout. Pour la compétition officielle, 12 longs métrages et 22 courts métrages ont été retenus. Une petite première Les meilleurs films décrocheront el wahr al dhabi (le lion d'Oran). «Wahran, le nom en arabe de la capitale de l'Ouest, signifie deux lions. C'est la raison pour laquelle le commissariat a décidé de changer le nom du trophée. L'ancienne dénomination, l'Ahaggar d'or, ne cadrait pas réellement avec le lieu où se déroule l'événement», a expliqué Nabila Rezaïg. Les longs métrages en compétition seront projetés à la salle Es-Saada tous les jours à 15h et 18h et une seconde fois le lendemain à la cinémathèque d'Oran à 15h et 17h. Andalousie mounamour (Andalousie, mon amour) du jeune Marocain Mohamed Nadif sera le premier film projeté (aujourd'hui à 15h). «C'est presque une sortie mondiale pour ce long métrage. Il n'a été projeté qu'une seule fois au dernier festival de Marrakech au Maroc. Il n'a pas encore été vu dans les autres pays arabes. La plupart des films en compétition cette année sont sortis en 2011. Nous veillons à ce que les films sélectionnés soient récents», a relevé Nabila Rezaïg. Andalousie mounamour est le premier long métrage de Mohamed Nadif connu surtout pour être un comédien et un metteur en scène au théâtre. C'est le résultat de plus de trois ans de travail notamment avec le jeune scénariste marocain Omar Saghi. Kedach thabni (combien tu m'aimes) de l'Algérienne Fatm Zohra Zamoum sera le second film projeté. Un drame qui revient sur l'univers de l'enfance écartelée entre amour et séparations. L'Algérie est également représentée par le dernier film de Merzak Allouache, Normal. Marlon Brando Demain samedi, le dernier film du Jordanien Mohamed El Hoshki, Modon al transit (les villes du transit) et Al moughani (le chanteur) de l'Irakien Kassem Hawal seront présentés au public. Kassem Hawal, 71 ans, est l'un des plus grands cinéastes irakiens. Il raconte dans ce film l'histoire d'un dictateur, qui pour célébrer son anniversaire, fait appel à un chanteur. Celui-ci arrive tardivement à la fête… Dimanche, les amateurs du septième art découvriront un autre film salué par la critique, Dima Brando (Always Brando) du Tunisien Ridha Béhi, le premier long métrage produit en 2011. Le titre du film est inspiré du nom du comédien américain Marlon Brando qui devait interpréter un rôle. Le décès de l'artiste a empêché Rédha Béhi, un cinéaste courageux, peu aimé par le régime déchu de Zine Al Abidine Ben Ali, de réaliser son rêve. Dimachq maa hobi (Damas avec mon amour) du Syrien Mohamed Abdelaziz est une fiction attendue par le public du Fofa compte tenu de la situation politique en Syrie. Le débat qui suivra la projection sera peut être plus porteur d'idées nouvelles que le film puisque cette production a été faite à l'automne 2010 avant le début du printemps arabe. Damas avec mon amour évoque le retour, l'amour inachevé et la découverte de soi. Une fiction plus philosophique que politique. Kaf Al Qamar (la paume de la lune) de l'Egyptien Khaled Youcef est, lui, plus prononcé sur le plan de la revendication politique. Il revient d'une certaine manière sur la Révolution qui a mis fin au règne familial de Hosni Moubarak. Le cinéaste, qui a souffert de la censure de l'ancien régime avec l'interdiction de son film Al Moushir oua rais (le maréchal et le président), l'a lui-même déclaré. Cependant, le film n'aborde pas directement l'évolution des événements en Egypte depuis janvier 2011. Vivre ensemble Asmaa de Amr Salama est l'autre film retenu dans la sélection officielle du festival d'Oran. Asmaa (Hind Sabri) restitue le drame d'une femme égyptienne atteinte du sida qui fait son coming out à la télévision. Avec courage, elle exige ses droits de l'Etat mais aussi de la société. Asmaa a obtenu le prix du meilleur réalisateur et du meilleur comédien, Madjed Al Kadwani, au dernier festival d'Abu Dhabi. Madjid, justement, est le titre du nouveau long métrage du Marocain Nassim Al Abassi dans lequel il raconte l'histoire d'un orphelin (Brahim Al Bakali) devenu cireur de chaussures à Mohammadia. La cinéaste libanaise Nadine Labaki sera absente mais sa comédie Hala Ala wine ? (Et maintenant où on va ?) sera en compétition. Ce film plaît beaucoup au public arabe tant la thématique qu'il aborde est d'actualité, le dialogue des religions, la guerre, le vivre ensemble… Nous y reviendrons. En lice également, la fiction de la Palestinienne Susan Youssef Habibi Rasak Kharban (Mon amour ta tête est vide). Chaque jour à 11h, à la cinémathèque d'Oran, abritera la projection des courts métrages. L'Algérie sera représentée par Djinn de Yasmine Chouikh, Dar Al Ajaza de Yahia Mouzahem, Demain, Alger de Amine Sidi Boumediène et Des pieds sur terre de Amine Hatou. Seront également présentés aux cinéphiles, Winek (Où es-tu) du Saoudien Abdelaziz Nadjim, Amouaj Al Zaman (les vagues du temps) du Marocain Ali Benjeloun, Bip de l'Egyptien Haitham Saqr, Al madhala soudaa (le parapluie noir) de la Libanaise Hiba Medjahdi, Qaa el bir (le fond du puit) du Tunisien Benhassan Mohamed Moez, Bahia et Mahmoud du Jordanien Zid Abou Hamdane, Sahet harb (Terrain de guerre) du Koweitien Hassan Abdal, Hanin (nostalgie) du Palestinien Oussama Bouardi, Influenza flu du Syro-qatari Riadh Maqdassi et Massassa (sucette) de la Mauritanienne Salma Bent Cheikh. Fierté En parallèle de la compétition et des projections, deux ateliers seront organisés au théâtre régional Abdelkader Alloula sur la bande dessinée et sur la réalisation de films d'une minute. «Des ateliers destinés aux jeunes qui aiment le septième art et qui veulent découvrir et apprendre. Ils seront encadrés par des experts et des techniciens», a précisé Rabéa Moussaoui, commissaire du festival. Un forum sera organisé samedi 17 décembre au théâtre régional sur les institutions arabes impliquées dans la production des films. Dimanche, et au même endroit, une conférence sur la formation dans le domaine du cinéma sera présenté. L'échange d'expériences entre les pays y sera évoqué. Le journaliste Bouziane Benachour, responsable de la communication du festival, a indiqué que la comédienne égyptienne Hala Sedqi, désignée parmi les membres du jury de cette année, sera présente à Oran. Il a expliqué le retard de son arrivée par des procédures liées au visa et à la programmation des vols. Hala Sedqi a été attaquée par des jeunes sur facebook qui ont appelé à la boycotter sous prétexte qu'elle a eu des propos «déplacés» lors de la guerre stupide ayant opposé Algériens et Egyptiens après le match qualificatif à la coupe du monde 2010 à Oum Darman (Soudan). Bouziane Benachour a relevé que l'équipe du Fofa a travaillé dans l'urgence pour être au rendez-vous et a invité les journalistes à ne pas être avares en critiques. Rabéa Moussaoui a expliqué le retard dans la programmation des films par la situation qu'a connu le monde arabe cette année. Mohamed Bensalah, président d'honneur du Fofa, a ajouté pour sa part que les Oranais sont fiers d'abriter le festival du film arabe et qu'ils feront tout pour qu'il reste dans la capitale de l'ouest. «Le festival doit laisser des traces. Il faut que la ville ressente les effets de la manifestation. Des associations et des jeunes doivent se mêler à prolonger l'événement culturel», a-t-il plaidé.