Le président Abdelaziz Bouteflika entame aujourd'hui une visite officielle de deux jours à Madrid. Celle-ci s'inscrit, selon un communiqué rendu public hier soir par la présidence de la République, « dans le cadre de la tenue de la 4e réunion de haut niveau en vertu du Traité d'amitié, de bon voisinage et de coopération signé entre l'Algérie et l'Espagne le 8 octobre 2002 à Madrid ». A cette occasion, ajoute-t-on, le chef de l'Etat coprésidera avec le président du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, le sommet bilatéral qui « procédera à un examen exhaustif des relations bilatérales et des perspectives de leur développement dans les différents domaines de la coopération ». De son côté, la presse madrilène croit savoir que le chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, évoquera avec le chef de l'Etat algérien plusieurs dossiers d'actualité parmi lesquels figurent en premier lieu ceux liés à la lutte contre le terrorisme au Sahel – récemment des ressortissants européens, dont trois Espagnols, ont été pris en otages par un groupe d'Al Qaîda au Maghreb islamique –, au conflit du Sahara occidental, à l'immigration clandestine et à la coopération énergétique. M. Zapatero qui préside, depuis le début du mois, l'Union européenne, devrait aussi évoquer avec le président Bouteflika la problématique de la relance de l'UPM, une structure qui est toujours à la recherche d'un secrétaire général. Il n'est pas inutile de préciser que cette visite intervient à un moment où les relations algéro-espagnoles sont loin d'être à leur meilleur niveau en raison notamment des nombreux litiges qui opposent les deux pays sur le dossier du gaz et la question du Sahara occidental. Celle-ci a lieu aussi dans un contexte où José Luis Rodriguez Zapatero – qui, faut-il aussi le dire, n'a pas fait grand-chose pour éviter aux relations algéro-espagnoles de traverser les crises qu'elles ont connu ces dernières années – se trouve en grosse difficulté dans les sondages en raison de l'incapacité de son gouvernement à trouver des solution à la grave récession qui affecte l'économie espagnole. Fait révélateur de cette perte de confiance auprès de la population : sa formation politique, le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) accuse jusqu'à cinq points de retard sur le Parti populaire (PP, droite). Aujourd'hui, la situation économique espagnole est dans un tel état de délabrement que de nombreux experts s'interrogent même sur la capacité de l'Exécutif espagnol à satisfaire les priorités qu'il s'est fixées depuis qu'il a accédé à la présidence de l'UE, à savoir application du Traité de Lisbonne, renforcement de la reprise économique et meilleure présence de l'Union européenne sur la scène internationale. Dans ce climat pour le moins difficile, y a-t-il lieu, donc, d'espérer un avantage de la rencontre du président algérien avec le chef du gouvernement espagnol ? Difficile à dire. L'économie espagnole dans un état de délabrement avancé Au vu des nombreux contentieux qui existent entre les deux pays, il est à parier que Bouteflika et Zapatero saisiront l'opportunité pour se dire les quatre vérités en face. Le pragmatisme économique et le bon sens voudraient que l'Espagne entreprenne sans plus attendre d'aplanir les divergences liées notamment au contentieux sur les prix du gaz et à la question de la distribution des produits de Sonatrach dans la péninsule ibérique. Les oppositions manifestées jusque-là par la partie espagnole aux doléances exprimées par Sonatrach sont d'ailleurs, de l'avis de nombreux spécialistes de l'énergie, tout aussi infondées que celles ayant accompagné la décision des Algériens de développer seuls le projet intégré de Gassi Touil. Le Tribunal international arbitral, siégeant à Genève (Suisse), confirmera d'ailleurs la justesse des décisions du groupe Sonatrach. Zapatero a, en tout cas, tout intérêt aujourd'hui à ce qu'un groupe comme Sonatrach investisse davantage dans son pays. Ce n'est pas tout. Concernant le Sahara occidental, nul n'est sans savoir qu'Alger reproche à Madrid son double langage qui en réalité cache mal un soutien à la position marocaine. Sur ce point particulier comme sur les autres dossiers, il semble aussi que le gouvernement Zapatero doit faire davantage l'effort de clarifier sa position et, surtout, de montrer sa volonté de sortir les relations algéro-espagnoles de l'impasse. Une attitude contraire ne pourrait être considérée autrement que comme un acte inamical.