Le délai de 5 ans prévu par la loi n°08-15 de 2008 portant sur la mise en conformité des constructions et leur achèvement a expiré le 20 juillet dernier. Passée cette date, les citoyens ne peuvent plus, aux termes de ce texte, déposer de dossier pour régulariser leurs constructions. La DUC continue, toutefois, d'étudier les dossiers transmis par les services techniques des APC, chargés d'accueillir les demandeurs. Les commissions de daïra, qui reçoivent en dernier ressort les demandes, après avis technique de la DUC, poursuivront aussi leur travail. Aucun bilan exhaustif de l'opération, lancée du temps de l'ancien ministre de l'Habitat, Noureddine Moussa, n'a été rendu public au lendemain de la fin de l'échéance. Quelques chiffres (voir l'entretien) sont néanmoins disponibles : 460 000 dossiers ont été déposés dont plus de 320 000 ont été traités par les services de l'urbanisme, nous assure-t-on. Ces chiffres restent en deçà d'une réalité difficile à cerner. Les cas traités par la loi 08-15 sont très importants et leur prise en charge s'avère ardue : constructions non achevées pourvues d'un permis de construire, constructions pourvues d'un permis de construire et non conformes aux prescriptions du permis, constructions achevées dont le propriétaire n'a pas obtenu de permis de construire, constructions inachevées dont le propriétaire n'a pas obtenu de permis de construire… Aucune mesure coercitive (art.1 de la loi) n'a été mise en place : la promulgation du texte n'a pas permis de mettre un terme au phénomène des constructions inachevées ou qui ne disposent pas de permis de construire. Des lotissements continuent de sortir de terre depuis la promulgation de ce texte, sans faire réagir les services de l'urbanisme ou des APC, chargés de démolir toute habitation illicite.
Loi inapplicable ? Les citoyens qui ont déposé leur dossier de mise en conformité ont attendu longtemps une réponse. «La loi ne facilite pas la tâche aux rares citoyens qui ont décidé de s'y conformer. En plus de payer rubis sur l'ongle l'architecte, il faut attendre plusieurs mois pour recevoir une réponse de la commission de daïra. Les recours prennent encore beaucoup de temps. Les pouvoirs publics doivent faciliter la tâche aux honnêtes gens», estime un résident d'Alger-Ouest, obligé d'attendre une année pour recevoir son quitus. La loi 08-15, qui a dû être explicitée par des textes d'application plusieurs mois après sa promulgation, a buté sur plusieurs écueils : absence de communication, lourdeurs administratives dues principalement au manque de technicité et de moyens au niveau des services des APC et des directions de l'urbanisme (DUC), complexité de certains cas prévus dans l'article 16 de ladite loi (terrains inconstructibles, zones protégées, terres agricoles, nuisance à l'édification d'ouvrages d'intérêt public, etc.). La loi, inapplicable, a nécessité l'adoption de quelques textes réglementaires pour en expliciter le contenu et relever la cadence des régularisations : décret exécutif 09/154 fixant les procédures de mise en œuvre de la déclaration de mise en conformité des constructions, décret exécutif 09/155 fixant la composition et les modalités de fonctionnement des commissions de daïra et de recours chargées de se prononcer sur la mise en conformité des constructions, instruction interministérielle n°04 du 6 septembre 2012. Les autorités prendront-elles la décision de démolir les constructions qui ne sont plus aux normes ? Amenderont-elles la loi 08-15 ? Sauront-elles prendre une décision pour prendre en charge les «cas spécifiques» prévus dans l'article 16 ? Il semblerait que le ministère de l'Habitat ait décidé de proroger la loi 08-15 et même son amendement pour la rendre plus facile à appliquer. Les autorités locales avaient même suggéré de prendre en charge les cas prévus par l'article 16, surtout pour les citoyens qui ont construit sur des terres à forte potentialité agricole ou même dans le périmètre de sécurité des aéroports. Des lotissements ont été construits, avant la promulgation de la loi, dans le périmètre immédiat de l'aéroport Houari Boumediène et prendre la décision d'expulser les occupants provoquerait leur colère. «Il est impossible de démolir toutes ces constructions. Le coût social d'une telle opération sera très important. Les autorités doivent prendre une décision politique franche. La régularisation de ces logements s'impose. Les services de l'urbanisme ont déjà régularisé des habitations dans des zones non urbanisables (NU) tels que Trois Caves à El Harrach, en réaménageant toute la zone, ils peuvent aussi régulariser les habitations de Dar El Beïda, Kourifa ou autres dont les occupants n'ont pas où aller», suggère une source à la wilaya d'Alger.