Les 136 employés de l'opérateur de téléphonie fixe, la société Consortium algérien de télécommunication (CAT), connue sous le nom commercial Lacom, attendent toujours une solution à la question du volet social suite à la « dissolution anticipée » de leur entreprise. Dissolution prononcée lors de l'assemblée générale extraordinaire tenue au Caire, en Egypte, le 24 juin dernier, par les deux actionnaires de l'entreprise, en l'occurrence Telecom Egypt et Orascom Telecom Holding. C'est ce qu'indiquent les représentants de ces employés rencontrés en la circonstance. Ils qualifient cette résolution d'« illégale » et de « dissolution déguisée. » En effet, dans le procès-verbal de la réunion du 24 juin sanctionnant cette option, dont ils détiennent des copies, il est mentionné que la décision de « dissolution anticipée » de Lacom et « sa mise en liquidation » est prise conformément aux articles 715 bis 18 et 766 du code du commerce. Néanmoins, l'article 767 de ce code recommande d'évoquer « la cause de la liquidation ». Ce qui n'est pas indiqué dans ce PV. Dans le même document, « les droits des employés ne sont pas évoqués ». De par cette démarche, « ce sont les deux actionnaires qui nomment un liquidateur, lequel n'a ainsi de compte à rendre qu'à ces derniers. C'est ce qu'ils ont fait d'ailleurs ». Les mêmes interlocuteurs ont rencontré, à leurs dires, le liquidateur et proposé le règlement de la question du volet social. « En plus du versement des trois mois de salaires impayés, nous avons demandé au liquidateur des indemnités à la hauteur des préjudices subis, à savoir la perte d'emploi, les primes non perçues depuis quatre ans, nos carrières qui n'ont pas évolué, les cotisations sociales non honorées, les œuvres sociales dont nous n'avons jamais bénéficié. De son côté, il nous fait deux propositions. La première consiste à nous indemniser à hauteur d'un mois sur chaque année d'exercice conformément à l'article 72 de la loi 90-11 du 21 avril 1990. » Cette disposition indique qu'« en cas de licenciement individuel ou collectif au sein de l'organisme employeur, le travailleur recruté pour une durée indéterminée a droit à une indemnité de licenciement. Cette indemnité est due à raison d'un mois par année de travail au sein de l'organisme employeur dans la limite de quinze mois après épuisement du droit au congé annuel rémunéré ». Or, l'article 72 de cette loi est abrogé par le décret législatif 94-09 du 26 mai 1994 portant sur la préservation de l'emploi et la protection des salariés susceptibles de perdre de manière involontaire leur emploi. En plus, « même si cette loi est encore en vigueur, elle concerne les cas de licenciements. Nous ne sommes pas dans cette situation ». La seconde solution se traduit par un règlement du conflit, conformément au décret législatif 94-09 du 26 mai 1994. « Nous avons aussi rejeté cette option car le dispositif en question touche les travailleurs menacés de perdre leur emploi pour des raisons économiques. Ce qui est loin d'être la situation où nous nous trouvons. » Le premier article dudit décret indique : « Le présent décret législatif a pour objet d'organiser la préservation de l'emploi et de fixer le dispositif de protection des salariés susceptibles de perdre de façon involontaire leur emploi pour raison économique. » De surcroît, réitèrent les mêmes interlocuteurs, « la raison de la dissolution de notre société n'est pas signalée comme le recommande la loi. Aussi, comment envoyer les employés à la caisse chômage alors que nos employeurs ne nous ont pas déclarés à l'assurance chômage ni honoré les charges sociales depuis août 2008 ? ». La société CAT a été créée en 2005. En février 2006, elle lance ses réseaux techniques et commerciaux dans cinq wilayas, à savoir Alger, Blida, Oran, Constantine et Annaba. Après six mois d'activité, selon les mêmes interlocuteurs, les deux actionnaires annoncent « le gel de l'activité » sans donner les raisons d'une telle décision. « Fin 2006 et début 2007, la société résilie les contrats à durée déterminée (CDD), licencie des employés à l'essai sous prétexte d'essai non concluant. Des employés ont aussi fini par démissionner. Sur les 580 employés que comptait initialement la société, il n'en reste que 136. » Suivent « les fausses promesses » pour le restant de l'effectif. Elles consistent « à nous assurer que des acquéreurs sont intéressés quant à la relance de Lacom. Tantôt ils citent Egypt Telecom, tantôt le promoteur jordanien VTel pour nous convaincre de ne pas partir alors que nous avons trouvé de l'emploi dans d'autres entreprises. Nous avons ainsi accepté d'y rester ». Mais le 9 novembre 2008, « lors d'une assemblée générale extraordinaire tenue au Caire, les actionnaires annoncent la liquidation de Lacom. Le procès-verbal officialisant cette décision n'est pas établi ». « En janvier dernier, des représentants du promoteur jordanien VTel sont venus pour reprendre la société. A notre surprise, on nous annonce en mars que ce prétendant s'est retiré. » Contacté à ce sujet, le liquidateur de Lacom estime être « tenu par les obligations de réserve pour la conduite professionnelle de ma mission afin de la mener à bon terme y compris dans l'intérêt des travailleurs ».