Les adeptes mileviens du genre Aïssaoui ont, six jours durant, vibré aux airs et intonations voluptueuses des groupes folkloriques venus des quatre coins du pays. Mais, la quintessence des spectacles offerts aux puristes aura lieu tout au final. Une clôture magnifique tant la communion entre les acteurs et le public aura été parfaite. Et pour cause, ce dernier a vécu en osmose avec les troupes au programme de cette ultime et inoubliable soirée de vendredi. En effectuant une entrée (côté public) tonitruante et fort remarquée, Djamiat Tariqa El Aïssaoua de Constantine, qui sera ensuite relayée sur scène par celle du patrimoine des arts populaires (Béchar), a littéralement subjugué les présents, qui ont passé près de deux heures de plaisir aux sons rythmés et aux percussions du bendir, tar, derbouka, zorna et tambourins. Le succès de la manifestation des Aïssaoua cuvée 2009, qui a pris pour slogan « La philosophie de l'invocation et son influence dans les milieux des zaouïas », est total et aura tenu toutes ses promesses tant au plan de l'organisation irréprochable que de l'engouement extraordinaire des spectateurs. Est caractéristique, à cet égard, le record enregistré en matière d'entrées à chaque apparition des 18 associations au menu de cet événement culturel, au point où la salle de spectacles de la maison de la culture s'est avérée exiguë pour contenir la foule ; ceci côté festif. Côté spirituel, la dimension de l'ancrage et de la diversité du style des Aïssaoua qui, au-delà des exaltations intenses, du folklore et des élans de transe, reste une voie aux accents de paix et d'espérance privilégiant la méditation et la contemplation de Dieu à travers une rythmique palpitante ponctuée de Dikr (invocation) et de Madh (éloge). Le soufisme, courant ascétique et mystique musulman, se veut aussi un mode de vie et d'union sacrée avec le Tout-Puissant. « La réclusion et la vie d'anachorète des soufis, cherchant sous la direction d'un maître à parvenir à l'union spirituelle avec Dieu, est l'expression de la soumission absolue et de l'adoration suprême d'Allah des initiés sacrifiant les plaisirs mondains au profit d'une communion spirituelle avec le Créateur », a souligné Saïd Djabelkhir, journaliste et chercheur en soufisme. « La restructuration du Douaâ (évocation) et la prière sur le Prophète (QSSSL) », « La philosophie de l'évocation à travers l'écriture du soufisme islamique », « Le référentiel du Dikr dans la Tariqa Aïssaouia » et « Le rang de la Daâoua dans le soufisme », ont constitué les thèmes des communications faites en marge des spectacles. Au niveau du hall des expositions, les organisateurs ont consacré de nombreux stands à la littérature et la poésie soufies, aux manuscrits retraçant le parcours des divers styles des Aïssaoua, au rôle des zaouïas et des confréries contre le colonialisme français et les visées expansionnistes des conquérants portugais et espagnols. Qu'il soit entonné sur des airs gnawi, sétifiens ou sur des rythmes chaâbi et malouf, le chant des Aïssaouia a plus que séduit. Il a conquis les cœurs des Mileviens.