Tout au long de l'année qui s'écoule, le dossier de la promotion des exportations hors hydrocarbures et de la réduction des importations a fait débat, avec une série d'engagements rappelés à chaque sortie par le ministre du Commerce, Saïd Djellab. Les annonces se sont multipliées en effet à ce sujet et le gouvernement table d'ailleurs sur trois milliards d'exportations hors hydrocarbures cette année, en attendant la mise en œuvre de la stratégie nationale prévue dans ce cadre. Une stratégie ficelée, sans pour autant être encore effective. Et pourtant, initialement, elle était annoncée pour cette année. Mais, voilà qu'en cette fin d'année, l'on annonce cette feuille de route pour 2019. Encore du temps perdu pour un dossier aussi important, même si de petites initiatives d'exportations ont été menées, vers l'Afrique notamment. Au final, le plus gros du travail reste à faire pour réussir ce défi. A commencer par l'amélioration de la logistique, ciblée ces derniers mois par des mesures spécifiques. Ce n'est pourtant pas l'unique obstacle à l'essor des exportations. Complexité «Il existe également d'autres freins puissants, qui se situent aussi bien à l'échelle de l'entreprise qu'au niveau macroéconomique. En tout état de cause, le moment est venu d'aborder la question complexe des exportations hors hydrocarbures, car il s'agit d'un objectif stratégique qui doit interpeller toutes les institutions de l'Etat, mais aussi les concernées, en l'occurrence les entreprises», estime à ce sujet le spécialiste en commerce extérieur, Brahim Guendouzi. Pour sa part, Akli Moussouni, expert agricole, dira à ce sujet : «Le produit national s'est embourbé dans un cercle infernal.» En conséquence, un processus de production sans contrôle. «Les entreprises sont incitées à produire hors normes dans un marché jamais normalisé, pour un consommateur dont le pouvoir d'achat est affaibli, un produit national douteux en l'absence de traçabilité, incertain en l'absence de qualification et coûteux pour avoir été produit en quantité limitée au regard de la petitesse des exploitations. Ce produit dit ‘‘national'' est généralement le produit d'une filière d'importation de la presque totalité des intrants qui le composent», résumera M. Moussouni, mettant ainsi l'accent sur les principaux points de blocage des exportations. Conclusion : ce produit national poursuit notre expert, «s'est exclu de lui-même du standard du commerce international, l'OMC et l'Europe dans le cadre de l'Accord d'association». «C'est tout le produit national qui s'est embourbé dans un cercle infernal entretenu à travers des organisations politiciennes avec des dispositifs populistes qui ne s'inscrivent dans aucune logique économique connue». «Aucune évolution n'est envisageable à l'intérieur de cette configuration », avertit-il encore. Côté importations, la situation n'est pas meilleure. Avec des achats extérieurs qui totalisaient 41,371 milliards durant les 11 premiers mois de 2018, contre 58 milliards de dollars en 2014, la baisse n'est pas aussi importante que l'on le dit, moins de 17 milliards de dollars en cinq ans, surtout que le taux de couverture des importations par les exportations ne cesse de se réduire en raison de la chute des prix du pétrole. Il faut dire que les tensions induites par les déficits de la balance commerciale depuis 2015 ont certes conduit les pouvoirs publics à prendre des mesures contraignantes visant à contenir les importations, d'une part, mais les résultats restent faibles pour l'heure. Risques Même si cela «peut être considéré comme étant le signe de la recherche d'alternatives en vue d'atténuer la baisse de plus en plus affirmée du niveau des réserves de change vers un seuil limite, rendant inéluctable un ajustement sévère de l'économie nationale», explique encore Brahim Guendouzi, pour qui les revenus extérieurs risquent de stagner encore du fait «de la conjugaison de la tendance à la baisse des volumes de pétrole et de gaz exportés, de l'imprévisibilité des cours du marché pétrolier international et de la question de l'indexation du prix du gaz dans les contrats signés par l'Algérie avec ses clients européens». Aussi, il est utile de rappeler que les mesures protectionnistes non tarifaires, comme les licences d'importation, puis le régime des restrictions à l'importation portant sur près de neuf cents produits, n'ont pas eu jusque-là les effets escomptés sur la diminution recherchée de la facture des importations. «La nature des marchandises ciblées par ces mesures fait qu'en termes de valeur en douane, les économies en devises réalisée cette année restent encore insignifiantes par rapport au montant global des achats de l'extérieur», estime notre expert en commerce extérieur. Il donnera l'exemple de l'augmentation des importations des kits de voitures. «En voulant développer les activités de montage automobile, les importations de kits de voitures de différents modèles ont augmenté sensiblement. Comment cherche-t-on d'un côté à limiter les importations, alors qu'en même temps, le secteur automobile entraîne à la hausse le nombre de kits pour le montage ?», s'interroge-t-il.