Le ministre de l'Habitat, Noureddine Moussa, a rappelé mardi l'impact du nouveau dispositif relatif au crédit immobilier touchant les fonctionnaires et contenu dans la loi de finances complémentaire 2009. Un taux d'intérêt particulièrement avantageux, de l'ordre de 1%, a été décidé pour les prêts immobiliers contractés par les fonctionnaires désireux d'acquérir un logement. L'initiative n'a pas manqué de susciter un engouement aussi large que légitime dans les rangs des fonctionnaires à tous les échelons, mais surtout auprès des petits fonctionnaires et des cadres moyens qui n'ont pas pu, en raison de leurs bas salaires, s'offrir un toit. Mais pour tous ces commis de l'Etat, l'espoir n'aura été que de courte durée. La mesure est vite apparue sélective et restrictive. Ne pourront en bénéficier que les fonctionnaires et les agents de l'administration dont le salaire n'excède pas 12 000 DA. Sur quelles bases objectives a-t-on fixé ce seuil salarial, condition première d'accès à la nouvelle formule du crédit immobilier ? Pourquoi avoir écarté tous les autres fonctionnaires qui n'entrent pas dans cette grille de salaires mais qui sont pourtant loin, au regard de leurs fiches de paie, de faire partie de la caste des privilégiés de la Fonction publique, bénéficiant de logements de fonction cédés au dinar symbolique, de véhicules de service pour eux et leur famille, ainsi que d'autres avantages sociaux et professionnels se rattachant au poste ? Au regard de son caractère discriminatoire, d'abord au sein du corps des fonctionnaires ensuite de la société d'une manière générale, mais aussi de son manque de cohérence, la mesure apparaît d'ores et déjà comme nulle et de nul effet. Pourquoi privilégier un agent de l'Etat – le vocable de fonctionnaire qui renvoie, dans l'entendement général, à un statut social ne sied pas à nos agents de l'administration publique – par rapport à un autre dont la différence de salaire pourrait se résumer à du menu fretin ? Un agent qui touche un salaire supérieur à 12 000 DA de quelques centimes seulement est considéré, aux yeux du législateur qui a approuvé cette disposition, comme un Algérien qui a les moyens de se prendre en charge en se soumettant aux règles commerciales pratiquées par les banques pour les crédits immobiliers. Proprement aberrant ! Par ailleurs, en limitant le bénéfice de cette mesure aux seuls fonctionnaires, a-t-on songé aux frustrations et aux injustices sociales qu'une telle mesure susciterait dans la société auprès des employés, des cadres moyens des entreprises publiques du secteur productif mais aussi des travailleurs du secteur privé qui ont, eux aussi, des besoins sociaux à satisfaire, dont celui du logement et des droits pour bénéficier, au même titre que les fonctionnaires, des facilitations et de l'aide de l'Etat pour l'accès au logement. Autre question tout à fait primaire : un fonctionnaire percevant un salaire de 12 000 DA pourra-t-il subvenir aux besoins de sa famille, faire des économies au titre de l'apport personnel pour l'acquisition du logement et souscrire un prêt bancaire qu'il ne pourra jamais rembourser ? L'Exécutif est passé maître dans l'art des effets d'annonce et des décisions irréfléchies sur lesquelles on finit toujours par revenir après avoir produit des dégâts et des préjudices incommensurables à l'économie du pays et à la cohésion sociale.