Déjà très peu accessible au commun des citoyens, le crédit immobilier est loin de soulager l'Algérie de sa crise lancinante de logement. La loi de finances complémentaire 2009 (LFC-2009) a sonné le glas des crédits à la consommation. L'article 75 de cette loi stipule que “les banques ne sont autorisées à accorder des crédits aux particuliers que dans le cadre des crédits immobiliers”. Cette mesure est applicable à toutes les banques, qu'elles soient du secteur public ou privé. L'objectif est d'orienter les banques vers le crédit immobilier pour qu'elles pèsent de tout leur poids sur le marché du logement et freinent la spéculation qui sévit dans le secteur de l'habitat en formalisant les procédures de vente et d'achat que l'essor du crédit immobilier va contrecarrer. Il y aura ainsi une demande solvable qui va influer sur l'offre. Il y aura, par ailleurs, beaucoup plus de promoteurs immobiliers encouragés par le développement du crédit immobilier. Actuellement, il n'y a que 300 000 emprunteurs au titre du crédit immobilier alors qu'il existe un potentiel beaucoup plus important de demandeurs. Cette nouvelle orientation des banques constitue en soi une réponse à une forte attente des ménages en matière d'acquisition de biens immobiliers. L'accès au logement demeure un besoin important dans la société algérienne. Confirmant sa volonté d'aider les couches moyennes à acquérir des logements sans contraintes de prêt majeures et d'appuyer les constructeurs et promoteurs immobiliers, l'exécutif compte booster le crédit immobilier à travers la révision des conditions d'accès devant encourager les gens à contracter un crédit immobilier. Le gouvernement a ainsi décidé, dans le cadre de la loi de finances complémentaire 2009, de bonifier le taux d'intérêt des crédits attribués aux postulants pour des logements. Les taux d'intérêt appliqués par les banques lors de l'octroi des crédits immobiliers ne sont pas de nature à arranger les bourses moyennes, déjà faméliques. Variant entre 8,5% et 10% en hors taxes, le taux d'intérêt appliqué par les banques publiques ou étrangères installées en Algérie est jugé trop élevé. La particularité est que les taux d'intérêt applicables sont différents d'une banque à l'autre. Ceci sans compter les frais de dossier qui égalent 1% du montant du financement, inclus dans la première mensualité ainsi que les saisies de garanties et des biens hypothéqués. De même, le taux d'intérêt des crédits alloués dans le cadre de l'immobilier sera de l'ordre de 1%, et cela concerne toutes les banques publiques. Le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, M. Nourredine Moussa, a confirmé cette décision en donnant plus de détails. Selon lui, tous les fonctionnaires demandeurs d'un crédit immobilier sont concernés par cette nouvelle mesure, du moment que c'est la loi de finances complémentaire 2009 qui a introduit cette disposition. Le ministre confirme donc que le taux est bonifié par l'Etat et le bénéficiaire ne paye que 1% d'intérêt. Et comme c'est une disposition légale, toutes les banques publiques sont donc concernées par cette nouvelle mesure. La loi de finances complémentaire 2009 a, par ailleurs, introduit un dispositif permettant de conforter la solvabilité des ménages au crédit au logement. Cela va consister en la combinaison de l'aide frontale accordée actuellement et d'un taux d'intérêt bonifié. En fait, les pouvoirs publics pensent que cette mesure permettra un accès plus facile au logement. Un avis qui est loin d'être partagé par les différents acteurs du secteur. En effet, banquiers, architectes et promoteurs immobiliers sont unanimes à dire que le crédit immobilier ne facilitera pas l'accès au logement des Algériens. Des directeurs de banque publique ont indiqué récemment que les mesures d'encouragement, pour permettre aux citoyens d'acquérir un logement, ne seront pas efficaces, car il est impossible pour ces mêmes citoyens de rembourser leurs crédits, même s'ils sont sans intérêt. Invités récemment au forum du journal El Moudjahid, le directeur du CPA et le directeur de la BNA ainsi que le chargé de la communication de Baraka Bank ont affirmé unanimement que les Algériens ne disposaient pas de moyens financiers suffisants pour rétribuer les crédits attribués dans le cadre de l'acquisition de logement. Et cela même si l'Etat a décidé de couvrir une partie des frais financiers par un taux d'intérêt réduit. Le crédit immobilier ne peut couvrir que 40% au maximum du coût du logement. Dès lors, ni l'apport initial du demandeur de logement ni les assouplissements fiscaux, exonération de la TVA par exemple, ne pourront boucler le montage financier nécessaire à l'acquisition d'un logement. Le prix du mètre carré d'un logement équivaut dans la majorité des pays au salaire de base minimum, alors qu'en Algérie, il représente six fois plus. Les prix exorbitants de l'immobilier en Algérie ne pourront jamais être à la portée du simple citoyen désireux acquérir un logement. Au prix de 8 millions de centimes le mètre carré, cela relève de l'impossible. Pour qu'un Algérien puisse acquérir un logement, il lui faudrait 75 ans de travail, et ce sans toucher à son salaire, explique Abdelhamid Boudaoud, architecte urbaniste et président du Collège national des experts architectes (Cnea). Pour lui, le crédit immobilier, déjà très peu accessible au commun des citoyens, ne répondra en aucun cas à la demande en logements tant que le problème du foncier, les prix élevés des matériaux de construction et l'absence d'un plan d'urbanisme caractérisent encore le secteur de l'habitat dans notre pays.