Une présence furtive et embarrassée : rarement prix Nobel de la paix aura rasé les murs du prestigieux Nobel comme a choisi de le faire le président américain Barack Obama qui s'est aménagé un programme « light » à Oslo, en porte-à-faux avec les usages établis pour ce genre de cérémonie. Traditionnellement étalée sur trois jours, la remise du Nobel de la paix verra cette année son récipiendaire, le Président américain, débarquer et quitter aussitôt le Norvège à la vitesse d'une météorite en ne consacrant à cet événement qu'une seule journée de son temps. Obama, qui sera présent aujourd'hui à Oslo, a entrepris en effet de réduire à son strict minimum sa présence à la cérémonie officielle, n'hésitant pas à provoquer un incident diplomatique de lèse-majesté en déclinant l'invitation à déjeuner du roi de Norvège, en annulant la conférence de presse et en zappant le concert du Nobel qui clôture la cérémonie de remise du prix ; un rituel auquel tous les précédents Nobel se sont prêtés volontiers. Cette façon pour le moins inconvenante de snober le Nobel a irrité les Norvégiens, comme le confirme un sondage publié hier, lequel a, d'une certaine manière, donné raison à tous ceux qui avaient contesté le choix d'Obama pour le Nobel de cette année, forts de l'argument selon lequel le président américain n'a pas encore un bilan à faire valoir pour être récompensé. Tout comme elle place dans une position embarrassante la Fondation qui a essuyé de vives critiques pour le choix d'Obama lequel le lui rend mal, de surcroît, avec ce pied de nez fait aux usages protocolaires du Nobel. En décidant de se rendre à la sauvette à Oslo, le président américain a conscience qu'il n'est pas le bienvenu. Le choix de sa personne d'abord, les positions franchement militaristes qu'il a prises ensuite, quelques semaines plus tard, en décidant de l'envoi d'un nouveau renfort de troupes militaires fort de 30 000 hommes qui contrastent avec l'esprit du Nobel sont autant d'arguments de taille pour le disqualifier aux yeux des pacifistes et des hommes épris véritablement de paix et de justice à travers le monde. Obama, qui était très attendu par la presse pour s'expliquer sur sa distinction qui est loin de faire le consensus, a refusé de rencontrer les médias, poussant les organisateurs à annuler purement et simplement la traditionnelle conférence de presse organisée à l'occasion de cet événement. Entre Obama d'hier qui est entré par la grande porte au panthéon de l'histoire, enchaînant volontiers les déclarations publiques et les rencontres avec les médias, et Obama d'aujourd'hui réduit à emprunter des portes dérobées pour ne pas avoir à affronter et à assumer publiquement ses responsabilités et sa gestion sur des questions de politique internationale totalement éloignée de son discours de candidat à la présidence des Etats-Unis, un troisième personnage, mi-ange mi-démon, est né. De la posture de héros à celle de l'anti-héros, Obama aura réussi en un laps de temps très court à brûler tous ses vaisseaux.