Les Etats-Unis viennent d'annoncer des changements majeurs dans leur déploiement en Europe, rompant en tout cas avec la vision de l'Administration précédente. D'aucuns disaient que le président Barack Obama n'allait pas concrétiser le projet dit de bouclier anti-missile et c'est ce qu'il vient de faire, sans évoquer en guise d'argument, l'hypothèse basse, celle de la crise économique. Il ne s'agit pas d'économies, parce que la raison avancée constitue à elle seule, en fait l'autre élément d'un changement majeur qui risque de surprendre jusqu'aux plus proches alliés des Etats-Unis sauf à croire qu'ils en ont été informés préalablement, ce qui semble improbable au regard de la teneur inchangée de certains discours. De quoi s'agit-il au juste ? Quelques mots ont suffi hier au porte-parole du Pentagone, le ministère américain de la Défense pour annoncer que les Etats-Unis ont décidé d'ajuster leur projet de bouclier antimissile en Europe après avoir revu en baisse la menace iranienne. « Le projet précédent reposait sur l'estimation selon laquelle l'Iran était déterminé à développer un programme de missiles à longue portée (ICBM) », mais « d'après les derniers renseignements, ils sont beaucoup plus concentrés sur le développement de capacités de courte et moyenne portées », a déclaré Geoff Morrell. Les changements annoncés hier par la Maison-Blanche n'ont « rien à voir avec la Russie », farouchement opposée au projet de défense antimissile américain en Europe, a-t-il ajouté. Selon un responsable de défense américain, le système américain « s'éloigne désormais du concept d'un gros bouclier antimissile, d'un gros radar » et va être « plus adaptable ». Deux éléments d'une même politique, celle de ce que les spécialistes appellent la sécurité des Etats-Unis, même si celle-là se fait en dehors de leurs frontières. Vis-à-vis de l'Iran, c'est un changement majeur alors que s'engagent des négociations tout compte fait vidées de leur substance. Même le ministre israélien de la Défense, Ehud Barak, rompant avec l'air ambiant dans les milieux israéliens vient d'affirmer que « l'Iran ne constitue pas une menace pour l'existence d'Israël ». Il y a donc comme une concordance dans les propos des uns et des autres. Effectivement, le Premier ministre tchèque, Jan Fischer, a déclaré que M. Obama l'avait appelé pour lui annoncer que Washington renonçait à son projet de bouclier antimissile en Europe. Des responsables américains s'attelaient hier à informer les pays de l'Otan de la décision prise par les Etats-Unis sur l'avenir du projet de bouclier antimissile en Pologne et en République tchèque. Une délégation américaine a rencontré hier des responsables polonais à Varsovie au sujet du bouclier. Une décision commentée d'amertume, sinon de la colère en Pologne où l'on considère que l'abandon du projet marquerait un échec de la politique de l'Administration de Barack Obama en Europe centrale. Quant à la Russie qui a même menacé de relancer son industrie de l'armement si le projet était maintenu, elle déclare avoir toutes les raisons de s'en féliciter, ajoutant que cela contribuera au développement des relations russo-américaines. Le président Obama avait ordonné de réexaminer le projet de bouclier antimissile de son prédécesseur George W. Bush, destiné selon Washington à contrer des menaces venant de pays comme l'Iran. Moscou le considère comme une atteinte à sa propre sécurité. En 2008, Varsovie et Washington étaient parvenus à un accord sur le déploiement d'ici à 2013 en Pologne de dix intercepteurs de missiles balistiques de longue portée, couplés avec un puissant radar en République tchèque. Concernant cette fois les motivations d'une telle décision et il s'agit du dossier nucléaire iranien, tout laisse croire que le climat ne sera plus le même, avec moins d'intensité, mettant fin aux discours belliqueux. Cela détend en tout cas le climat et le contexte dans lesquels aura lieu le 1er octobre prochain entre l'Iran et les grandes puissances. Un changement fondamental vient donc de se produire, même s'il n'était pas exclu depuis le début de cette année. Augure-t-il de nouveaux rapports, et de quel type ?