David Boström est à l'honneur à Alger. Le reporter suédois, par qui a éclaté le scandale du trafic d'organes auquel se livrait l'armée israélienne sur des enfants palestiniens, a entamé hier une tournée qui le conduira dans plusieurs pays arabes et musulmans. Journaliste d'investigation, écrivain, photographe, spécialiste du conflit israélo-palestinien auquel il a consacré plus de 30 ans de sa carrière, David Boström était l'invité de la toute nouvelle Fédération nationale des journalistes algériens, un syndicat affilié à l'UGTA. Le 17 août dernier, Aftonblet, un tabloïd populaire suédois proche du parti social démocrate, a publié un article signé par le journaliste qui a fait état, pour la première fois, d'un trafic d'organes humains auquel s'adonnait Tsahal, l'armée israélienne. L'article osé et au vitriol intitulé « Les organes de nos fils pillés - Des Palestiniens accusent l'armée israélienne de voler des organes à ses victimes », fait vite sensation. Il ne manque pas de déclencher une vague d'indignation à travers le monde et sonne le glas des relations diplomatiques entre la Suède et Israël. Et pour cause ! Reprenant des témoignages de Palestiniens de Cisjordanie et de la bande de Ghaza, le journaliste suédois raconte comment l'armée israélienne, après avoir assassiné des Palestiniens, récupérait les corps, volait les organes internes puis remettait les dépouilles aux familles. Les organes en question étaient soit transplantés sur des patients israéliens, soit destinés à la vente, à travers un réseau de trafic international, notamment aux USA. Procédant par recoupements, Boström lie les révélations des familles des victimes palestiniennes au démantèlement d'un vaste cartel dans le New Jersey. Une quarantaine d'individus, des élus et des religieux liés au parti israélien Shas, ont été arrêtés, soupçonnés d'avoir participé à un blanchiment d'argent lié à une revente de reins en provenance d'Israël. Le réseau était dirigé par un rabbin orthodoxe de Brooklyn, Lévy Izhak Rosenbaum. Ce trafic, a souligné hier le journaliste lors de la brève conférence de presse animée au Centre international de presse d'Alger, existe déjà depuis les années soixante mais ne prendra de l'ampleur qu'après le déclenchement de l'Intifada. « Nous n'avons pas de chiffres exacts du nombre des victimes, mais nous les estimons à plus de 1000, et pas seulement parmi les populations musulmanes », a-t-il déclaré. Des preuves ? « Bien sûr qu'elles existent », a-t-il affirmé. Les révélations du journaliste – auquel la FNJA décernera aujourd'hui un prix spécial – ont été rejetées avec véhémence par les officiels israéliens, qui invoquent « des autopsies de routine » en guise d'argument de défense. Le journaliste est accusé de tous les maux, entre autres d'antisémitisme, et surtout de recycler le mythe ancien « des juifs tueurs d'enfants » dont le sang est récupéré en vue de fabriquer le pain azyme pour la fête de Pâques. Yigal Palmor, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, qualifiait l'article de raciste : « Ce papier est tellement ouvertement raciste et propice à déclencher des crimes racistes que nous pensons que les autorités doivent s'occuper de cette affaire. » Pour l'ambassade de Suède à Tel-Aviv, l'article est « choquant et exécrable ».