Les communications sur Kateb Yacine ont déferlé à un rythme rapide et effréné, et ce, au prorata de l'extraordinaire profusion et diversité des thèmes engendrés par une œuvre fascinante et plurielle, livrés par des spécialistes et hommes de lettres d'ici et d'ailleurs, comme la Tunisie, le Liban, la Pologne, la France, la Corée du Sud, la Côte d'Ivoire… Nous aurons remarqué quelques absences, — mais non défections —, comme celle de Charles Bonn, qui est, nous a-t-on fait savoir, souffrant, ou celle encore du poète et rédacteur en chef du journal égyptien Al Ahram, Ahmed Shahawy, dont on nous communiquera «l'extrême désolation de ne pas avoir réussi à obtenir un visa pour l'Algérie». Pourtant, sa présence sur cette terre de tous les combats pour la dignité n'aurait-elle pas acquis toute sa symbolique, eu égard à son engagement sans faille contre l'obscurantisme, et ses courageuses prises de position, d'autant plus qu'il a été «condamné à mort par les Frères musulmans» ? Entre vendredi et hier, nous aurons assisté à une grand nombre de conférences, dont nous livrons ici quelques titres : «A propos de poèmes inédits de Kateb Yacine de 1950/1951», de Chloé Money (doctorante à l'université de Bordeaux (France). La très jeune doctorante a relevé un aspect absolument inédit, lié au personnage controversé de Staline. Se basant sur différentes recherches de l'époque, la conférencière pose la question de savoir pourquoi Kateb Yacine, «homme subversif, engagé, révolté par définition, n'a jamais critiqué Staline ?» Entre autres éléments de réponse, elle propose celle de Benamar Mediène, qui pense que Staline était plus perçu par Kateb comme personnage potentiel de théâtre qu'homme politique. Il y a évidemment, aussi, «ce caractère mythique qu'a revêtu le personnage aux yeux du peuple après la bataille de Stalingrad, durant laquelle l'idéologie communiste était assez puissante pour arrêter une invasion». Nous avons aussi l'intervention du jeune Polonais, Pawlicki Jedrzej, chercheur à l'université Adam Mickiewicz (Pologne), qui a fait une étude comparée entre Kateb Yacine et Charles De Coster, écrivain belge du XIXe siècle, «remarquablement moderne et anticonformiste pour l'époque», intitulée, «Une étrange familiarité». Egalement celle de la jeune Elise Zeniter, de l'école doctorale de littérature française et comparée de Paris-Sorbonne : «De L'homme aux sandales de caoutchouc au Bourgeois-sans-culotte : la recherche d'une parole et d'une langue hors pouvoir». Citons aussi, pour seulement une séance de la matinée de samedi (dernier jour du colloque), la communication de Ilham Boudjir, maître de conférences à l'université Hadj Lakhdar de Batna, qui aborde la problématique de la langue chez l'écrivain, dans «son éternelle quête d'identité et découverte de l'altérité», sous le titre : «Du percevoir au dire chez Kateb Yacine», celle du poète, romancier et critique tunisien, Mansour M'Henni, de l'université Tunis-Elmanar : «Traduction de Nedjma : la vraie trahison», celle encore de Tatsiana Kuchuts, docteur en lettres françaises (université de Grenoble 3), dans laquelle elle relève l'engagement des porteurs de valises, à travers l'ami de Kateb Yacine, le poète français Boueglin, mettant en exergue leur action et espérance communes en une Algérie «sans colonisateurs, mais aussi sans les zélateurs qui ont trahi le peuple». Rappelons que ce colloque est organisé par l'association Promotion Tourisme et Action culturelle de Guelma, sous le patronage du ministère de la Culture, avec la collaboration des autorités locales.