La grève ouverte, engagée il y a quelques semaines, par les praticiens et les spécialistes de santé publique risque de prendre, dans les prochains jours, une tournure inattendue. La radicalisation de la protestation demeure, selon toute vraisemblance, la revendication principale de la base de ses deux syndicats. En effet, face à l'indifférence et au mutisme des pouvoirs publics à l'égard de la révolte et des revendications des travailleurs d'un secteur des plus névralgiques, les adhérents du Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) et du Syndicat national des spécialistes de santé publique (SNPSSP) proposent une série d'actions allant dans le sens de la radicalisation de la protestation. C'est ce qu'ont révélé, hier, les chefs de file de ces syndicats lors d'une conférence de presse animée à Alger. La base veut carrément investir la rue à l'instar de leurs collègues de la SNVI qui ont exprimé à leur manière leur ras-le bol. Une marche des blouses blanches donnera, selon eux, du fil à retordre aux pouvoirs publics. Les praticiens suggèrent également la révision de la notion du service minimum. Ces options, selon Dr Merabet, porte-parole du Snpsp seront discutées lors des assemblées générales qui doivent se tenir dans l'ensemble des wilayas, avant d'être débattues lors du conseil national extraordinaire qui se tiendra le 14 janvier prochain à Alger. Sur cette question, Dr Youcefi, président du Snpssp, tient à préciser que dans tous les pays du monde, le service minimum est laissé à l'appréciation des deux parties en conflit, mais ce sont toujours les pouvoirs publics qui assurent le service minimum car, en premier lieu, une grève pénalise le citoyen. En Algérie, regrette Dr Youcefi, les pouvoirs publics ne se soucient guère du service minimum. Il se fait et se décide de manière unilatérale par les animateurs de la grève. « Chez nous, le service minimum n'a jamais été défini ni discuté mais nous l'avons toujours assuré, et ce, à la place des pouvoirs publics car nous sommes conscients du degré de nuisance. Toutefois, ce service minimum peut être revu à sa juste valeur si les pouvoirs publics daignent nous écouter et nous déciderons unilatéralement de le revoir », a déclaré Dr Youcefi qui est persuadé que cette situation engendrera un pourrissement, dont seuls les pouvoirs publics porteront la responsabilité. Abondant dans le même sens, Dr Merabet, porte-parole du Snpsp, estime que pour faire réagir les pouvoirs publics qui se confinent, pour l'heure, dans un silence de tombe, les syndicats vont adopter une autre stratégie qui aura un impact plus visible. « Jusqu'à maintenant, nous avons assuré un service minimum, nous avons participé à la campagne de vaccination, mais le ministre nous l'a mal rendu. Il nous a insulté, il a opéré des ponctions sur salaires, il a relevé de leurs fonctions les grévistes ; mieux encore, ses collaborateurs nous ont traités d'ignares. C'est inadmissible », ont pesté Drs Merabet et Youcefi. Les animateurs de la conférence évoquent par ailleurs la gestion catastrophique par le ministre de la Santé de tous les dossiers, y compris celui de la grippe H1N1. A la question de savoir si le départ de M. Barkat figure parmi leur priorité, les syndicalistes répondent par la négation : « Aucun secteur n'a connu autant d'instabilité que le nôtre. Nous avons eu six ministres en l'espace de six ans. Aucun d'eux n'a pris en charge les problèmes du secteur. Nul n'ignore que l'on ne peut pas réussir une réforme dans l'instabilité, les grèves qui reviennent de manière récurrente sont les conséquences entre autres de cette instabilité », a soutenu Dr Youcefi qui revendique un vis-à-vis capable de régler les problèmes de la santé et apte à engager une réflexion et des négociations avec le partenaire. Les deux syndicats ont arrêté le principe de la tenue d'un sit-in hebdomadaire chaque mercredi, et ce, dans une tentative de pousser les pouvoirs publics à sortir de leur mutisme.