Comment intégrer la société civile dans la surveillance du processus électoral ? La problématique a fait l'objet d'un séminaire de deux jours qui se tient depuis hier à Alger sous le thème «Société civile et élections : perspectives et échange d'expériences». Un séminaire organisé conjointement par l'association Adwaa Rights pour la démocratie et les droits de l'Homme et l'organisation américaine pour la promotion de la démocratie dans le monde, National Democratic Insitut for foreign affairs (NDI). Le partenariat entre une coalition de représentants de la société civile algérienne de tout bord et la NDI a donné naissance à l'Observatoire de la société civile pour la surveillance des élections. Le membre fondateur dudit Observatoire et président de l'association Adwaa Rights, Noureddine Benbraham, a résumé, dans son intervention, les objectifs du séminaire. Outre la présentation du rapport final sur les élections législatives de mai 2012, la rencontre permettra en premier lieu de mettre en place un programme pour 2013 de monitoring et de mentoring à la faveur de cadres de la société civile algérienne en vue d'intégrer l'Observatoire des élections et de former à leur tour d'autres observateurs à l'échelle nationale. L'idée est d'intégrer la société civile en tant qu'observateur des élections dans la loi électorale. Le séminaire a également pour objectif d'apprendre de l'expérience de pays de la région en la matière. Ainsi, des membres de la société civile algérienne qui rentrent d'une mission en Jordanie, ont pu faire part des leçons tirées de l'expérience jordanienne. Des délégations jordanienne (Hayat Center), marocaine (Collectif associatif pour l'observation des élections) et libanaise (Association libanaise pour des élections démocratiques), étaient présentes. Le représentant de chaque délégation a fait un plaidoyer pour «une citoyenneté active».
Les associations : un puissant lobby Ahmed Dahmani, membre du Collectif associatif marocain pour l'observation des élections, a qualifié «de positif», le bilan du Collectif en 11 ans d'existence au Maroc. «Avec les réformes liées au Printemps démocratique engagé par le mouvement du 20 février, nous avons pu intégrer l'observation non partisane des élections dans la nouvelle constitution et avons obtenu une loi organique du Parlement et du Comité constitutionnel», a-t-il indiqué. «Notre expérience dans l'observation des élections depuis 2007 est, certes, modeste mais elle nous a permis de devenir un acteur incontournable du processus électoral et de la transition démocratique, à travers notre regard critique et surtout indépendant et autonome, qui garantit les droits des citoyens», a-t-il ajouté, soulignant que la société civile marocaine a réussi à gagner la confiance de tous les courants politiques et des acteurs étatiques, qui ne les considèrent plus comme faisant partie de l'opposition. M. Dahmani a insisté sur le rôle de la société civile. «Les associations sont un lobby puissant. En mettant en place un système de contrôle populaire indépendant, non partisan et non étatique, on pourra parler de réelle participation du citoyen dans le processus électoral et la transition démocratique», a-t-il affirmé. S'agissant du rôle de la société civile justement, Mouloud Salhi, membre de l'Observatoire et représentant de l'association Etoile d'Akbou, appellera, dans son intervention, les différentes associations à plus de présence et d'actions concrètes sur le terrain. Pour sa part, Abderrahmane Arar, du Réseau Nada, également membre de l'Observatoire, a jugé la vie associative «faible» en Algérie. Caractérisée par «l'absence de vision, de stratégie, de gouvernance et de gestion administrative et financière», elle doit être, selon lui, renforcée davantage notamment à travers une série de mesures, à savoir «le traçage, par la société civile, d'une feuille de route pour les vingt années à venir, la professionnalisation des cadres de la société civile, le renforcement de la dynamique collective, la création d'un centre de ressource pour la société civile, et enfin, la promotion du partenariat avec les différentes ONG ainsi que les pouvoirs publics». Pour une société civile forte et active Un point appuyé par Nafissa Lahrache, porte-parole de l'Observatoire. En tant que présidente de «Femmes en Communication», M. Lahrache a insisté sur l'importance de la communication avec les pouvoirs publics mais aussi avec les autres acteurs de la société civile tout en appelant cette dernière à recourir aux nouvelles technologies dans la communication et l'information. Malgré quelques critiques envers la société civile, les intervenants ont jugé son bilan, depuis le début des années 2000, plutôt positif. Positif était également le regard que portait Barrie Freeman, directrice de la NDI en Afrique du Nord, sur la vie associative algérienne, qui s'est réjouie des conditions favorables à son émergence en Algérie. «La vie associative est déjà très riche ici, ce qui peut constituer une base pour construire une société civile forte et active, d'autant que vous avez les conditions qui le permettent telles que la liberté de la presse et d'association», a-t-elle estimé. «Je prends l'exemple de l'Observatoire, il regroupe des membres de la société civile déjà présents en Algérie. Il est né en regroupant des capacités internes. Sur le plan politique, ces organisations doivent montrer qu'elles ont une gestion interne transparente et qu'elles sont capables de jouer leur rôle d'intermédiaire entre le citoyen et les pouvoirs publics», a-t-elle ajouté. M. Freeman précise que le rôle de la NDI est l'accompagnement des associations de la société civile déjà présentes dans le pays à travers des programmes de formations et de mentoring (formation des formateurs), ainsi qu'avec l'apport d'une aide technique, logistique et dans certains cas, financière aux associations comme ce fut la cas pour les pays de l'Europe de l'Est, a-t-elle précisé.