L'espace porte le nom du comédien et auteur de théâtre M'hamed Benguettaf, ancien directeur général du TNA. «Benguettaf a rejoint le TNA en 1966. Il fut à la fois créateur, adaptateur, comédien. Il a voyagé, avec son public, entre Nazim Hikmet, Kateb Yacine et Tahar Ouettar et autres. Il a créé ‘‘Masrah Al Qala''a avec Sonia, Ziani Chérif Ayad et Azzedine Medjoubi. Il a élevé le théâtre algérien à un niveau mondial… Nous lui dédions cet espace pour lui rendre hommage. Un espace qui porte toute sa passion pour le théâtre», a déclaré Mohamed Yahiaoui, directeur général du TNA. Il a rappelé que Benguettaf a laissé au moins 25 travaux pour le théâtre algérien. Une fois par mois, le nouvel espace, situé au deuxième étage du TNA, abritera un débat ou une conférence, un samedi matin. Le 4 juin prochain, le débat s'articulera autour du «théâtre scolaire» avec la présence de Djamila Mustapha Ezzegaï, Kada Benchemissa, Mustapha Alouane et Larbi El Ataoui. Après les vacances estivales, l'espace Benguettaf sera rouvert le 24 septembre avec une conférence sur le «Théâtre et le public» animée par Makhlouf Boukrouh, Ahmed Cheniki, Lamri Kaouane, Hakim Dekkar et Brahim Chergui. Hier, le premier débat a été consacré à «La lutte de libération dans le théâtre algérien» en présence d'Ahcène Thlilani, universitaire, Abdelhamid Rabia et Taha El Amiri, comédiens, El Hadi Rdjeb, l'un des premiers chanteurs de la troupe du FLN dans les années 1950, et Tahar Benahmed, compositeur. «Il est important de donner une définition à ‘‘Révolution''. Aujourd'hui, dans les pays arabes, tout le monde parle de ‘‘révolution'' alors qu'il s'agit en fait d'un mouvement de réforme. Faire une révolution, c'est renverser la table, tout changer. Dans le monde contemporain, je ne connais que deux Révolutions : l'Algérie et le Vietnam», a soutenu Ahcène Thlilani, auteur notamment de l'essai, La Révolution algérienne dans le théâtre arabe. Selon lui, les travaux des hommes de théâtre tels que Allalou, Touri, Bachtarzi et Rachid Ksentini avaient préparé le terrain au déclenchement de la guerre de Libération nationale en 1954 en maintenant la conscience nationaliste et en incitant à la révolte. «Le théâtre a accompagné la Révolution. La troupe artistique du FLN, créée en Tunisie par Mustapha Kateb, avait pour mission de faire connaître ce mouvement libérateur. La troupe a présenté plusieurs pièces comme Les enfants de La Casbah, Nahwa al nour et El Khalidoun», a-t-il rappelé. Il a évoqué également l'action militante du théâtre animé par les étudiants algériens comme Abdallah Rekibi. «Il faut également évoquer Le cadavre encerclé de Kateb Yacine, première pièce révolutionnaire algérienne. Le dramaturge y a rappelé les manifestations réprimées dans le sang du 8 mai 1945. Une pièce qui a troublé la conscience européenne et française», a relevé Ahcène Thlilani évoquant également la pièce La dernière porte de Mostefa Lacheraf (écrite en prison) et les pièces de théâtre radiophonique de Salah Kharfi (diffusées par Sawt Al Djazaïr au Caire et à Tunis). Taha El Amiri a rappelé que le FLN avait donné ordre en 1956 pour arrêter la saison théâtrale et artistique à l'Opéra d'Alger. «Parce que la Révolution était entrée dans le vif sujet, les autorités coloniales avaient tout fait pour prouver le contraire en organisant des soirées dans d'autres salles pour dire que tout allait bien en Algérie. Le Congrès de la Soummam avait donné une place importante pour la culture comme moyen de lutte. La direction de la Révolution avait décidé alors de créer la troupe artistique du FLN à l'image de l'équipe sportive. Il fallait montrer que toutes les catégories de la population algérienne soutenaient la guerre de Libération nationale», a souligné Taha El Amiri, le doyen des comédiens algériens.