Ahmed Benbitour veut canaliser l'énergie de toutes les forces mobilisatrices qui expriment leur mécontentement quant à la situation actuelle que traverse le pays. Des personnalités nationales multiplient les initiatives pour le changement. Face au verrouillage du champ politique et au rétrécissement des espaces publics d'expression libre, elles explorent de nouvelles voies capables de donner du sens à leur action et de remettre l'Algérie sur les rails. Loin des carcans habituels. Le projet d'Ahmed Benbitour, ancien chef de gouvernement et brillant économiste, en est la preuve. Un projet basé sur une « mobilisation pacifique ». Pour le faire avancer, son principal initiateur, M. Benbitour, met en place de nouveaux instruments. Le projet n'est donc placé sous la bannière d'aucun parti ni couleur politique. Il porte le label du changement pour le meilleur. « Nous avons créé un espace de débat appelé Cercle de l'initiative citoyenne pour le changement (CICC) », souligne M. Benbitour. Ce cercle accueille les points de vue de tous ceux qui sont intéressés par l'initiative. Internet est le principal moyen de communication. Plus de 150 compétences nationales ont déjà adhéré à cette initiative en participant au débat sur la refondation de l'Etat. D'autres tables rondes seront organisées, dès janvier 2010, sur la refondation de l'école, de l'économie et de la politique sociale. « Une fois que nous avons eu suffisamment d'avis, nous élaborerons une vision globale de l'Algérie de 2020. La réussite du projet reste tributaire du degré de l'adhésion citoyenne, mais aussi d'autres paramètres tenus en compte dès son lancement, à savoir un fort discours mobilisateur et une pertinente vision de l'avenir du pays. A cela s'ajoute l'appui indispensable de personnalités nationales et la mobilisation des citoyens. » En panne d'inspiration Pour M. Benbitour, il s'agit là d'un « examen de passage », d'une période probatoire qui définira la prochaine étape pour « concrétiser ce changement tant voulu ». Cette initiative va-t-elle aboutir ? M. Benbitour y croit dur comme fer. Son argument, c'est qu'elle est totalement différente des précédentes initiatives fondées sur d'hypothétiques alliances politiques au sein de l'opposition. Des alliances difficiles à former en raison notamment de graves divergences entre les partis de l'opposition. Avant M. Benbitour, des personnalités politiques – dont Hocine Aït Ahmed, Mouloud Hamrouche et Abdelhamid Mehri – avaient tenté, par des initiatives, de fédérer les forces de l'opposition. Et ils n'ont pas été les seuls à avoir lancé des projets qui aboutissent à rien. D'autres personnalités et partis politiques ont fait le pari d'unir les forces de l'opposition autour d'un projet commun. Sans y parvenir. Les divergences – mêlées à de vieilles rancœurs – sont telles qu'il est difficile de les surmonter. Les profondes déchirures dans l'opposition ont suffisamment convaincu Benbitour et ses collaborateurs à changer d'instrument en ouvrant le débat à tout le monde, sans différenciation politique. Si les partis politiques de l'opposition, en panne d'inspiration, justifient leur inertie par la fermeture du champ politique, d'autres Algériens, dont les travailleurs regroupés au sein de syndicats autonomes, ont bien démontré, par leur inlassable combat, qu'il est encore possible de gagner des batailles. Par leur persévérance et leur union, ils ont réussi à défoncer des lignes rouges, à franchir l'interdit et à s'imposer sur la scène publique. Ces syndicalistes, pourtant issus de milieux politiques différents, ont pu placer les intérêts des travailleurs au-dessus de leur mésentente partisane. Par son initiative, Ahmed Benbitour veut canaliser l'énergie de toutes ces « forces mobilisatrices » qui expriment – en dépit de tout – leur mécontentement quant à la situation du pays. Ce nouveau personnage politique tente de démontrer que l'échec des partis de l'opposition, qui n'arrivent pas à émerger après 20 ans de multipartisme, ne doit nullement condamner le reste de la société à la résignation. De nouvelles voies se dessinent…