Moins cher, plus efficace. Le président américain Barack Obama a enterré jeudi le bouclier antimissile en Europe de l'Est de son prédécesseur George W. Bush, en annonçant l'installation d'un système de défense selon lui mieux adapté à la menace iranienne et moins irritant pour la Russie, farouchement opposée au projet précédent. Après avoir gardé le silence toute la journée, le président russe Dimitri Medvedev a évoqué dans la soirée une "décision responsable". "Nous apprécions cette décision responsable du président américain en vue de réaliser notre accord. Je suis prêt à poursuivre le dialogue", a-t-il déclaré à la télévision, rappelant que les deux hommes avaient discuté de la prolifération des missiles balistiques lors de leurs entretiens à Londres et Moscou cette année. "Notre nouvelle architecture de défense antimissile en Europe fournira une défense plus forte, plus intelligente et plus efficace aux forces américaines et aux alliés des Etats-Unis", a déclaré Barack Obama lors d'une allocution à la Maison Blanche. "Elle est plus complète que le programme précédent, elle déploie des capacités efficaces et moins coûteuses, et elle maintient et met à profit notre engagement à protéger le territoire américain". Lors d'une conférence de presse, le secrétaire à la Défense Robert Gates a pour sa part expliqué que le projet Bush avait été abandonné en raison d'une nouvelle interprétation des capacités de tir iraniennes. A la place des missiles intercepteurs prévus en Pologne et du système de radar en République tchèque, le programme de l'administration Obama sera basé sur des détecteurs et des missiles intercepteurs installés sur des navires ainsi qu'à terre. Et, alors que le projet précédent visait à faire face aux missiles intercontinentaux iraniens, le Pentagone estime aujourd'hui que les missiles à courte et moyenne portée de Téhéran sont la véritable menace. La première étape du nouveau système prévoit ainsi le déploiement de navires Aegis équipés d'intercepteurs et l'utilisation de nouveaux radars, le tout pour plus de mobilité. Deuxième volet: l'installation en Europe de l'Est d'ici 2015 depuis d'une nouvelle version de missiles sol-air actuellement en développement. On ne savait pas encore si la République tchèque et la Pologne seraient les seuls pays européens concernés, mais Robert Gates a indiqué les avoir prévenues qu'elles seraient impliquées. Barack Obama a, lui, téléphoné aux Premiers ministres tchèque Jan Fischer et polonais Donald Tusk pour les informer de sa décision, révélée dans un premier temps par Prague. Si le Pentagone a avancé l'argument technique pour enterrer le précédent projet, le programme annoncé jeudi semble également destiné à apaiser les relations avec la Russie -farouchement opposée au bouclier Bush- à l'heure où le soutien de Moscou est indispensable à Washington dans le dossier du nucléaire iranien. Depuis son arrivée à la Maison Blanche, Barack Obama a en effet multiplié les gestes envers son homologue russe, attendu aux Etats-Unis prochainement pour l'Assemblée générale des Nations unies et le sommet du G-20 à Pittsburgh. A force de longues tractations, George W. Bush avait obtenu l'adhésion de la République tchèque et de la Pologne à son projet. Au prix pour ces deux pays d'une forte opposition de sa population, et d'une dégradation de leurs relations avec la Russie, furieuse de voir des missiles américains si près de ses frontières. Sur ce dossier, Obama devait donc choisir entre risquer une rechute dans les nouvelles relations avec Moscou, ou décevoir les Tchèques et les Polonais, deux alliés membres de l'OTAN. Le secrétaire général de l'Alliance atlantique Anders Fogh Rasmussen a estimé que la décision annoncée jeudi était "une étape positive" et le nouveau projet incluant mieux les autres partenaires membres de l'OTAN. Konstantin Kosachev, président de la Commission des affaires étrangères de la chambre basse du Parlement russe, l'a également accueillie favorablement. Aux Etats-Unis, les républicains ont, en revanche, immédiatement fait part de leur opposition. "Abandonner notre projet de défense antimissile en Europe a de graves conséquences sur notre relations diplomatiques et affaiblit notre sécurité nationale", a déclaré le représentant de Virginie Eric Cantor. "Nos alliés, particulièrement la Pologne et la République tchèque, mérite mieux, et notre population mérite quelque chose de plus intelligent et de plus sûr". M.K.