C'est un parcours du combattant que doivent livrer les parents d'enfants porteurs d'un handicap ou de troubles du langage pour dénicher une place dans un établissement scolaire. Après les difficultés rencontrées pour le diagnostic du trouble, les parents doivent aussi affronter le refus des responsables des établissements scolaires d'accueillir leurs enfants atteints de troubles du langage ou d'autisme. Une réalité que l'équipe de l'établissement privé Eveil Scolaire veut changer, accueillant annuellement une dizaine d'enfants atteints d'autisme ou porteurs de différentes formes de troubles du langage ou en échec scolaire. Fatiha Lehad, fondatrice et directrice de l'école, dénonce d'ailleurs l'attitude de plusieurs écoles, mêmes privées, qui refusent d'accueillir des enfants autistes. «C'est de la ségrégation», estime-t-elle. La fermeture des établissements publics ou privés à ces enfants accentue la détresse des parents ainsi livrés à eux-mêmes sans aucune issue. «Eveil Scolaire croit au potentiel de chaque enfant», explique Mme Lehad, en soulignant que «pour la session 2015 de l'examen de fin du cycle primaire, la meilleure moyenne générale de 9,85/10 a été obtenue au niveau de cet établissement par un enfant autiste». Les locaux de cette école, située sur les hauteurs d'Alger, ont abrité la semaine dernière une formation au profit des enseignants, psychologues, auxiliaires de vie et parents d'élèves. Cette formation, qui a vu la participation d'un expert de l'académie de Grenoble (France), vise à renforcer les liens entre les établissements privés en vue de la création d'un réseau national pour l'intégration des enfants autistes en milieu scolaire dans les meilleures conditions. Même si Mme Lehad regrette que la participation de ses confrères des établissements privés soit «timide», elle se fixe comme challenge la poursuite du cycle de formations prévues durant l'été, et en septembre au profit du personnel appelé à la prise en charge de la scolarisation des enfants porteurs de ce genre de handicap. «L'idéal serait d'aboutir à la mise en place d'un réseau national permettant ensuite d'avoir entre les mains un programme scolaire adapté à ces enfants, ceci, avec la participation des experts dans ce domaine», explique la même responsable, en marge des ateliers. L'occasion était, pour la directrice d'Eveil scolaire, lance un appel à l'adresse des ministères concernés pour la mise en place d'un système permettant la contractualisation des auxiliaires de vie, éléments indispensables pour l'accompagnement des enfants et faciliter leur intégration. Une école pour tous n'est pas une utopie Pascal Mercier, conseiller du recteur de l'académie de Grenoble, spécialiste des questions relatives à la scolarisation des enfants porteurs de handicap, ayant dirigé ces ateliers de formations, explique : «Tous les enfants ont droit à l'école ordinaire, quel que soit leur handicap ; mais quelquefois, il faut que le parcours soit adapté, il faut que la démarche pédagogique des enfants soit adaptée à leurs besoins. Dans le cas de handicap lourd, il faut des accompagnements qui relèvent du secteur médico-éducatif ou de celui de la santé. Il faut un accompagnement par des orthophonistes, des éducateurs, des psychologues.» Pour cet expert, «l'école ne peut pas certes tout faire à elle seule, mais le principe qui s'affirme aujourd'hui est la construction d'une école inclusive qui accueille tous les enfants sans distinction. C'est à l'école de s'organiser en fonction des besoins des enfants». M. Mercier est convaincu que les enfants autistes, sous certaines conditions, peuvent suivre un parcours scolaire ordinaire. «Plus le diagnostic est précoce, mieux ce sera», dit-il. La question de l'accompagnement en classe se pose avec acuité. L'enfant autiste ne peut pas être seul en classe avec son professeur sans l'accompagnement de l'auxiliaire de vie. L'expert insiste sur le diagnostic précoce des troubles : «Un enfant autiste, pris en charge dès la maternelle et scolarisé très jeune avec les enseignements nécessaires (langage, écriture, lecture…), fera un parcours peut-être différent, mais sera scolarisé. Les résultats sont prometteurs. Mais s'il n'est pas pris en charge, l'enfant va sombrer dans la déficience intellectuelle sévère.» A souligner que le séminaire traite des troubles du langage, dysphasie, dyslexie, dysorthographie. Des ateliers sont mis en place avec des orthophonistes, des enseignants et des auxiliaires de vie pour expliquer ces troubles et leurs répercussions sur l'apprentissage scolaire et comment mettre en place des adaptations pédagogiques permettant à l'enfant de réussir sa scolarité.