Des ruines d'anciens villages datant du 12ème siècle. Une nature à vous couper le souffle. Contrée de savants illustres, Béni Snouss, agglomération composée de douze villages dont Beni Achir, Khémis, Mazzer, Ouled Moussa, Gasba et Zahra, est la dernière région berbère à perpétuer une tradition ancestrale : Ayred (le lion). La fête coïncidant avec le nouvel an du calendrier amazigh. Une tradition basée sur la préparation des mets particuliers («berkoukès», beignets et crêpes) et des spectacles nocturnes, consistant à reproduire une histoire mythologique. Une reconstitution célébrée tous les ans avec la même ferveur et passion. Mais en fait, qu'est-ce que Ayred ? En plus des victuailles, les habitants, réunis en groupes de neuf personnes toutes déguisées avec des masques représentant des animaux, passent d'une maison à l'autre. Le lion est tiré à l'aide d'une chaîne. Le guide, accompagné de ses acolytes, muni d'un drapeau, frappe aux portes des maisons ; au cas où le ou la propriétaire n'ouvre pas, les participants entonnent : «La jarre est cassée et la maîtresse de maison est répudiée». Un amas de pierres est alors déposé sur le seuil de la maison. Si la porte est entrouverte, le lion entre, suivi de ses compagnons au son de la «ghaïta» et du «bendir» et des chants : «Ouvrez vos portes, nous sommes venus». La suite du scénario dont on gardera le suspense, est tout aussi passionnante. Mais au fond, tout ce jeu -qui est la préservation de l'héritage des aïeux- a pour objectif principal la solidarité puisque les fruits, les légumes et l'argent récoltés seront distribués aux nécessiteux. «Ayred, Ennayer chez les Beni Snous. Aux origines du théâtre» est un livre-album de l'artiste peintre Mustapha Nedjaï, publié aux éditions Dalimen en hommage au carnaval : «J'ai fait ce beau livre par amour. Ce n'est qu'un regard admiratif d'un artiste pour cette fête qui m'a subjugué. Les masques utilisés sont d'une beauté esthétique et artistique extraordinaire. Ils sont vraiment impressionnants», a affirmé l'auteur qui a dû sillonner la région, discuter avec ses habitants, avant d'immortaliser cette richesse dans un bel ouvrage. Ali Abdoun, autochtone, metteur en scène de théâtre et auteur d'un documentaire sur le lien culturel et la résistance de la population snoussie pendant la guerre de libération, reconnaît, lui aussi, que les habitants se sont rendus célèbres par la manière de fêter le nouvel an amazigh, trois nuits durant. Le lendemain, chaque jeune vaque à ses activités quotidiennes sans dévoiler le rôle joué la nuit. En fait, un «rôle» joué lors de la guerre de libération par les habitants de Béni Snouss, région réputée pour ses mille martyrs.