Dans le monde du travail, pour ceux qui ont la chance et le privilège d'avoir un emploi par les temps de crise, on ne parle que des nouvelles dispositions sur le régime de retraite réinstaurant le départ à la retraite à 60 ans et la suppression de la retraite anticipée. Un système qui a fait le bonheur de beaucoup de salariés quinquagénaires, de plus en plus nombreux à frapper aux portes des caisses de retraite pour profiter des quelques années rognées sur la vie active pour un repos bien mérité ou bien pour se consacrer, pour ceux que cela inspire, à autre chose. L'expérience, toute récente, aura vécu le temps que durent toutes les expériences, chez nous, lesquelles sont vite enterrées aussitôt lancées. L'idée, pourtant, était fort louable aux plans aussi bien économique que social. L'objectif étant de libérer des postes de travail pour stimuler le marché de l'emploi et permettre aux jeunes arrivés sur le marché du travail ou ayant perdu leur emploi pour raison économique ou autre de revenir dans le circuit. Le moins que l'on puisse dire est que cette prophétie ne s'est pas concrétisée quand on analyse de près les chiffres du chômage et de création de postes d'emploi, qui sont inversement proportionnels à la courbe ascendante des départs en retraite anticipée. Les caisses de retraites se sont rendu compte, à l'épreuve du terrain, qu'il sortait plus d'argent qu'il n'en rentrait dans ses comptes du fait de la diminution du nombre des cotisations sociales consécutives au flux croissant des départs en retraite anticipée. D'autres pays, pour desserrer l'étau du chômage et relancer la croissance économique, ont innové en la matière en allongeant la durée légale du travail au delà des normes et conventions en vigueur concernant la législation sur le travail. Les « seniors » (les travailleurs ayant atteint ou dépassant la limite d'âge réglementaire pour le départ en retraite) sont de plus en plus sollicités et maintenus à leur poste par leurs employeurs en raison de leur expérience et savoir-faire et du gain en termes de productivité et de formation des nouvelles recrues. Le président français, Nicolas Sarkozy, avait inventé la formule « travailler plus pour gagner plus ». Nous n'en sommes pas encore là chez nous, dans la mesure où nous avons toutes les peines du monde à concilier les principes du droit à la retraite avec la rentabilité du système économique par une utilisation rationnelle et optimale des ressources humaines. L'engouement suscité par le régime des départs à la retraite anticipée, désormais remis en cause comme l'attestent les chiffres et les nombreux dossiers que s'apprêtent à déposer dans la précipitation les postulants avant l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions, renseigne sur la philosophie du travail en tant que fondement économique et moyen d'existence dans toute l'acception du terme. Existe-t-il une vie au travail compte tenu des salaires et de la cherté de la vie et après la vie active quand on voit tous ces retraités égrener leurs monotones journées de retraite à jouer aux dominos ? C'est en ces termes que se pose et que devrait se poser la problématique de l'emploi et de la retraite.