Et les chiffres communiqués par le ministère de l'Intérieur concernant le nombre d'associations agréées est trompeur. «Sur les 96 000 associations agréées, on compte uniquement 1000 organisations à caractère national. Et sur ces 1000 associations, 120 seulement activent effectivement sur le terrain et ont une organisation. C'est très peu pour un pays comme l'Algérie», déclare Abderrahmane Arar, responsable du réseau Nada. Intervenant lors d'un séminaire sur le thème «Société civile et élections : perspectives et échange d'expériences», organisé hier à Alger, Abderrahmane Arar relève les lacunes du mouvement associatif qui freinent le développement d'une véritable société civile en Algérie. L'orateur évoque un chapelet de facteurs qui ont mené à la situation actuelle. En premier lieu, il y a le rôle des pouvoirs publics. «En Algérie, on n'a pas développé la société civile. Je pense que les pouvoirs publics, comme ils sont en train d'investir dans des projets du développement, doivent investir également dans le développement de la société civile. Cette dernière est un acteur essentiel qui peut participer à cette dynamique du développement. Donc, il faut promouvoir cette société civile sans s'ingérer dans ses affaires», explique-t-il. Abderrahmane Arar plaide, dans la foulée, pour un changement de rapports entre le pouvoir et les associations. «Il faut donner plus de moyens au mouvement associatif et lui accorder le statut de partenaire dans le dialogue avec le pouvoir. Il ne faut plus considérer les associations comme des ennemis», ajoute-t-il. «La nouvelle loi sera révisée dans deux ans» Le responsable du réseau Nada appelle les différents acteurs en Algérie à s'inspirer des expériences ayant déjà réussi dans le monde pour pouvoir bâtir une société civile algérienne, dont on ne s'en sert pas uniquement «pour remplir les salles lors des meetings des politiques». «Il ne faut pas que la société civile soit mise à l'écart. Il ne faut pas aussi qu'elle se contente de la figuration. Il faut considérer la société civile comme un partenaire et non pas comme un ennemi», insiste-t-il, appelant à un changement de vision par rapport au rôle de la société civile. Rappelant que la nouvelle loi sur les associations souffre de plusieurs lacunes, notamment dans ses dispositions relatives à la création des organisations nationales et étrangères, Abderrahmane Arar prévoit «une révision de ce texte dans deux ans». «Je pense qu'il faut faire sauter le verrou de la bureaucratie dans l'application de la loi. Il est inconcevable d'attendre une année pour avoir un agrément d'une association», dit-il. La situation du mouvement associatif local n'est pas, elle aussi, reluisante. Selon Mouloud Salhi, président de l'association Etoile culturelle d'Akbou (Béjaïa), malgré sa dynamique «le mouvement associatif local souffre de plusieurs insuffisances». «Il (ce mouvement) manque d'expertise et de professionnalisme. Les associations au niveau local ont également des difficultés de gestion et de communication», soutient-il. Mouloud Salhi estime encore que le rapport des associations avec le pouvoir local est «souvent conflictuel». «Les élus de la plupart de nos communes ne considèrent pas le mouvement associatif comme un partenaire sur lequel il faut s'appuyer dans la gestion des collectivités», déplore-t-il. Afin d'avoir des associations fortes, le président de l'Etoile culturelle d'Akbou appelle à la sensibilisation de jeunes. «Cela doit commencer à l'école», préconise-t-il. L'existence d'un tissu associatif riche, estime pour sa part, Mme Barrie Freeman, est un facteur important permettant la construction d'une société civile forte. «Mais les associations doivent avoir une gestion interne transparente et démocratique», conditionne-t-elle.