Il a étonné tout le monde en apparaissant parmi les dix grands architectes retenus pour « repenser » Paris à l'horizon 2040. Llorsque Sarkozy annonçait le lancement du projet « Le Grand Paris, métropole du XXIe siècle de l'après-Kyoto », il plaçait son ambition au-delà de celle de ses prédécesseurs - notamment Mitterrand - qui s'étaient contentés d'ériger des monuments. Il ne s'agit pas moins d'imaginer le Paris de 2040 ! La sélection internationale a retenu dix cabinets dont celui d'un certain Djamel Klouche, parmi des ténors mondiaux : Jean Nouvel, Richard Rodgers, Roland Castro, Fin Geipel, Bernardo Secchi... Benjamin de ces « élus », cet Algérien de 42 ans, inconnu jusque-là du grand public, a réussi, en 25 ans de présence en France, à s'imposer comme une référence de l'architecture et de l'urbanisme. Né en 1966 à Tlemcen, il a emboîté la voie ouverte par son père, agrégé de sciences naturelles, diplômé de sciences politiques, professeur d'université… Djamel avait aussi dans sa nombreuse fratrie de beaux exemples de réussite scientifiques et quand il se rend à Paris, à l'âge de 18 ans, c'est pour y entamer des études brillantes. Il est diplômé en 1992 de l'Ecole d'architecture de Paris, puis, en 1994, de l'Ecole des hautes études en sciences sociales (DEA « Territoires urbains »), puis, en 1995, de l'Institut d'études politiques de Paris (DESS « aménagement et urbanisme ») tandis qu'il achève actuellement un doctorat sur les mêmes centres d'intérêt. Visiblement, ce garçon a tracé sa carrière, convaincu très tôt que l'architecture et l'urbanisme ne pouvaient s'exercer valablement sans une ouverture sur les sciences sociales et une vision culturelle et historique des espaces urbains. En 1996, avec Caroline Poulin et François Decoster, il fonde l'agence AUC. Son nom même est un programme : AUC pour « ab urbe condita », soit en latin, « depuis la fondation de la ville ». Une enseigne qui décrit bien sa passion des cités qu'il considère comme des organismes vivants, porteurs d'histoire, de valeurs, de fonctions, etc. Une totalité mouvante, riche de niveaux et d'aspects que l'on ne peut envisager qu'en repensant le métier des architectes et des urbanistes. Leurs méthodes de travail, affirme-t-il, « devront évoluer vers de positions qui combinent à la fois l'observation, la médiation et la production ». Il développe ainsi sa méthode du « faire-avec ». Faire avec le passé d'une ville, faire avec son patrimoine, faire avec sa « physiologie », faire aussi et surtout avec ses acteurs vivants : habitants, associations, institutions… L'originalité de ses préconisations, sa démarche rigoureuse, sa curiosité aussi, l'amènent vite au-devant de la scène professionnelle. Il devient notamment en 2002, lauréat des Albums de la jeune architecture, en 2005, lauréat du palmarès des Jeunes urbanistes avant de devenir, l'an dernier, lauréat de la consultation internationale « Le grand Pari de l'agglomération parisienne ». Cette distinction parmi dix grands cabinets, il la doit aussi au travail effectué par son agence dans des projets à forts challenge : réhabilitation de bâtis anciens, restructuration d'espaces, projets de renouvellement urbains, aménagements de quartiers, etc. A travers toute la France, à l'échelle européenne de plus en plus et, maintenant, au niveau international, il inscrit une manière de penser, d'organiser et de projeter qui forcent l'admiration et, en tout cas, convainc les décideurs et gagne l'adhésion des citoyens. Son engagement professionnel intense lui donne encore le temps d'enseigner à Versailles, de donner régulièrement des conférences, bref de diffuser ses idées et de susciter sans cesse l'échange. Il rêve qu'un jour, l'Algérie lui manifeste sa fierté, non pas par des hommages verbeux, mais par des projets concrets. Mais il faut croire qu'il en va des architectes comme des prophètes… En notre pays particulièrement.