Les lenteurs qui accompagnent les différentes opérations devant précéder ou accompagner la réalisation et l'attribution des logements à Souk Ahras ont donné naissance à une forte spéculation dans le domaine de l'immobilier, qui risque d'engloutir tous les efforts consentis dans le domaine dans un tourbillon fait d'argent blanchi, de matériaux de construction et de ciment détourné des projets d'utilité publique et d'argent recyclé à partir du contribuable. Le marché est juteux et nul ne peut cerner ses véritables promoteurs sans y laisser des plumes, encore moins ceux qui détiennent les moyens de le réguler par l'abondance des projets et la célérité dans l'attribution. Au moment où 19 000 demandes de logements croupissent dans les sous-sols de l'APC de Souk Ahras, les houchs (maisons à patio) du quartier Tagtagueya sont raflés à coups de milliards par des inconnus pour être ensuite revendus six à sept fois le prix initial. Kamel, un citoyen habitant ce quartier, expliquera ainsi le phénomène : « Toutes les anciennes bâtisses, qui sont généralement dans l'indivision, ont été acquises par des spéculateurs qui quadruplent le prix de l'appartement après la rénovation de l'immeuble, d'où cette vertigineuse hausse des prix qu'a connue l'immobilier à Souk Ahras. Ce qui était cédé à 1 million de dinars, il y a une année, vaut aujourd'hui 6 millions de dinars. » A Djenane Teffah et Dallas I et II, des dizaines de lots de terrain et de constructions semi-finies sont proposées à la vente à des prix exorbitants. « Ce sont surtout des privilégiés du système des années 1990 et autres relais et nouveaux nantis qui avaient quitté la capitale alors que le pays tanguait sous la menace terroriste pour s'installer momentanément à Souk Ahras. Ceux qui y habitaient ou qui en avaient l'intention ont regagné Alger », nous confie le président d'un comité de quartier. Le patrimoine immobilier de l'OPGI n'est pas exempt de spéculation : vente illégale de clés, sous-location, transformation et exploitation d'appartements attribués dans le cadre du logement socio-locatif (LSL) à des fins lucratives. Le dossier des bidonvilles, subi avec fatalisme à Souk Ahras, complique davantage la situation. Géré à distance par un cartel d'affairistes, de connivence avec des responsables de troisième zone, le problème persiste et fait des émules parmi les plus réticents des demandeurs de logements. Les logements de fonction sont, dans certains secteurs, cédés, par le biais de quelques acrobaties administratives, à d'ex-responsables, sinon vendus carrément ou loués en attendant la « régularisation des papiers », sans qu'aucune partie responsable ne s'en offusque. Pour toutes ces raisons, mais aussi à cause de la faillite de la formule LSP, du diktat des entrepreneurs, de l'amateurisme des agences immobilières, des attributions de complaisance de logements et du pouvoir illimité de la mafia locale, le prix de location des appartements a pris des ailes, alors que des équipes de prête-noms s'emparent des rares bâtisses restantes des quartiers populaires, moyennant des milliards aux origines préjudiciables.