Les ennuis ne quittent visiblement plus Benyoucef Mellouk. Cet ancien fonctionnaire de la justice – qui a fait éclater le scandale des magistrats faussaires et des faux moudjahidine au début des années 1990 – a failli, il y a quelques jours, perdre sa main à cause d'une « prise en charge médicale inadéquate ». Victime d'une sévère fracture à la main droite avec un doigt complètement écrasé, M. Mellouk a été évacué en urgence vers l'hôpital de Blida où il a reçu des soins qui se sont avérés inappropriés à son cas. Il le saura plus tard en raison d'« atroces douleurs » qu'il ressentait. « Les radiographies montraient pourtant la gravité de la fracture qui nécessitait une urgente intervention chirurgicale. Mais au lieu de m'opérer, on s'est contenté de me mettre du plâtre et de bander ma main après l'avoir cousue », raconte cet homme désabusé. Sa main a été sauvée in extremis grâce à l'intervention d'un professeur au CHU Mustapha Bacha, qui lui a prodigué les soins nécessaires. « A Blida, je me suis senti indésirable, comme si j'avais la peste ! », déclare-t-il. M. Mellouk, faut-il le rappeler, est l'illustre personnage qui a osé dénoncer, pour la première fois en 1992, l'usurpation du statut d'ancien moudjahid par de nombreux magistrats et autres hautes personnalités de l'Etat. Au lieu d'être félicité, M. Mellouk se voit limogé de son poste au ministère de la Justice, intimidé et humilié. Pis, l'homme devient infréquentable et persona non grata dans son propre pays. Malgré les pressions, M. Mellouk, qui trouve quelques soutiens dans la presse privée, poursuit son combat contre vents et marées. Un combat désespéré qui lui coûte sa carrière, sa santé et dont les répliques touchent les membres de sa famille. « Je sens comme si on cherchait à me liquider », lâche-t-il, affirmant être « toujours » poursuivi par les tribunaux. « Même ma famille n'a pas été épargnée », dénonce-t-il. Depuis l'éclatement de l'affaire, M. Mellouk n'a pas eu un jour de répit : prison, procès, menaces, intimidations… Il en a vu de toutes les couleurs. Aujourd'hui, il ne demande aux dirigeants du pays que de mettre un terme à « ces humiliations ». « Je ne veux plus rien de ce régime, ni aide, ni avantage, ni prise en charge. Qu'il me laisse tranquille », tonne-t-il, affirmant qu'il ne regrette rien. « Je n'ai fait que mon devoir. » Ce que M. Mellouk regrette, c'est le fait qu'aucun responsable du pays n'ait accepté de prendre en charge cette affaire, qu'il considère comme une « haute trahison envers les martyrs ». Ne pouvant plus supporter la pression et les menaces de mort qui pèsent sur lui, M. Mellouk dit qu'il envisage de quitter le pays : « C'est malheureux d'en arriver là. Mais je ne vois plus d'issue. » Pris pour cible de partout, il dit que des pays occidentaux se montrent « prêts » à l'accueillir.