Zineb Ali-Benali et Tramor Quemeneur sont les porteurs initiaux du projet. Ils recadrent, dans une présentation globale, la situation générale dans laquelle est intervenu le conflit mondial du début du XXe siècle.Ils rappellent avec intérêt des événements oubliés qui ont eu lieu partout dans l'empire français. «En Algérie, l'exode de Tlemcen (1910) va voir des centaines ‘‘d'indigènes'' prendre le chemin de l'exil vers le Moyen-Orient en raison de la mise en place de la conscription pour les indigènes. En 1912, des travailleurs algériens embarquent clandestinement pour la France. Ils meurent asphyxiés dans les soutes du bateau. Ferhat Abbas publie un article dans lequel il dénonce l'interdiction qui les empêchait de partir. Ils étaient attirés par des salaires meilleurs que sur les domaines coloniaux. La demande de main-d'œuvre dans les usines françaises va entraîner l'arrivée en France de centaines de travailleurs». A partir de 1914, d'autres Algériens, ceux-là contraints, devront partir pour la France, enrôlés dans les régiments coloniaux. 80 ans après l'invasion de l'Algérie par les troupes françaises, la face de l'Algérie coloniale après-guerre devient amère tant les injustices vont se trouver aggravées par cette guerre mondiale, au cours de laquelle les Algériens découvrent, quand ils en reviennent sains et saufs, qu'un indigène sera toujours considéré comme inférieur, chair à canon privilégiée, même revêtu du même uniforme que ses congénères européens. Ce colloque, insistent ses concepteurs, permettra ainsi de traiter comme jamais de la question des colonies dans la Première Guerre mondiale sous l'angle historique mais aussi des représentations. Avec, au plan historique, quelques questions et réflexions sur la «manière dont la guerre s'est déroulée dans les colonies, les conflits qui ont pu s'y dérouler, la manière dont les populations colonisées ont été mobilisées, à leurs utilisations et aux rôles qui leur ont été impartis, à leur résistance, à la manière dont les populations européennes ont traité les colonisés venus participer à la guerre, tant du point de vue national qu'international». La deuxième série de questionnements tient «aux changements que cette participation a introduits tant au sein des colonies en termes de rapports sociaux et notamment de mouvements revendicatifs». Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le mouvement national algérien s'est développé après-guerre, à la fin des années 1910 et au début des années 1920. Bien sûr, on parlera littérature avec les premiers romans qui envisagent la guerre sur le versant des colonisés : Elissa Rhaïs, Saâda la Marocaine, Plon 1919 ; Elissa Rhaïs, Le café chantant (et deux autres nouvelles), Plon, 1920 ; Mohamed Bencherif, Ahmed Ben Mostepha, goumier, Payot, 1920. Sans oublier l'inévitable Le Premier homme d'Albert Camus dans lequel il évoque la mémoire de son père, pauvre ouvrier qui trouvera la mort sur le champ de bataille en 1914, un an après la naissance du futur prix Nobel de littérature.