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Une exception algérienne
Publié dans El Watan le 20 - 03 - 2014

Les murs de sa maison, dans sa ville natale de Batna, semblent le protéger du brouhaha extérieur et des fracas politiques auxquels il a définitivement tourné le dos. En dépit des sollicitations itératives et insistantes pour reprendre les commandes du pays, l'ancien président de la République décline gentiment l'offre et assure que sa carrière politique est derrière lui.
Une posture singulière dans l'histoire politique du pays, car jamais une personnalité n'a eu à refuser la magistrature suprême devant autant de sollicitations.
Déjà en 2009, d'anciens militants du RND l'exhortaient à se présenter et barrer la route à un troisième mandat, jugé de trop, à Bouteflika. En vain. En mai 2013, Mohamed Chafik Mesbah, officier du DRS, reconverti en analyste politique, déclare à un journaliste suisse : «Je ne vois aucun homme aujourd'hui qui se dégage. Aucun ne fait consensus, ni chez les laïcs ni chez les islamistes. Le seul qui ferait consensus, c'est Liamine Zeroual qui aurait pour mission de recoudre un tissu social miné par la corruption.» Des observateurs voient dans cette sortie le signe d'une division au sommet qui hypothèque l'avenir de Bouteflika.
De nombreux journalistes se bousculent devant la porte du «messie désigné par l'oracle» et essuient une fin de non-recevoir. Des gens des plus simples, notamment des enfants de chouhada, organisent des pèlerinages à Batna dans le but de convaincre Zeroual. Comme si sa valeur boursière s'était bonifiée par contraste avec les 15 ans de bouteflikisme. Pour un grand nombre d'Algériens, Zeroual est devenu le sauveur potentiel, une sorte d'ultime bouée de sauvetage d'un naufrage certain.
Ce n'est qu'en juillet 2013, que l'ancien officier de l'ANP sort de sa réserve et s'exprime publiquement. L'homme apparaît transformé par les signes de l'âge. Il a 72 ans, les cheveux blancs et des kilos en plus. «Le présidentiable ce n'est pas moi, allez voir ailleurs», leur a-t-il cordialement signifié.
«Faites quelque chose Monsieur le Président !»
Repousser des propositions aussi alléchantes n'est pas le seul trait singulier de Zeroual. Il est aussi le premier chef d'Etat d'un pays arabe, élu lors d'un scrutin pluraliste, à avoir démissionné de son poste. «Dans le monde arabe, depuis les indépendances de nos pays, Liamine Zeroual reste l'unique exemple d'autolimitation dans l'exercice du pouvoir suprême, au milieu d'une cohorte d'autocrates impénitents que l'histoire vient cruellement de rattraper», écrit Ali Mebroukine, universitaire et ancien collaborateur du président Liamine Zéroual (*). Un homme aussi atypique peut-il vraiment exister en Algérie ?
Les Algériens découvrent Liamine Zeroual le jour où il est nommé ministre de la Défense par le Haut-Comité d'Etat (HCE). C'était en juillet 1993. Le 30 janvier 1994, il est désigné à la tête de l'Etat pour assurer la période de transition.
Les portes de l'enfer s'ouvrent devant le pays qui va être mis à feu et à sang par les groupes islamistes armés (GIA). Economiquement, l'Algérie est à genoux devant les plans d'ajustement dictés par le Fonds monétaire international (FMI) et le manque de ressources. Bref, un contexte difficile, voire impossible à redresser. Mais l'homme des Aurès relève le défi et s'engage comme le plus humble des patriotes.
Le jour de l'attentat terroriste du boulevard Amirouche, qui a fait une quarantaine de morts, Zeroual se rend au chevet des victimes à l'hôpital. Devant la caméra de la Télévision nationale, une femme blessée l'interpelle avec cette phrase restée gravée dans le livre d'histoire de cette décennie noire : «Faites quelque chose, Monsieur le président !» Emu, Zeroual s'incline : «Nous ferons le nécessaire Madame ; nous sommes conscients…»
L'image fait son effet ; les Algériens savent apprécier les gestes rassurants de leurs dirigeants quand ils sont sincères. Avec lui, les forces de sécurité se réorganisent et commencent à inverser le rapport de forces en leur faveur face aux groupes islamistes armés qu'il qualifie de «traîtres et mercenaires». Mais Zeroual, porté à la Présidence par un vote massif le 16 novembre 1995, perçoit les carences du tout-sécuritaire.
Démocratisation
Il engage alors un dialogue national pour sortir de la crise et tend la main à ceux qui ont choisi le camp ennemi mais qui n'ont pas les mains tachées du sang des Algériens. L'initiative, adoubée par une loi baptisée «la Rahma», visait à assécher les maquis et apporter la sérénité dans les cœurs.
De plus en plus populaire, Zeroual fait ses choix et s'active à mettre en œuvres ses orientations. Il se fie alors, et de manière inédite, à un aréopage d'experts du Conseil national économique et social (CNES) pour lui fournir les outils nécessaires pour décider. «Il était en train de préparer avec Mohamed Salah Mentouri et quelques autres un véritable projet de transformation de la société algérienne et une remise à plat de son système politique», confie encore Mabroukine. A côté des victoires armées, la feuille de route politique de Zeroual commence à prendre forme.
Le peuple et son élite recommencent à espérer. Le processus est entaché cependant par les mesures antisociales de son chef de gouvernement, Ahmed Ouyahia, notamment les compressions massives, l'incarcération de cadres dirigeants ou encore la fraude électorale de 1997.
Le RND, un parti monté de toutes pièces, remporte les élections locales en trichant devant les caméras des médias étrangers. Zeroual, affilié à cette formation, encaisse le coup. Les dérapages du RND ont lieu à son insu, affirment ses défenseurs. Il est vrai que Zeroual n'a jamais manifesté de l'affection «au bébé à moustaches».
Sa réputation prend cependant des coups plus sévères à cause de son ministre-conseiller, le général Mohamed Betchine, impliqué dans des scandales, notamment la condamnation à mort de l'universitaire et militant progressiste, Ali Bensaâd, pour de prétendus actes terroristes. Un compagnonnage insolite, certes, mais tactique, justifie encore Mabroukine, qui blanchit Zeroual des dérives de Betchine.
Le 11 septembre 1998, le chef d'Etat surprend tout le monde et annonce son retrait. Pour beaucoup, cette décision est prise sous l'effet de la pression d'un clan du pouvoir qui accepte mal les choix du Président.
Vœu d'alternance
«C'est pour avoir refusé d'être un trois quarts de président ou encore d'être un simple ‘‘président stagiaire'', que Liamine Zeroual décide de mettre un terme à son mandat. Il était normal qu'après avoir été élu dans les conditions que l'on sait, Liamine Zeroual exigeât d'avoir les coudées franches pour désigner ses collaborateurs immédiats, restaurer le crédit des institutions de l'Etat, redorer le blason de l'Algérie terni par une décennie de violences et de sauvageries.
Il était légitime que Liamine Zeroual veuille moraliser la vie publique, entamer la démocratisation des institutions, élargir les espaces de liberté, déverrouiller le champ audiovisuel et, in fine, instaurer des contrôles rigoureux sur l'utilisation de l'argent public», écrit encore Ali Mabroukine. Pour le président démissionnaire, les raisons sont ailleurs.
«Ma décision annoncée le 11 septembre 1998 d'organiser une élection présidentielle anticipée ne résultait pas d'une manœuvre politique ou d'une pression quelconque, interne ou externe, comme elle n'était pas dictée par l'accumulation de difficultés insurmontables. […] En décidant, en toute liberté, de renoncer définitivement à ma carrière politique, j'ai estimé qu'il était temps que l'alternance se concrétise afin d'assurer un saut qualitatif à nos mœurs politiques et à la pratique de la démocratie, tant était loin de ma conception la notion d'homme providentiel à laquelle je n'ai jamais cru», expliquait-il dans un communiqué adressé en 2009 à d'anciens cadres du RND qui sollicitaient son retour.
Son patriotisme et sa morale sans limite ne pouvaient combler cependant ses faiblesses politiques, notamment sa naïveté face aux artisans de la politique politicienne qui pullulaient dans les arcanes du pouvoir ou encore le peu de travail qu'il a consacré à la diplomatie.
Ce qui ne l'empêcha pas, observe Badreddine Mili, de remettre à sa place Jacques Chirac qui le snobe lors de l'Assemblée générale de l'ONU. Zeroual réplique sèchement et prend sa revanche par le biais de son porte-parole Mihoub Mihoubi.
Un esprit détaché
Zeroual est un militaire et non un politique. Un militaire qui a toujours su répondre à l'appel de la patrie.
Son œuvre majeure demeure incontestablement l'instauration du bicaméralisme et la limitation des mandats présidentiels à travers la Constitution du 28 novembre 1996. Même ses détracteurs ligués autour du contrat de Rome ne trouvent rien à dire sur cette orientation révolutionnaire qui ne peut être que l'émanation d'un esprit détaché sur qui le goût et l'attrait du pouvoir n'exercent guère d'influence.
D'ailleurs, c'est aussi la raison pour laquelle il a entretenu de la distance avec son successeur, surtout quand ce dernier s'est acharné à amender l'article 74 de cette Constitution pour rester au pouvoir. Zeroual n'a jamais exprimé son opinion sur l'actuel Président, mais certains de ses agissements en disent long sur sa pensée.
A chaque visite de Bouteflika à Batna, Zeroual s'éclipse et change de ville afin d'éviter des surprises gênantes. Fier comme un Berbère, il a toujours su décliner les nombreuses invitations de son successeur aux cérémonies organisées au palais présidentiel à l'occasion des fêtes nationales.
«Le rappel des tribulations du président Liamine Zeroual doit constituer une source d'enseignements pour tous les Algériens. Subjectivement, Liamine Zeroual était un démocrate ; objectivement, il ne pouvait concrétiser les principales libertés consacrées par la Constitution, et c'est pour cette raison qu'il s'est effacé volontairement de la sphère politique.»
Du 30 janvier 1994 au 15 avril 1999, Zeroual aura marqué son passage grâce à un style atypique et une conception dévouée à sa charge mais détachée à l'égard du pouvoir qu'elle procure.
Ses fidèles disent de lui qu'il était un modèle d'intégrité et de probité.
Un homme de conviction, de courage et de principes. Avec du recul, il est perçu comme étant un homme d'Etat et non de pouvoir, encore moins un zaïm ou un homme providentiel.


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