La salle avait du mal à contenir tous les convives de marque venus revoir leur ami et idôle. Parmi ces derniers, citons le président de l'APC d'Alger-centre, Adelhakim Bettache, le parolier, compositeur et auteur Hammadi, le comédien Mohamed Hilmi, le directeur de la Cinémathèque, Lyès Semiane, l'ancien chef de gouvernement Mouloud Hamrouche, l'ancien président de l'APN, Karim Younès, ainsi que le moudjahid Basta et le colonel Saâdi. Le coup d'envoi de cette rencontre conviviale a été donné par une troupe de la zorna, suivie de l'orchestre chaâbi de la commune d'Alger-centre. Dans une brève allocution, le président de l'APC d'Alger-centre, Abdelhakim Bettache, a rappelé à l'assistance que le comédien Saïd Hilmi a su s'imposer dignement dans les foyers algériens. «C'est un artiste, dit-il, qui a contribué au rayonnement de la culture algérienne. Il a tout donné à son pays». L'enchaînement se fait par la projection d'un film documentaire de 20 minutes intitulé La plume qui délire, réalisé par le technicien Amar Rabia. Le titre du documentaire en question est emprunté du beau livre de Saïd Hilmi, sorti en 2011, aux éditions Dalimen. Des séquences d'archives parlantes reviennent sur le riche parcours de Saïd Hilmi. De même qu'on retrouve dans ce documentaire des témoignages sincères d'hommes de culture et de politique, exhumés lors de la présentation de son ouvrage Plume en délire en 2011. Alors que la salle est plongée dans la pénombre la plus totale, le comédien Saïd Hilmi se lève de son siège pour exprimer sa joie avec une classe que seuls les grands artistes possèdent. Emu à l'extrême, il lance à ses convives d'une voix étouffée par l'émotion : «C'est fou comme je vous aime. J'offre cet hommage à mes regrettés camarades Fatiha Berber, Sid Ali Kouiret, Amar Laskri et Benamar Bakhti. Plus fort que la mort, c'est l'oubli. Je suis tellement heureux aujourd'hui que j'ai le droit de chanter.» Il se lance alors dans un numéro des plus époustouflants, campant le rôle d'un jeune cireur de La Casbah pour vanter les louanges de son beau pays, l'Algérie, et ce, à travers la symbolique de la fleur blanche. Le programme s'est poursuivi par une prestation du chanteur Didine Karoum et un spectacle humoristique animé par deux comédiens de talent. La cérémonie s'est achevée par la remise au comédien Saïd Hilmi d'un burnous blanc, d'un trophée, d'un cadeau ainsi qu'un bouquet de fleurs. Saïd Hilmi est tellement ému par tant d'égards qu'il a du mal à contenir ses larmes. Il exhorte son frère, Mohamed Hilmi, à le rejoindre sur scène. Sur un ton complice, il l'accuse de l'avoir entraîné dans cette galère de la scène artistique. Mohamed Hilmi rétorque en lui disant : «Saïd est non seulement mon frère et confrère, mais également mon meilleur ami. Nous partageons plein de souvenirs ensemble. Il est arrivé sur la scène en 1952 avec la pièce Mounir Radjel, à l'appel de Fernandel, Mahieddine Bachtarzi, Mustapha Kateb et moi-même. Saïd est intelligent et doué à la fois. Il ne doit rien à personne. C'est son talent qui parle de lui. A bon entendeur salut», dit-il sous un tonnerre d'applaudissements. En guise d'au revoir, Saïd Hilmi, toujours égal à lui-même, remercie les présents d'être venus aussi nombreux en ne manquant pas d'ajouter : «Il est temps de se retirer. Il ne faut jamais faire un combat de trop dans la vie.» Une phrase, certes, lourde de sens, qui ne saurait plaire à son public, sachant que l'artiste peut encore faire fructifier son génie créatif.