Les représentants des six grandes puissances en charge du dossier nucléaire iranien et leur homologue de Téhéran ont décidé hier d'« intensifier le dialogue », à l'issue d'une journée-marathon de pourparlers à Genève. Les délégations, qui se retrouvaient pour la première fois depuis plus d'un an, se sont « mises d'accord pour intensifier le dialogue dans les prochaines semaines » et devraient se retrouver avant la fin du mois d'octobre, a expliqué le diplomate en chef de l'Union européenne, Javier Solana. Côté iranien, le ministre des Affaires étrangères, Manouchehr Mottaki, s'est félicité depuis New York de l'atmosphère « constructive » des conversations. A en croire M. Solana, plusieurs avancées ont été atteintes lors de ces conversations dans une villa cossue de la banlieue de Genève, dont le parc surplombant le lac Léman a accueilli les participants pour un déjeuner informel sous un beau soleil automnal. Donnant satisfaction à l'une des principales demandes des Six, l'Iran s'est engagé à donner accès au site d'enrichissement d'uranium de Qom (centre), dont l'existence n'a été révélée que la semaine dernière, d'ici « deux semaines », a indiqué le représentant français Jacques Audibert. Par ailleurs, aux termes d'un « accord de principe », « l'uranium faiblement enrichi en Iran sera exporté dans d'autres pays pour être totalement enrichi ». La Russie et la France ont annoncé au même moment être favorables à l'idée d'enrichir de l'uranium afin d'éviter que Téhéran ne le fasse. La journée des pourparlers de Genève a également été l'occasion d'une rencontre bilatérale entre les chefs des délégations américaine et iranienne, le sous-secrétaire d'Etat américain William Burns et Saïd Jalili. C'était la première rencontre en tête-à-tête à ce niveau depuis la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays, en 1980. Retrouvailles avec les américains « C'était une journée productive, mais la preuve n'est pas encore faite. Nous voulons des actions concrètes et des résultats », a commenté la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton. Le tour positif de la journée n'était pas gagné d'avance après la révélation de l'existence d'un site secret d'enrichissement d'uranium près de Qom, des tirs de missiles iraniens et de multiples déclarations contradictoires de Téhéran. Mercredi, alors que la tension était à son comble, M. Jalili avait expliqué ainsi à son départ pour Genève envisager la réunion de manière « positive », alors que le président Mahmoud Ahmadinejad affirmait que son pays sortirait « sans dommages » de la journée. Le Président s'était ensuite montré plus conciliant en proposant de céder de l'uranium faiblement enrichi en Iran à un pays tiers pour obtenir en contrepartie de l'uranium enrichi à 20% nécessaire pour un réacteur de recherche. Il est cependant douteux qu'une journée de conversations suffise à balayer les doutes des Six, qui soupçonnent le programme d'être à des fins militaires, ce dont l'Iran se défend catégoriquement. Les capitales occidentales, excédées par des années de discussions stériles, avaient même brandi la menace de nouvelles sanctions si Genève échouait et répété que l'option militaire demeurait sur la table. Confronté à une crise politique intérieure et à des besoins économiques grandissants, Téhéran, habitué à « gagner du temps » sans rien lâcher, semble donc s'être montré plus conciliant. Le négociateur iranien Saïd Jalili a cependant répété hier, aux représentants des grandes puissances, que Téhéran ne renoncerait jamais à ses « droits absolus » dans le cadre de son programme nucléaire, a rapporté l'agence iranienne Isna. Il a également répété qu'aucun pays « ne doit avoir d'arme nucléaire », la position traditionnelle iranienne.